Une nouvelle analyse génétique menée par le Natural History Museum de Londres vient de clore près de dix ans de polémique autour de la « Beachy Head Woman », ce squelette romain découvert dans les années 1950 et présenté en 2016 comme la « première Britannique noire ». Contrairement à l’interprétation largement diffusée dans les médias publics britanniques, et notamment dans une série documentaire de la BBC, les données scientifiques démontrent aujourd’hui que cette femme n’était pas originaire d’Afrique subsaharienne, mais de l’Angleterre du Sud, avec des traits européens : peau claire, yeux clairs et cheveux blonds.
Une thèse médiatique devenue certitude… avant d’être infirmée
En 2016, le programme Black and British: A Forgotten History, diffusé par la BBC, affirmait que cette jeune femme romaine, exhumée près de Beachy Head dans le Sussex, aurait été d’origine africaine. Un panneau commémoratif avait même été installé en son honneur, la présentant comme un symbole d’une présence noire ancienne sur le sol britannique.
Or, les premières réserves scientifiques n’ont pas tardé. Dès 2017, une étude initiale concluait qu’elle était probablement issue du bassin méditerranéen, et non d’Afrique. En conséquence, la plaque fut retirée en 2022.
La dernière analyse, beaucoup plus précise grâce à des techniques génétiques modernes, va encore plus loin : la femme était bel et bien issue des populations locales de la Bretagne romaine, et non d’une migration extérieure.
Les résultats : origine britannique et traits européens
Selon le Dr William Marsh, chercheur au Natural History Museum, l’étude ADN permet désormais d’affirmer que son profil génétique correspond à celui des populations britanniques de l’époque romaine.
La description scientifique évoque :
- une jeune femme de 18 à 25 ans,
- mesurant environ 1,50 m,
- aux yeux clairs,
- aux cheveux blonds,
- et à la peau claire.
Les datations situent son décès entre 129 et 311 après Jésus-Christ. L’analyse isotopique de ses os laisse supposer un régime riche en produits marins, typique du littoral sud de l’Angleterre.
Si l’erreur scientifique en soi est compréhensible — les méthodes d’analyse ont considérablement évolué ces dix dernières années — l’emballement médiatique qui l’a entourée pose question.
La BBC avait présenté le cas comme une preuve de l’implantation ancienne de populations africaines en Grande-Bretagne, dans un contexte de débats contemporains sur l’immigration, la diversité et la mémoire collective.
La rectification scientifique renvoie dès lors à un problème plus large : l’instrumentalisation possible de vestiges archéologiques pour soutenir un récit idéologique contemporain, avant même que les données ne soient consolidées.
L’importance de la rigueur scientifique
Pour les chercheurs du Natural History Museum, cette mise à jour n’est pas un scandale mais une illustration normale de l’évolution de la recherche.
Cependant, pour l’observateur attentif, elle montre aussi combien certaines institutions médiatiques ont pu s’emparer d’hypothèses encore fragiles pour construire des messages sociopolitiques forts. Et combien, à l’inverse, les corrections scientifiques reçoivent moins de publicité que les annonces initiales.
Le cas de la « Beachy Head Woman » rappelle qu’il existe une différence fondamentale entre recherche historique et narration militante, entre hypothèse prudente et affirmation médiatique.
Il souligne aussi un enjeu : la tentation contemporaine de réécrire le passé pour servir le présent. Dans ce dossier comme dans d’autres — on se souvient des débats autour de Cheddar Man ou de Stonehenge — les archéologues insistent désormais sur la nécessité de prudence et de contextualisation, loin des récupérations idéologiques.
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