Le 20 mai 2025, la Cour des comptes a publié un rapport fouillé sur l’enseignement primaire en France. Son constat est sans appel : malgré une hausse continue et significative des dépenses publiques (plus de 55 milliards d’euros en 2022, contre 46 milliards en 2013), les résultats ne suivent pas. Pire : l’école primaire française accuse un retard préoccupant en matière d’efficacité et d’équité. Décryptage.
Une dépense qui explose
Entre 2013 et 2022, les dépenses de l’État pour l’école primaire ont bondi de près de 20 %. La dépense moyenne par élève est passée de 6 470 € à 7 920 €. Cela place la France au 5e rang des pays de l’OCDE pour le coût unitaire de l’élève… mais loin derrière en ce qui concerne les résultats.
Car dans le même temps, le nombre d’élèves a diminué de 6,6 %, ce qui aurait dû mécaniquement améliorer les conditions d’enseignement. Pourtant, ni les résultats des élèves, ni les conditions de travail des enseignants, ni les inégalités territoriales ne se sont améliorés de manière significative.
Une efficacité pédagogique en berne
Malgré les réformes successives et une rhétorique ministérielle martelant la priorité au primaire, les résultats des élèves français sont médiocres. Selon les enquêtes internationales (PIRLS 2021, TIMSS), les élèves français restent à la traîne dans les compétences fondamentales : lecture, mathématiques, compréhension de texte.
Le rapport note une “efficacité faible” du système : les dépenses supplémentaires ne se traduisent pas par une amélioration mesurable de l’acquisition des savoirs de base. Le redoublement a chuté, non pas grâce à une meilleure réussite, mais en raison de consignes administratives. Le taux d’encadrement a légèrement augmenté, mais reste inférieur à la moyenne européenne.
Une équité territoriale en panne
Le rapport pointe également une forte inégalité territoriale dans la répartition des moyens. Le classement en “REP” ou “REP+” (éducation prioritaire) ne suffit pas à corriger les déséquilibres : certaines communes rurales ou périurbaines non classées restent défavorisées. Et à l’inverse, certaines zones urbaines favorisées bénéficient d’un encadrement très supérieur à la moyenne.
Pire : les élèves issus des milieux les plus modestes restent les plus exposés à l’échec scolaire, malgré les milliards injectés dans les dispositifs d’aide individualisée, de PPRE, de RASED ou de dédoublement de classes.
Une gouvernance défaillante
La Cour critique sévèrement la gouvernance de l’enseignement primaire, à la fois au niveau national et local. Le pilotage reste flou, les objectifs pédagogiques trop nombreux ou contradictoires, et les indicateurs de performance trop peu utilisés. Les directeurs d’école n’ont toujours aucun statut hiérarchique leur permettant de gérer efficacement les équipes pédagogiques. Quant aux collectivités locales (communes), elles doivent assumer une part importante des charges (bâtiments, équipements, restauration) sans disposer de marges de manœuvre financières suffisantes.
La gestion de la formation initiale et continue des enseignants est aussi dénoncée : inadéquation entre les contenus enseignés dans les INSPE et les réalités du terrain, manque de formation continue obligatoire et absence de suivi régulier des pratiques pédagogiques.
Des recommandations fortes
Face à ce constat accablant, la Cour des comptes émet une série de recommandations :
- Recentrer l’école primaire sur l’acquisition des fondamentaux ;
- Redéfinir les objectifs des cycles d’apprentissage ;
- Donner un véritable statut de chef d’établissement au directeur d’école ;
- Cibler les moyens sur les territoires réellement défavorisés plutôt que sur les zones administrativement labellisées ;
- Renforcer la formation continue obligatoire des enseignants ;
- Instaurer une évaluation rigoureuse des résultats à tous les niveaux (élèves, enseignants, établissements).
Ce rapport jette une lumière crue sur l’échec d’un système éducatif à bout de souffle. Il interpelle non seulement le ministère de l’Éducation nationale, mais aussi les élus locaux et les citoyens. À l’heure où les élèves français lisent de plus en plus mal, où les fondamentaux ne sont plus acquis en fin de primaire, et où l’idéologie pédagogique gauchiste prend souvent le pas sur le bon sens, il est temps de remettre l’école au service du bien commun, et de l’enfant, de nos enfants.
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Une réponse à “École primaire : 55 milliards d’euros pour quels résultats ? Le rapport accablant de la Cour des comptes”
Il serait intéressant et même utile que la même étude soit faite dans les écoles primaires hors contrats et aussi dans les écoles primaires privées sous contrats.