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La guerre et les troubles en Irlande du Nord dans la littérature. Notre sélection littéraire de la semaine

Aujourd’hui, nous vous présentons une sélection littéraire thématique, sur la guerre et les troubles en Irlande du Nord dans la littérature (des livres écrits ou traduits en français, of course, bien que la littérature anglaise regorge également de pépites). Nous n’allons pas vous présenter des ouvrages politiques, mais bien des ouvrages littéraires ou des romans. Ainsi, nous allons vous présenter des livres (sélection non exhaustive) écrits par Sorj Chalandon, Sam Millar (que nous avons interviewé ici), Adrian McKinty ou encore Stuart Neville.

Voir aussi la bibliographie en français sur les Troubles en Irlande du Nord

Prenez votre plaid 100 % Irish wool, votre Irish coffee, mettez un peu de tourbe dans votre poêle si vous avez la chance d’en avoir dégotté là-bas, en Irlande, et régalez-vous à la lecture de ces histoires, poignantes, attachantes, dramatiques, ces ballades irlandaises dont on ne sort pas indemne.

Mon traître

De Sorj Chalandon

« Il trahissait depuis près de vingt ans. L’Irlande qu’il aimait tant, sa lutte, ses parents, ses enfants, ses camarades, ses amis, moi. Il nous avait trahis. Chaque matin. Chaque soir… ». Le livre nous plonge au cœur des Troubles en Irlande du Nord, à Belfast. Un Parisien, initié à la lutte irlandaise par un Breton, se retrouve à Belfast, dont il tombe (comme tous ceux qui y mettent les pieds et qui cherchent à comprendre cette ville et son histoire) éperdument amoureux. Il se retrouve alors au cœur de la guerre civile, malgré lui d’une certaine façon, dans le camp des Républicains, au plus près de certains membres de l’IRA avec qui il lie une amitié indéfectible. Mon traître, c’est à la fois cette histoire, mais aussi celle d’une trahison, de la trahison d’un officier historique de l’IRA qui, du jour au lendemain, s’est vendu aux Anglais, a trahi. Le livre est poignant, inspiré de faits réels, écrit par Sorj Chalandon qui est un grand écrivain, c’est incontestable.

Sorj Chalandon est un écrivain et journaliste français. Après avoir travaillé trente-quatre ans à Libération, il est aujourd’hui membre de la rédaction du Canard enchaîné. Ses reportages sur l’Irlande du Nord et le procès Klaus Barbie lui ont valu le prix Albert-Londres en 1988. Il est notamment l’auteur du Petit Bonzi, d’Une promesse (prix Médicis 2006), de Mon traître, de La légende de nos pères, de Retour à Killybegs (Grand prix du Roman de l’Académie française 2011) et du Quatrième Mur (prix Goncourt des lycéens 2013 et Prix des lecteurs du Livre de Poche 2015).

Retour à Killybegs

De Sorj Chalandon

« Maintenant que tout est découvert, ils vont parler à ma place. L’IRA, les Britanniques, ma famille, mes proches, des journalistes […]. Certains oseront vous expliquer pourquoi et comment j’en suis venu à trahir. Des livres seront peut-être écrits sur moi […]. Ne vous fiez pas à mes ennemis, encore moins à mes amis. Détournez-vous de ceux qui diront m’avoir connu. Personne n’a jamais été dans mon ventre, personne. Si je parle aujourd’hui, c’est parce que je suis le seul à pouvoir dire la vérité. Parce qu’après moi, j’espère le silence. » Killybegs, le 24 décembre 2006, Tyrone Meehan.

Il s’agit en réalité non pas de la suite, mais d’un autre point de vue sur le livre Mon traître. Le point de vue du traître justement, de Tyrone Meehan, qui raconte son parcours, son histoire, son lien avec sa terre d’Irlande et sa cause nationaliste, mais aussi sa rencontre avec ce luthier français venu de Paris en plein cœur d’une guerre qui n’est pas la sienne. Encore une fois, le livre est tout aussi exceptionnel que Mon traître. À la différence près qu’il a remporté le prix du Roman de l’Académie française, que l’autre aurait mérité tout autant. Si vous aimez l’Irlande, et la lutte de libération des Irlandais, il faut lire ce livre. Si vous ne connaissez pas bien l’histoire récente de nos cousins celtes, il faut le lire également. Il ne vous restera plus qu’à prendre un billet direction Belfast ensuite !

