Qui est l’écossais le plus connu au monde ? Le héros William Wallace, l’acteur Sean Connery ? Non, c’est Picsou ! Il revient dans une nouvelle aventure drolatique, confronté à un autre milliardaire, inspiré d’Elon Musk, qui a fait fortune dans les cryptomonnaies… Créée il y a près de 80 ans, recherchons le message de cette célèbre bande dessinée.
1- La vie de Picsou et le nouvel album.
Picsou nait en 1867 en Ecosse. Il descend de la famille des McPicsou, ruinée au fil des générations. Alors qu’il passe près du château du clan McPicsou, il s’y réfugie où il fait la rencontre du fantôme de son ancêtre. Celui-ci lui conseille de partir en Amérique, afin de rejoindre son oncle John McPicsou. À l’âge de 12 ans, il s’embarque ainsi pour l’Amérique. Son amour de jeunesse, Goldie O’Gilt, est propriétaire d’un saloon à Dawson City à l’époque où il est chercheur d’or. Mais il n’a pas d’enfant. Il a deux sœurs, Matilda et Hortense, qui deviendra la mère de Donald. Il est souvent accompagné par son neveu Donald et ses petits-neveux Riri, Fifi et Loulou, membres des Castors Juniors. Picsou se fait de nombreux ennemis au fil du temps : les voleurs Rapetou, le milliardaire concurrent Archibald Gripsou et d’autres plus originaux… Il devient le canard le plus riche du monde. Connu pour son avarice, il possède un coffre-fort géant à Donaldville, dans lequel il entrepose les pièces accumulées au cours de ses années passées en quête de richesse, chacune représentant un souvenir. Mais il va parcourir le monde, diffusant ses idées économiques et dénonçant le communisme…

Intitulée Picsou et les bit-coincoins, la nouvelle aventure se déroule de nos jours. En lisant le journal, Picsou découvre qu’il n’est plus le canard le plus riche du monde, supplanté par un certain Carsten Duck (rappelant Elon Musk), qui a fait fortune dans la cryptomonnaie. Un canard perçu comme génial pour les uns et fou pour les autres. Il vit sur une île artificielle où il adore cultiver ses muscles. Picsou semble dépassé par son époque… Jaloux, il se lance lui aussi dans les bitcoins, aidé par le génial Géo Trouvetou et ses neveux : Riri, Fifi et Loulou, devenus des influenceurs rebaptisés : Re-Reel, Wififi et Lou-Louk. Le trio va former leur oncle aux pratiques numériques. Picsou découvre ainsi le selfie, qu’il adore car cela lui permet d’économiser un photographe. Menacé par la modernité nouvelle de Picsou, Carsten Dusk va faire sortir de prison les Rapetou, devenus des hackers, pour leur confier une mission classique : le cambrioler par une perfide cyberattaque ! Picsou, au milieu de son coffre vide, est alors ruiné… Saura-t-il rebondir ? Le Festival cinématographique des Canes va peut-être lui offrir une seconde chance…

2- La création de Picsou.
L’écossais Balthazar Picsou, personnage des studios Disney, est créé en 1947 par l’américain Carl Barks (1901-2000). Cet auteur de bande dessinée, et scénariste de films d’animation, a dessiné pendant de nombreuses années le personnage de Donald Duck.

