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Philippe Wagner : « Pour s’assurer que l’on bénéficie de la garantie perte d’exploitation, il est important de bien auditer son contrat » [Interview]

Pour faire face à la crise économique actuelle, de nombreux dirigeants de TPE/PME se tournent vers leur assurance pour demander une réparation financière pour compenser leur perte de chiffre d’affaires. La « garantie de perte d’exploitation » est aujourd’hui au cœur des débats.

D’un côté des chefs d’entreprises payant, parfois depuis des dizaines d’années, une police d’assurance couvrant nommément ce risque et qui réclament leur indemnisation et, de l’autre, les assureurs qui arguent que cette garantie ne s’applique pas dans la crise actuelle.

Qui a raison ? Premier élément de réponse, le gendarme des assurances (ACPR) affirme que seules 7% des entreprises pourraient être couvertes contre ces pertes financières. Pourquoi ?

Dans son « état des lieux » publié le 23 juin, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) indique que 93% des chefs d’entreprises n’ont aucune chance d’obtenir une compensation dans la mesure où la garantie de perte d’exploitation est conditionnée à des dommages matériels (ce qui n’est pas le cas de la pandémie). Pour les 7% restants, moins de 3% des 1 135 000 assurés peuvent prétendre à une indemnisation. S’ajoutent à cela 4% d’assurés, soit plus de 45 000 entreprises en valeur absolue, pour qui l’incertitude règne, avec des configurations ne permettant pas de conclure à une absence de garantie.

Nous avons interrogé Philippe Wagner, de Captain contrat, pour mieux comprendre les mécanismes liés à l’assurance et à la perte d’exploitation.

Breizh-info.com : Comment savoir si l’on est couvert par notre contrat d’assurance via la garantie de pertes d’exploitations ?

Philippe Wagner (Captain Contrat) : Les contrats d’assurance ne couvrent pas systématiquement la perte d’exploitation, il ne s’agit pas d’un contrat obligatoire. C’est la raison pour laquelle, il est indispensable de bien auditer son contrat d’assurance afin de s’en assurer. L’assurance perte d’exploitation a pour objectif de compenser la perte de chiffre d’affaires. Elle permet à l’entreprise qui y souscrit de compenser les effets d’une forte baisse d’activité (voire de l’arrêt total d’activité) consécutive à un sinistre grave. Dans la majorité des cas, l’assurance perte d’exploitation ne se déclenche qu’à la suite de dommages matériels listés dans le contrat : incendie, dégât des eaux, attentats, etc. Or, et c’est bien la particularité de la crise actuelle du Covid-19, aucun dommage matériel en résulte.

Pour s’assurer que l’on bénéficie de la garantie perte d’exploitation, il est important de bien auditer son contrat pour voir dans en premier temps s’il contient cette garantie perte d’exploitation, et dans le cas de la pandémie de Covid-19, il faut examiner les termes pour vérifier que cette garantie n’est pas conditionnée par la survenance d’un dommage matériel (bien que rares, certains contrats prévoient  tout de même l’indemnisation des sinistres sans dommage matériels, comme les fermetures administratives).

En outre, certaines compagnies d’assurance excluent parfois les épidémies de l’assurance perte d’exploitation. Concrètement, elles insèrent une clause d’exclusion dans laquelle elles spécifient que les épidémies et pandémies sont exclues de l’indemnisation pour perte d’exploitation. Il est dans ce cas recommandé de vérifier la validité d’une telle clause : celle-ci doit être formelle, limitée et apparente ; à défaut elle sera contestable.

Breizh-info.com : Y a-t-il des différences de traitement entre les fermetures contraintes par l’Etat et les fermetures dues à un manque d’activité ?

Philippe Wagner (Captain Contrat) : Si l’entreprise était visée par l’arrêté de fermeture administrative du 15 mars 2020, il suffit de l’invoquer auprès de son assurance.

A noter, certaines assurances proposent une garantie perte d’exploitation dans le cas de fermeture imposée par une autorité administrative pour des raisons d’hygiène et sécurité (ce qui est particulièrement le cas pour les bars et restaurants). La particularité de cette garantie est que son application n’est pas soumise à la présence d’un dégât matériel. L’obstacle du dommage matériel préalable est donc levé, et il sera plus aisé de solliciter la mise en œuvre de la garantie. Encore faut-il que la garantie n’exclue pas le risque de pandémie.

Breizh-info.com : Quels dispositifs d’aide pour les entreprises en difficulté ?

Philippe Wagner (Captain Contrat) : Pour les entreprises qui ne peuvent pas bénéficier de cette garantie, plusieurs dispositifs existent pour les aider financièrement : fonds de solidarité, prêt de trésorerie garanti par l’État, report de paiement des factures, remise d’impôts, etc. Vous pouvez retrouver les principales mesures du Gouvernement ici : https://www.economie.gouv.fr/covid19-soutien-entreprises/les-mesures

Il existe également des aides locales (déblocage d’aides exceptionnelles, soutien financier à la vente en ligne de produits locaux, etc.) : renseignez-vous auprès de votre département, région, intercommunalité…

Le gouvernement planche par ailleurs sur un plan d’aides aux indépendants : il envisage de créer des foncières pour racheter des locaux commerciaux et les mettre à disposition à des loyers attractifs.

Breizh-info.com : Quels sont les pièges à éviter avant de signer son contrat d’assurance ?

Philippe Wagner (Captain Contrat) : Il faut prendre le temps de bien lire le contenu du contrat, les clauses, les termes employés, et ne pas hésiter à se faire accompagner par un professionnel le cas échéant. Il faut faire attention au type d’indemnisation (forfaitaire ou indemnitaire) mais aussi à l’étendue du contrat d’assurance : vérifier les clauses du contrat (notamment les garanties optionnelles), vérifier la présente ou non d’une garantie d’exclusion (et sa validité et ses conditions d’exclusion) et vérifier également les niveaux de prise en charge. En effet, il incombe au dirigeant, en fonction de son secteur d’activité, de la taille de son entreprise et des risques auxquels il fait face, de déterminer le niveau de garantie de perte d’exploitation. Un audit préalable accompagné d’un expert peut être recommandé.

Illustration : DR
[cc] Breizh-info.com, 2020, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine

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