Les fantômes de Belfast

De Stuart Neville

Les accords de 1998 ont mis un terme à des années de guerre sanglante en Irlande du Nord. Mais depuis qu’il est sorti de prison, Gerry Fegan, ex-tueur de l’IRA dépressif dépressif et alcoolique, est hanté par les fantômes des douze personnes qu’il a assassinées. Il ne connaîtra le repos qu’après avoir exécuté les commanditaires des meurtres, qui sont parfois devenus des politiciens « respectables ». Une chasse à l’homme s’engage.

Publié en anglais sous le titre The Twelve, les fantômes de Belfast est un thriller passionnant, qui se lit d’une traite, et qui nous plonge à nouveau au cœur de la guerre civile irlandaise et de ses conséquences, notamment psychiques, sur la population et sur ceux qui ont combattu. Un style d’écriture bien particulier, qu’on apprécie (ou pas), mais un thriller qui tient en haleine de bout en bout et qui permet de se familiariser, un peu, avec ce qu’il s’est passé, à Belfast, dans ces années sanglantes.

Une terre si froide

De Adrian McKinty

1981, Irlande du Nord. Bobby Sands vient de mourir. Le pays est sous haute tension, Belfast à feu et à sang. À Carrickfergus, deux homosexuels sont tués, main gauche arrachée. La piste d’un serial killer semble évidente. Mais le sergent Sean Duffy sait que les apparences sont souvent trompeuses, lui qui incarne un paradoxe en Ulster : il est flic et catholique. McKinty réussit le pari de faire vivre la violence de la guerre civile en même temps qu’il nous entraîne au cœur d’une enquête palpitante, maniée avec l’humour noir si cher aux Irlandais.

Ce qui fait l’excellence et le charme de certains auteurs irlandais, c’est que malgré le drame de ces années terribles, ils parviennent à garder le sens de la dérision, de l’humour, tout en maniant l’ironie, avec une certaine forme de fatalisme. Tout y est dans ce thriller, sombre, mais qui contient des personnages qui, pour certains, respirent la chaleur des cœurs irlandais. Un polar très bien ficelé, que nous ne pouvons à nouveau que vous conseiller.

Ce livre marque par ailleurs une série qui se poursuivra avec Dans la rue j’entends les sirènes, où l’on retrouve l’inspecteur Duffy (puis trois autres romans toujours pas traduits en français).

Adrian McKinty est né à Carrickfergus, Irlande du Nord. Après avoir étudié la philosophie à l’université d’Oxford, il a émigré aux États-Unis puis en Australie.

Les chiens de Belfast

De Sam Millar

En 1978, à Belfast, une femme est violée puis tuée par des inconnus, son cadavre laissé en pâtures aux chiens errants. Nul n’a payé pour ce crime horrible. Mais vingt ans plus tard, une mystérieuse blonde sème les cadavres un peu partout en ville… Pour Karl Kane, détective privé qui enquête sur l’une des victimes, il vaudrait mieux ne pas barrer la route à ce qui a tout l’air d’une vengeance en règle.

Né à Belfast en 1958, Sam Millar est un ancien combattant de l’IRA. Devenu écrivain, il a été lauréat du Brian Moore Short Award en 1998. Poussière tu serasRouge est le sang et On the Brinks sont disponibles en Points. Son livre Les Chiens de Belfast, dans lequel on découvre pour la première (et pas la dernière) l’inspecteur Kane, nous plonge dans un Belfast sordide, en pleine guerre civile en Irlande du Nord. On sent que l’auteur a écumé le bitume, les pubs de Belfast. Il nous offre un polar sombre, noir, violent, sanglant, saccadé, avec de nombreuses références historiques pour qui connaît un peu l’histoire des Troubles en Irlande du Nord.

Un grand polar, par un grand écrivain.

Le Cannibale de Crumlin Road

De Sam Millar

Cet été-là, la vague de chaleur accablant Belfast n’est pas ce qui perturbe le plus Karl Kane. Le privé est confronté aux meurtres atroces de jeunes femmes marginalisées, retrouvées mutilées, sans foie ni reins. Mais le principal suspect est un membre de l’establishment… et l’enquête piétine. Lorsque Katie, la fille de Kane disparaît, celui-ci ne peut compter que sur sa fureur pour empêcher l’irréparable.

On replonge toujours avec le même auteur, toujours avec le même détective, Karl Kane, toujours dans une histoire aussi sordide que sanglante et sombre. C’est efficace, c’est toujours du grand Sam Millar (et ça se poursuit encore après avec Un sale hiver et Au Scalpel).

Crédit photos : DR
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