La tempête économique qui secoue le monde n’épargne pas la Bretagne. Selon l’édition 2025 de l’Observatoire du Commerce Indépendant publié par Ankorstore, les commerçants bretons affichent un moral en berne : près d’un sur deux juge sa situation « tendue » et un quart d’entre eux la qualifie de « vraiment difficile ». Malgré une fidélité manifeste des consommateurs locaux, l’inflation persistante, la baisse du pouvoir d’achat et les tensions internationales fragilisent le commerce de proximité, pourtant pilier de la vie économique et sociale des villes et villages bretons.
Pouvoir d’achat en recul, consommation en repli
Les Bretons ne se font guère d’illusions : 50 % d’entre eux estiment que leur pouvoir d’achat a reculé en 2025. Résultat, les habitudes de consommation évoluent : 84 % des habitants reconnaissent avoir modifié leur comportement d’achat, en consommant moins (52 %) ou en recherchant les prix les plus bas (32 %). Une tendance qui pèse lourdement sur les petits commerces, déjà confrontés à la hausse continue de leurs charges.
Malgré les contraintes économiques, les Bretons restent attachés à leurs commerces de proximité. 77 % les fréquentent régulièrement, et 59 % continueraient à les privilégier à prix égal. Mais l’équation se complique lorsque la grande distribution, voire le e-commerce, propose des tarifs plus avantageux. D’autant plus que 51 % des commerçants signalent une recrudescence des fermetures de boutiques en centre-ville, un phénomène en forte hausse par rapport à 2023.
Des commerçants en résistance, mais en alerte
Face à la hausse des coûts, 47 % des commerçants bretons ont été contraints d’augmenter leurs prix en 2024. Un quart prévoit de faire de même en 2025. Si certains parviennent à tirer leur épingle du jeu — 35 % déclarent un chiffre d’affaires supérieur à celui de l’année précédente — la majorité reste sous pression. La rentabilité diminue, la capacité d’investissement s’amenuise, et l’incertitude s’installe.
La conjoncture mondiale s’invite également dans les bilans. La guerre commerciale engagée par les États-Unis commence à produire ses effets : 41 % des commerçants bretons affirment en ressentir déjà les conséquences. En réaction, 59 % envisagent de privilégier les circuits d’approvisionnement européens, plus stables et plus proches.
Même logique côté consommateurs : 68 % des Bretons affirment vouloir acheter en priorité des produits français (44 %) ou européens (24 %), et rejettent de plus en plus les marques venues d’Asie ou d’Amérique.
Un appel au soutien politique et citoyen
Pour Nicolas d’Audiffret, PDG d’Ankorstore, ces chiffres sont un signal d’alarme : « Le commerce indépendant est au cœur de nos villes, de notre lien social, de notre économie. Il est temps que les décideurs prennent conscience de son rôle vital. » D’autant plus que 98 % des commerçants bretons estiment participer à la redynamisation des centres-villes. Mais ils attendent un soutien réel, et non des discours creux : 73 % réclament des mesures concrètes de la part des pouvoirs publics.
La Bretagne commerciale est à un tournant. Entre résilience et épuisement, les indépendants s’efforcent de maintenir le cap. Ils pourront encore le faire si, à la fidélité des consommateurs, s’ajoute une volonté politique forte de réinvestir dans le tissu économique local. Faute de quoi, les vitrines qui éclairent nos rues pourraient continuer à s’éteindre les unes après les autres.
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