Edwy Plenel. Le « Breton d’outre-mer » a su trouver l’argent

« En 2008, un ovni est apparu dans le paysage de la presse d’information, lancé à grand fracas par un talentueux trublion du journalisme : j’ai nommé Médiapart et Edwy Plenel. L’ambition de ce dernier était de produire un journal d’information indépendant détaché des influences partisanes, libre des puissances d’argent ; un journal vertueux, aligné sur les grands principes du droit et de la morale, pratiquant une déontologie intransigeante, et développant des méthodes d’enquête irréprochables. Quelques années  plus tard, force est de constater que les grands principes souffrent de certaines dispenses, que les méthodes sont parfois contestées et que l’impartialité n’est pas toujours de mise. » Ainsi commence « Pour qui roule Médiapart ? La face cachée d’Edwy Plenel », le récent  ouvrage de Gilles Gaetner (Fayard, mars 2025).

Aujourd’hui, Médiapart peut être qualifié de réussite journalistique, de réussite politique mais aussi de réussite financière. L’ambition de départ était de lancer un journal payant, sans publicité. Avec un credo : la transparence. Aujourd’hui, le nombre d’abonnés dépasse 220 000 et celui des salariés 150.

L’argent conditionne le démarrage. Une pareille opération exige des fonds qui sont indispensables  d’abord pour louer des bureaux, ensuite pour embaucher des journalistes qui soient de « vrais »  professionnels. Dans le cas de Médiapart, des gens qui, comme Plenel, viennent du Monde (François Bonnet, Laurent Mauduit, Gérard Desportes, tous anciens trotskistes) – des journalistes qui n’ont pas l’habitude d’être payés au smic. Tout démarre avec Marie-Hélène Smiejan, une femme d’affaires totalement étrangère au monde de la presse. Sa conviction : « Une fois que vous aurez trouvé votre premier million, tout sera plus facile. » Plenel emprunte 500 000 euros grâce à une hypothèque prise sur un appartement que possède son épouse.  Marie-Hélène Smiejan, enthousiaste, apporte la même somme.

Edwy Plenel a fait du fric

« D’autres investisseurs la rejoignent. Comme Thierry Wilhelm, président de la holding Doxa, acteur majeur du digital en Europe, et Xavier Niel, qui n’est pas encore patron de Free, et qui s’intéresse déjà à la presse écrite. Suivent bien sûr Michel Broué [ancien trotskiste], président des Amis de Médiapart, le sociologue Edgar Morin, avec lequel l’épouse de Plenel a travaillé, la styliste Agnès B, et l’avocat Jean-Pierre Mignard, conseil de François Hollande et du Qatar. Puis Maurice Lévy, le patron de Publicis, qui met 5 000 euros au pot, et Stéphane Fouks, patron de l’agence Havas. »  (« Pour qui roule Médiapart ? », page 207)). Il n’est pas exagéré d’écrire que des capitalistes ont financé la création et le lancement de Médiapart… On peut reprocher à Gilles Gaetner de n’avoir pas creusé cette question fondamentale : qui paie ? et combien ? Ce spécialiste des affaires politico-financières connaît pourtant la musique : d’où vient l’argent ? Car un journal n’est pas une entreprise ordinaire, c’est souvent en premier lieu une opération politique. Quels sont les objectifs des « actionnaires » et des bienfaiteurs des Amis de Médiapart  ? Quelquefois simplement s’amuser ou se faire plaisir. Quelquefois régler des comptes. Quelquefois s’acheter une « assurance tranquillité ». Quelquefois défendre une cause. Quelquefois aider un ami. Quelquefois on estime que ça permettra de faire passer des « messages »… Quelquefois on raisonne “utilitaire“ : ça peut servir…

L’heure de la retraite sonnant, Edwy Plenel a vendu sa participation dans Médiapart pour la modique somme de 2,6 millions d’euros. Une belle réussite pour cet ancien militant de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) dont il sera membre du comité central, chargé des pays arabes ; permanent, payé au smic, ce militant consciencieux fait ses premières armes journalistiques dans l’hebdomadaire de la LCR Rouge. Rappelons que ce « Breton d’outre-mer » a eu la peau de François de Rugy, alors ministre de la Transition écologique, pour une histoire de homards… En juillet 2019, Médiapart consacrera seize articles à cette affaire ; ce qui ressemble à de l’acharnement. Une certitude : si de Rugy avait eu l’astuce de figurer au nombre des actionnaires de Médiapart, il serait entré dans le club des “intouchables“.

Bernard Morvan

Crédit photo : Alain Stival
[cc] Breizh-info.com, 2025, dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine

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