Carl Barks (1901-2000) nait dans un ranch des environs de l’Oregon. Après la mort de sa mère, il quitte l’école et aide son père à la ferme sans négliger sa passion du dessin. En 1918, il part à San Francisco avec l’ambition de devenir illustrateur, mais il n’y parvient pas. Il exerce alors les métiers de bûcheron, métallurgiste, charpentier, gardien de mules et de vaches, imprimeur… En 1928, il publie son premier dessin dans une revue canadienne. En 1935, il apprend que Walt Disney recherche des dessinateurs d’animation. Il entre dans la compagnie et est engagé par Walt Disney pour travailler sur les story-boards des dessins-animés mettant en scène la famille Duck. Il dessine avec Jack Hannah le premier album de Donald sur un scénario de Bob Karp : L’or des pirates (Donald Duck Finds Pirate Gold). Barks démissionne des studios Disney en 1942. Il est engagé par l’éditeur Western Publishing, qui lui confie les histoires de Donald Duck pendant trois décennies. Il crée notamment Picsou, en 1947, avec l’histoire Noël sur le mont Ours (Christmas on Bear Mountain).
Le nom américain de Picsou, Scrooge McDuck, est inspiré du personnage Ebenezer Scrooge, dans Un chant de Noël, de Charles Dickens. Dickens s’était inspiré de l’homme politique anglais John Elwes. Le « Mc » (abréviation de Mac) rappelle son origine écossaise. En France, il s’appelle d’abord, en 1949, Oncle Harpagon, inspiré du personnage de L’Avare de Molière en raison de son avarice. Puis, le 21 décembre 1952, il s’appelle Balthazar Picsou, dans Donald et la Lettre au père Noël, une histoire du Journal de Mickey. D’abord personnage secondaire dans les bandes dessinées de Donald, il devient populaire et connait ses propres aventures en 1952.
À partir de 1986, le dessinateur américain Don Rosa crée la suite des histoires de Donald et Picsou. Elles sont dans la continuité de l’univers de Carl Barks. Don Rosa dessine ainsi La Jeunesse de Picsou. Cette série lui vaut un Will Eisner Award (best continuing series) en 1995, la récompense la plus prestigieuse pour un auteur de comics. Il en remporte un second en 1997 (best artist/writer, humour).

3- L’idéologie de Picsou.
Carl Barks assure que sa jeunesse économiquement difficile a influencé le caractère de ses personnages Donald et Picsou. Donald est en effet un personnage qui passe de petit boulot en petit boulot, sans jamais avoir de succès. Picsou a vécu dans sa jeunesse les mêmes problèmes que Donald, mais a réussi à s’en sortir par l’intelligence, la détermination et le travail. Au fil des histoires, des éléments de sa vie sont petit à petit divulgués. On découvre ainsi les idées mises en avant dans cette série.
Les récits tournent généralement autour d’un projet économique. Picsou a gagné son argent à la sueur de son front, comme prospecteur, cow-boy…. Mais les histoires de Picsou ne glorifient pas le capitalisme. Picsou est un avare qui aime son or et passe son temps à le protéger. Il y a donc une leçon de morale toute simple : l’argent ne fait pas le bonheur. Remarquons que Picsou ne développe pas le capitalisme financier, puisque sa richesse reste stockée dans son dépôt ! Autre élément à charge : l’un des méchants est Monsieur Molay (Mister Molay), dirigeant du Conseil Monétaire International (parodie du Conseil Monétaire International) et membre du Prieuré de Sion.

Cette série dénonce également le communisme. La Brutopie, pays imaginaire correspondant à la Sibérie, est une dictature, parodie de l’Union Soviétique. Son nom provient d’un jeu de mots entre « brute » et « utopie ». Le drapeau brutopien représente un poignard blanc à la garde rouge, sur un fond blanc. Son objectif est de devenir la première puissance mondiale, par le vol de technologies. La Brutopie envoie des satellites artificiels dans l’espace. Le dictateur brutopien ressemble à Nikita Khrouchtchev, Secrétaire Général du Parti Communiste de l’Union Soviétique de 1953 à 1964. Cela parait évident lorsque dans une illustration de Don Rosa, le dictateur brutopien brandit sa chaussure, cet acte qui rendit célèbre Khrouchtchev en 1960. Malgré sa sympathie pour le sénateur démocrate socialiste Bernie Sanders, le nouveau dessinateur, Don Rosa, n’a donc pas changé le message du canard créé par Carl Barks.

