8 mai 2025 : Les États-Unis, encore nos alliés ? Un sondage qui en dit long… surtout sur les biais de ceux qui le commanditent

À l’heure où la France commémore le 8 mai 1945, une enquête de l’Ifop pour NYC.eu suscite des remous : seuls 27 % des Français considèrent encore les États-Unis comme un pays allié. Mais derrière cette rupture apparente, se cache une réalité bien plus complexe que ne le laissent entendre les sondages – et une certaine mémoire falsifiée.

Une amnésie géopolitique ?

Il fut un temps – en mai 1945 précisément – où les Français, fraîchement sortis de l’occupation allemande, désignaient l’URSS comme la puissance ayant le plus contribué à la défaite du IIIe Reich (57 %), loin devant les États-Unis (20 %) et le Royaume-Uni (12 %). Huit décennies plus tard, la roue a tourné : les Américains se voient consacrés comme les héros exclusifs de la Libération dans les manuels, les films et les cérémonies. Mais la réalité historique n’est pas un scénario hollywoodien. Elle est d’abord celle de l’engagement tardif, puis de l’occupation durable.

27 % de Français voient aujourd’hui les USA comme un allié, 34 % comme neutre et 26 % comme ennemi. Un basculement ? Pas forcément.

Ce qui étonne, ce n’est pas tant la froideur nouvelle des Français à l’égard des États-Unis, que le fait qu’on s’en émeuve précisément sous l’ère Trump – alors même que cette présidence fut la moins interventionniste depuis des décennies. Aucune nouvelle guerre déclenchée, retrait partiel d’Afghanistan, réduction de la présence militaire en Europe, contestation du parapluie nucléaire. Que les médias qualifient ces gestes de « menaces », en dit long sur l’obsession d’un certain atlantisme.

Hollywood, Netflix, Disney : voilà le véritable vecteur de la puissance américaine. Les jeunes Français qui vénèrent les États-Unis ne le font ni pour Pearl Harbor ni pour le plan Marshall, mais pour les super-héros Marvel. Et c’est peut-être cela le plus inquiétant : non pas une annexion territoriale, mais une colonisation mentale – qui fait oublier que les États-Unis ont bombardé plus de pays que l’Allemagne nazie, qu’ils ont soutenu des dictatures, déstabilisé des continents entiers, et imposé par la force leur modèle économique.

L’étude Ifop mérite donc d’être retournée comme un gant.

Pourquoi diable ne posait-on pas les mêmes questions à propos de Roosevelt, Truman, Kennedy, Bush ou Obama, tous responsables de guerres et de coups d’État aux quatre coins du globe ? Pourquoi juger Trump – paradoxalement – comme l’agent d’un impérialisme qu’il a précisément ralenti ? Que penser d’un sondage qui demande si les Français seraient prêts à s’opposer militairement à une annexion américaine du Canada… une hypothèse grotesque, posée comme sérieuse ?

Défense européenne ou illusion souverainiste ?

Oui, 58 % des Français souhaitent une défense européenne totalement indépendante des USA. Une aspiration louable, mais qui ne peut faire oublier que les Européens n’ont ni l’unité militaire, ni la volonté politique pour assumer seuls leur destin. En revanche, ce chiffre révèle bien autre chose : une lassitude envers l’alignement automatique sur Washington, et une attente – encore floue – d’une autre voie.

L’ennemi ? Ce n’est pas Trump. C’est le mythe.

Le mythe d’une Amérique salvatrice, désintéressée, bienveillante. Le mythe d’un Occident uni par la morale, plutôt que par les intérêts. Le 8 mai 1945 fut une libération, certes, remplacée par une nouvelle annexion. Economique, géopolitique, mentale. La France n’a jamais été un 51e État. Et à force d’oublier qui nous sommes, nous risquons de perdre bien plus qu’une alliance : notre souveraineté.

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