Entre empires, invasions et renaissances nationales, la Slovaquie s’est construite sur plus de deux millénaires d’histoire, au cœur de l’Europe centrale. Après la Lettonie, la Hongrie, nous vous proposons de découvrir l’histoire de ce pays.
Située au croisement des mondes germanique, slave et hongrois, la Slovaquie est un petit pays montagneux de 49 000 km², peuplé de 5,8 millions d’habitants. Mais derrière cette modestie géographique se cache une histoire dense, marquée par les conquêtes, les effondrements impériaux et une lente émancipation nationale.
Des origines préhistoriques à la romanisation
Les premières traces humaines en Slovaquie remontent à près de 200 000 ans. Les fouilles de Nové Mesto nad Váhom ou la célèbre Vénus de Moravany, sculptée il y a plus de 20 000 ans, témoignent d’une occupation ancienne et continue.
Au Néolithique, l’agriculture et la métallurgie prospèrent dans les vallées du Danube et de la Tisza, faisant de la région un point de contact entre les cultures venues d’Anatolie et celles d’Europe centrale.
À partir du IVe siècle avant notre ère, les Celtes s’y installent, apportant leur organisation politique et leur art du métal. Leur capitale, située près de Bratislava, frappe même sa propre monnaie, signe d’un haut degré de civilisation.
Ils seront ensuite supplantés par les Germains, puis par les Romains, dont la présence marque durablement la rive nord du Danube. Le territoire devient alors une zone de contact stratégique entre Rome et les tribus barbares.
L’arrivée des Slaves et la naissance de la Grande Moravie
Vers le Ve siècle, les Slaves occidentaux franchissent les Carpates et s’établissent sur le territoire de l’actuelle Slovaquie. Sous la pression des Avars, cavaliers venus d’Asie centrale, ces tribus se regroupent. En 623, un marchand franc, Samo, parvient à unir les peuples slaves contre leurs envahisseurs : c’est le premier embryon d’État slave connu en Europe.
Deux siècles plus tard, au IXe siècle, le prince Mojmír Ier fonde la Grande Moravie en unissant les principautés de Nitra et de Moravie. Cet empire, à la fois chrétien et indépendant, marque l’entrée du monde slave dans l’histoire européenne.
Les missionnaires Cyrille et Méthode, venus de Byzance, y introduisent la liturgie en slavon et inventent l’alphabet glagolitique, ancêtre du cyrillique.
Sous le règne de Svatopluk Ier, la Grande Moravie s’étend jusqu’à la Bohême, la Pannonie et la Vistule, avant d’être balayée par les invasions hongroises vers l’an 900.
Mille ans sous la couronne hongroise
Au Xe siècle, les tribus magyares conquièrent le bassin des Carpates et intègrent la Slovaquie dans le Royaume de Hongrie, fondé par Étienne Ier. Cette domination durera près de mille ans.
La région connaît un essor économique considérable : des villes minières prospèrent dans les monts Métallifères, l’artisanat se développe et les échanges s’intensifient. En 1467, le roi Matthias Corvin fonde la première université du pays, l’Academia Istropolitana, à Bratislava (alors Presbourg).
Après la chute de Buda en 1541 face aux Ottomans, la Slovaquie devient le centre politique du royaume hongrois sous domination des Habsbourg. Presbourg devient capitale de la Hongrie et ville de couronnement des rois.
Mais les Habsbourg imposent aussi une forte germanisation et magyarisation. Au XVIIIe et XIXe siècles, face à la centralisation de Vienne et à l’assimilation culturelle de Budapest, émerge un mouvement national slovaque, inspiré du panslavisme et porté par des figures comme Ľudovít Štúr. C’est lui qui codifie la langue slovaque moderne en 1843.
De la Tchécoslovaquie à la domination communiste
Après la Première Guerre mondiale et la dislocation de l’Empire austro-hongrois, la Slovaquie rejoint en 1918 la Tchécoslovaquie, aux côtés de la Bohême et de la Moravie.
Cette union, conçue à Versailles, est marquée par de fortes disparités : les Tchèques, héritiers de l’Autriche, sont plus industrialisés, tandis que la Slovaquie, issue de la Hongrie, reste rurale et profondément catholique.
En 1939, sous la pression d’Hitler, un État slovaque indépendant est proclamé à Bratislava sous la présidence du prêtre Jozef Tiso. Inféodée au Reich, cette première indépendance reste largement nominale. Après la guerre, la Tchécoslovaquie est restaurée sous influence soviétique.
En 1948, le coup de Prague installe durablement le régime communiste. Le pays entre dans le bloc de l’Est. En 1968, le Slovaque Alexander Dubček tente de réformer le système lors du Printemps de Prague, mais les chars du Pacte de Varsovie écrasent l’espoir d’un socialisme à visage humain.
1989-1993 : la Révolution de Velours et la renaissance nationale
La Révolution de Velours, en novembre 1989, met fin pacifiquement au régime communiste. Deux nations, tchèque et slovaque, redécouvrent leur identité propre.
Le 1er janvier 1993, la République slovaque indépendante voit le jour. Son premier président, Michal Kováč, doit composer avec les tensions héritées du passé et la figure populiste de Vladimír Mečiar, dont le pouvoir autoritaire isole le pays dans les années 1990.
À partir de 1998, la Slovaquie se réengage sur la voie occidentale. Sous le gouvernement Dzurinda, elle rejoint l’OTAN et l’Union européenne en 2004, puis adopte l’euro en 2009. Aujourd’hui, la Slovaquie est un État membre de plein droit de l’Union et de l’espace Schengen, acteur discret mais central du groupe de Visegrád (aux côtés de la Pologne, de la Hongrie et de la Tchéquie).
Bratislava, capitale baroque et moderne, illustre cette synthèse entre passé et modernité : ancienne ville de couronnement des rois de Hongrie, elle est désormais un centre européen dynamique, aux portes de Vienne.
La Slovaquie reste marquée par son héritage de carrefour des empires : celte, romain, germanique, hongrois, autrichien, soviétique.
Mais elle a su forger une identité propre, enracinée dans sa langue, sa foi et son histoire. De la Grande Moravie aux institutions de Bruxelles, le peuple slovaque a traversé les siècles en préservant une continuité culturelle rare au cœur du continent.
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Une réponse à “Patries d’Europe. De la Grande Moravie à l’Union européenne : l’histoire mouvementée de la Slovaquie”
Très intéressant et remarquablement concis. Merci