4- L’immense succès de Picsou en France.
En France, Picsou connait un immense succès, encore plus important qu’aux Etats-Unis. Aujourd’hui, dans n’importe quelle maison de la presse, on trouve de nombreux magazines contenant des bandes dessinées Picsou.
Le bimestriel Picsou Magazine, dont le premier numéro est sorti le 21 février 1972, s’écoule en moyenne à plus de 100.000 exemplaires tous les deux mois. Des débuts jusqu’au milieu des années 1980 : on y trouve les grandes aventures issues de l’école Disney italienne. À partir de la nouvelle formule d’août 1987, Picsou Magazine est centré sur les bandes dessinées autour des personnages de Donaldville (Donald, Picsou…), Mickey Mouse se retrouvant dans le Journal de Mickey. Apparaissent des pages cinéma, télévision, jeux vidéo… Entre la fin des années 1980 et le début des années 1990, le magazine se recentre sur les histoires de Barks, tout en incorporant les productions hollandaises, danoises, ou brésiliennes. À la fin des années 1990, sont publiées en exclusivité les histoires de Don Rosa, dont La Jeunesse de Picsou. Depuis 2003, Picsou Magazine publie surtout des histoires anciennes de Carl Barks et des récentes de William Van Horn. En 2019, le magazine passe de 148 à 304 pages, dont 240 de bandes dessinées.
Le magazine lance en 1977 un supplément de 196 pages, Super Picsou géant, qui deviendra un magazine à part entière à partir de 1983.
Autre magazine, Les Trésors de Picsou, est lancé en 1998. Les premiers numéros publient La Jeunesse de Picsou. Depuis 2006, cette revue publie les meilleures histoires de Carl Barks, Don Rosa…, replaçant les récits dans leur contexte et décrivant les influences des auteurs. Une thématique (historique, géographique ou liée à un personnage récurrent) sert de fil rouge à chaque numéro.

5- Analyse de Picsou et les bit-coincoins.
Dans cette nouvelle aventure, Picsou et les bit-coincoins, Picsou est confronté à un autre milliardaire, inspiré d’Elon Musk, qui a fait fortune dans les cryptomonnaies. Alors que Picsou est uniquement intéressé par l’accumulation de richesse, Carsten Duck recherche le pouvoir, l’argent n’étant que le moyen pour y parvenir. Les auteurs caricaturent ainsi notre monde moderne connecté, ainsi que le choc intergénérationnel entre Picsou et ses neveux. Cela permet de créer des situations cocasses qui amuseront les plus jeunes.
Ce récit, fluide et drôle, est imaginé par Julien Berjeaut, dit Jul. Né en 1974 dans le Val-de-Marne, issu d’une famille de professeurs de gauche, il remporte à douze ans le troisième prix du concours jeunesse au festival d’Angoulême. Élève de l’École alsacienne, puis de l’École normale supérieure de Fontenay-Saint-Cloud, agrégé d’histoire, il enseigne l’histoire à l’Université Paris-Est-Marne-la-Vallée puis l’histoire chinoise à l’ENS, avant de changer de voie. Devenu dessinateur de presse, il collabore à de multiples prestigieux, presque tous classés à gauche, d’abord à La Nouvelle République des Pyrénées, puis au Point, à Lire, L’Humanité, Libération, Le Monde, Philosophie Magazine, L’Écho des savanes, Fluide glacial, Charlie Hebdo, le Nouvel Observateur, Marianne, Les Échos, La Dépêche du Midi… En 2005, dans Il faut tuer José Bové, sa première bande dessinée, il raille les travers des altermondialistes. Son deuxième album, La Croisade s’amuse, paru l’année suivante, aborde le choc des civilisations à travers le journal intime de madame Ben Laden et les frasques de George W. Bush. Son grand succès reste Silex and the City. En 2016, il devient le nouveau scénariste de la série Lucky Luke. Il signe également le scénario de Spirou chez les fous.

Le dessinateur Nicolas Kéramidas est né à Paris en 1972. Après un bac A3 de dessin puis l’école des Gobelins, il est embauché aux studios Walt Disney Animation France. Pendant 9 ans, il travaille sur des longs-métrages. Fin 2000, avec Didier Crisse, il crée la bande-dessinée Luuna, sur les aventures d’une jeune amérindienne. Avec le scénariste Lewis Trondheim, en 2016 et 2018, il sort les albums Mickey’s craziest adventures et Donald’s happiest adventures. Nicolas Kéramidas a également raconté en 2021 ses deux opérations cardiaques, dans l’album « À Cœur ouvert ». Son style graphique respecte scrupuleusement ceux de Carl Barks et Don Rosa.
Picsou et les bit-coincoins, 48 pages, 11,50 euros, Glénat Disney.
Kristol Séhec.


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