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Les éditions Yoran Embanner publient les colonisés de l’Hexagone pendant la Grande guerre 1914-1918 [Interview de l’éditeur]

Les éditions Yoran Embanner publient les colonisés de l’Hexagone pendant la Grande guerre 1914-1918 signé Joan-Pere Pujol .

Joan-Pere Pujol été un des fondateurs du catalanisme en Catalogne du Nord.

En 1970, il a créé avec Miquel Mayol et d’autres militants, le Comitat Rossellonès d’Estudis i d’Animacio (CREA) qui s’est transformé par la suite en l’Esquerra Catalana dels Treballadors (ECT), l’un des premiers partis politiques catalans dans la région. En 2000, il a constitué le cercle Alfons Mias qu’il préside depuis cette époque.

Le livre évoque la tragédie de 1914-1918 sous l’angle des peuples autochtones sacrifiés notamment par la France.

Si la plupart des territoires périphériques n’ont pas été directement touchés par les affrontements armés, de nombreux Bretons, Corses, Occitans, Savoyards… ont été sacrifiés pour reconquérir l’Alsace et la Moselle, une terre qui n’était pas la leur au bénéfice d’un État qui continue à les mépriser, ne leur reconnaissant même pas leur qualité de « peuple », ce qui implique qu’ils n’ont aucuns droits !

Ce livre revient sur leur histoire, pour remédier à l’oubli dont ils sont encore trop souvent victimes. Plus d’un siècle après sa conclusion, la Grande Guerre continue de marquer les esprits. L’ensemble des territoires de l’Hexagone et de l’Empire colonial n’a pas été épargné par la mort de combattants.

Pour évoquer cet ouvrage passionnant, nous avons interrogé Yoran Delcourt, qui bien qu’ayant transmis le flambeau des éditions Yoran Embanner, n’est pas décidé à être mis totalement en retraite :)

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Breizh-info.com : Comment vous est venue l’idée d’éditer ce livre ?

Yoran Delcourt : En fait, c’est l’auteur Joan-Pere Pujol qui m’a contacté. De prime abord, je n’étais pas favorable, considérant que les 2 guerres mondiales (et celles de la Révolution et de l’Empire), sont une honte pour l’humanité et puis, on a tellement édité sur ces périodes-là … Quand j’ai commencé à lire le manuscrit, effectivement, j’ai vu que ce livre rentrait tout à fait dans ma ligne éditoriale. J-P Pujol et moi, sommes des nationalistes, ça crée des liens d’emblée ! Et, ayant la chance d’avoir des auteurs-historiens, chacun d’eux (sauf au Pays basque) a  contribué à apporter des précisions sur leur pays respectif.

Breizh-info.com : Pouvez-vous nous expliquer comment les minorités nationales ont été mobilisées et intégrées dans l’effort de guerre durant la Première Guerre mondiale ?

Yoran Delcourt : Il faut bien comprendre que la France préparait sa guerre de revanche -après sa défaite de 1870- de longue date. Les affiches de Mobilisation Générale ont été imprimées dès 1904, il a juste suffi d’ajouter à la main la date : 2 août 1914. Dès 1881 les écoliers et les lycéens étaient soumis à une préparation militaire, les fameux « bataillons scolaires ». Ce n’est pas tout, selon le principe Tout Français est un soldat et se doit à la défense de la Patrie (loi Jourdan, 05/09/1798), ils ont été soumis à un véritable conditionnement patriotique, haineux et belliciste (lecture, chants etc.). La presse, majoritairement soumise à l’Etat, participait avec zèle, à cette propagande outrancière. En ce qui concerne les minorités nationales, la guerre a été un coup d’arrêt pour leurs langues, les rescapés en 1918 étaient devenus parfaitement francophones, le vieux rêve de l’Etat centralisateur d’uniformiser « par le fer et le sang » était devenu une réalité.

Breizh-info.com : Quelles différences principales avez-vous observées entre les expériences des différentes minorités ?

Yoran Delcourt : Il y a de fortes différences. Ce sont les Bretons et les Corses qui ont payé le prix fort, 22% des mobilisés tués, à comparer avec les Parisiens : 10% ! Les Flamands ont été soit occupés soit sur la ligne de front, leur pays a été dévasté.

Les Alsaciens-Mosellans étaient dans l’armée allemande. Seule la région de Thann a été conquise par les Français en 1914. Il y ont appliqué de suite le nettoyage ethnique qui s’est généralisé aux 3 départements de 1918 à 1922.

