À la veille de la publication des résultats du GCSE – l’équivalent britannique du baccalauréat –, la ministre de l’Éducation Bridget Phillipson a lancé un constat sévère : les enfants blancs de milieu ouvrier seraient les grands oubliés du système scolaire britannique.
Un constat accablant
Selon les données officielles, à peine 19 % des élèves blancs issus de familles modestes ont obtenu en 2024 une note jugée « solide » (équivalente à un bon niveau entre les anciennes notes C et B) en mathématiques et en anglais. Autrement dit, quatre enfants sur cinq sortent du système sans les compétences de base nécessaires pour s’insérer dans le monde du travail.
Pour Phillipson, cette situation constitue un double échec : « Ce n’est pas seulement l’avenir de ces enfants qui est brisé, c’est aussi la santé de notre société. Nous perdons des pans entiers de potentiel humain et de productivité », a-t-elle affirmé.
La faiblesse des résultats scolaires des jeunes Britanniques des classes populaires blanches alimente directement la crise de productivité qui frappe le pays depuis la crise financière de 2008. Alors que la productivité avait doublé au cours des 35 années précédentes, elle n’a progressé que de 5 % depuis.
Cette spirale se traduit par moins de jeunes qualifiés entrant sur le marché du travail, davantage de dépendance aux aides sociales et une perte estimée à 14 milliards de livres sterling pour l’économie, selon le think tank Centre for Social Justice.
L’absentéisme scolaire, facteur aggravant
L’un des principaux problèmes identifiés est le taux d’absentéisme chronique. Plus de 147 000 élèves ont manqué la moitié de leurs cours durant l’automne 2024, un record depuis le début du suivi statistique en 2016. Cet absentéisme massif est fortement corrélé à l’échec scolaire, en particulier chez les élèves de milieux défavorisés.
Beaucoup de jeunes contraints de repasser leurs examens en anglais et en mathématiques échouent à plusieurs reprises, piégés dans une « boucle d’échecs » qui les pousse parfois à abandonner leurs études.
Ce constat survient alors que le Labour, au pouvoir, peine à conserver son électorat dans les fiefs ouvriers traditionnels, où la montée de Nigel Farage et de son parti Reform UK inquiète. L’abandon ressenti des enfants blancs des classes populaires renforce la fracture entre les promesses politiques et la réalité vécue dans ces territoires.
Les pistes du gouvernement
Pour répondre à cette crise, le ministère de l’Éducation prépare un Livre blanc pour l’automne. Plusieurs mesures sont envisagées :
- publication plus détaillée des performances des élèves blancs dans les statistiques scolaires ;
- recours à l’intelligence artificielle pour identifier les établissements en difficulté ;
- relance des services de soutien aux familles via des Family Hubs (guichets sociaux de proximité) ;
- priorité donnée à l’éducation précoce, afin de réduire les inégalités dès les premières années de scolarité.
Phillipson insiste : « J’ai grandi dans ce milieu. Je sais ce que vivent ces enfants. Mon objectif est qu’ils fassent mieux. »
Si la ministre affiche sa détermination, le défi est immense. Les résultats attendus cette semaine devraient, une fois encore, masquer derrière des moyennes globalement correctes la réalité d’un système éducatif à deux vitesses. D’un côté, des élèves de bonnes écoles, promis à un avenir ouvert ; de l’autre, des dizaines de milliers de jeunes issus de milieux modestes, laissés sur le bord du chemin. Parce que blancs et donc non prioritaires sur la terre de leurs ancêtres.
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