Les Savoisiens qui n’étaient légalement pas concernés selon les accords de 1860, furent mobilisés comme tout le reste.

Les Occitans : Paris ne les considérait pas comme fiables, souvenir des 600 soldats du 17e RI qui s’étaient mutinés et qui avaient rejoint les insurgés lors de la révolte viticole de 1907. Ajoutons à celà qu’en août 1914, les soldats du XVe corps, lancés dans une attaque suicide en Lorraine, avaient reculé face à l’ennemi.

Nombreux sont les Basques et les Catalans ont tenté de s’enfuir en masse d’un conflit qui ne les concernait pas. L’Espagne étant un pays neutre, en passant de l’autre côté, ils étaient accueillis par leurs « frères ».

Breizh-info.com : Selon vous, comment la participation des peuples colonisés a-t-elle influencé les mouvements indépendantistes ultérieurs ?

Yoran Delcourt : Pour les Bretons, c’est clair, en 1919, une délégation de l’Union Régionaliste Bretonne fut reçue, comme d’autres nationalités à la Conférence de la Paix à Paris, plaidant pour les droits nationaux de leur pays, Elle ne reçut jamais de réponse. Conséquence, la création de Breiz atao, nationaliste et indépendantiste.

Avec des variantes, le nationalisme corse est né lui aussi à la suite du conflit.

En Flandre, le nationalisme flamand est né dans les tranchées mais il ne concerne que la partie belge, La Flandre française était tellement dévastée, que la priorité fut de reconstruire.

En Alsace-Moselle, annexée de facto, sans plébiscite, c’est la politique d’assimilation forcée et brutale (débochisation) qui a suscité l’autonomisme alsacien-mosellan. Cas unique dans l’Histoire de France, aux élections de 1928, les Alsaciens envoient 11 (sur 16) députés autonomistes à l’Assemblée Nationale.

Breizh-info.com : Quels enseignements actuels pouvons-nous tirer de cette période historique ?

Yoran Delcourt : L’enseignement principal, c’est que la France avait atteint, avant la Grande Guerre, son point de rayonnement et de puissance maximum et qu’elle s’est suicidée bêtement sans même s’en rendre compte. Il serait temps aussi de mettre fin au « roman national » et de rétablir la vérité historique car c’est bien la France et la Russie (et non l’Allemagne) qui ont déclenché cette guerre, ceci est très bien expliqué, preuves à l’appui, dans le livre.

Propos recueillis par YV

Crédit photo : DR
[cc] Breizh-info.com, 2024, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine

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5 réponses à “Les éditions Yoran Embanner publient les colonisés de l’Hexagone pendant la Grande guerre 1914-1918 [Interview de l’éditeur]”

  1. Per Manac'h dit :

    Un très bon livre….

  2. Prétet Yvette dit :

    Les paysans de Bourgogne ont aussi payé un lourd tribut à cette guerre puisque ma belle-mère(native de Bourgogne) a eu ses 2 frères tués pendant la guerre de 1914-1918,sa famille comprenait 3 personnes:2 garçons et une fille! Quant à ma famille: mon père et 2 oncles (nés en Algérie)ont été appelés pour combattre les Allemands( en France) ou les ennemis de la France (aux Dardanelles) pendant la  »guerre de 1914-1918)…mon père a failli mourir aux Dardanelles!..

  3. nicole dit :

    Mon grand-père, né à Sidi-Bel-Abbès, d’une famille originaire de Franche-Comté, a été grièvement blessé en 1916 en Picardie..

  4. Raymond Neveu dit :

    Je viens de survoler très vite mais je souscris pleinement et je reviendrai plus tard oui j’ai entendu mon père dire que l’on avait fait descendre des régiments du Nord et de l’Ouest pour écraser la révolte viticole et comme toujours parce qu l’on me la répété il appartient aux officiers de tenir leurs hommes pour éviter les dérapages!

  5. Gautier dit :

    En ce qui concerne les Bretons, n’oublions pas Jean-Pierre Calloch, barde breton, né à Groix, et son poème « je suis le grand veilleur, debout sur la tranchée… ». Il est mort pour la France éternelle et non en colonisé victime de la « colonisation ». Mon grand père, dont la famille originaire de Saint-Servan et installée à Saint Pierre et Miquelon, était rentrée à Nantes juste avant la guerre, avait devancé l’appel à 18 ans après avoir eu deux frères tombés au champ d’honneur. Nous n’étions pas des « colonisés.

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