Robert Redford s’est éteint le 16 septembre 2025, à 89 ans, chez lui, à Sundance, dans les montagnes de l’Utah – le lieu qu’il avait choisi, façonné, habité. « L’un des lions s’en est allé », a résumé Meryl Streep. L’hommage dit l’essentiel : une présence, une élégance, une aura qui ont traversé époques et genres, du western lumineux à la chronique politique, du drame intime au film d’aventure.
De « Sundance Kid » à acteur-monde
Né Charles Robert Redford Jr. le 18 août 1936 à Santa Monica, il débute à la télévision et sur Broadway avant de conquérir le grand écran. Butch Cassidy and the Sundance Kid (1969) fait de lui une star planétaire, tandem parfait avec Paul Newman. The Sting (1973) grave l’alchimie des deux complices dans le marbre, tandis que Jeremiah Johnson, The Candidate, The Way We Were, Three Days of the Condor ou All the President’s Men installent un acteur sûr, ironique, intensément moderne, capable d’alterner romantisme, engagement et thriller paranoïaque. Plus tard, Out of Africa (1985), Sneakers, Indecent Proposal, All Is Lost (performance muette, magistrale) ou son contre-emploi dans Captain America: The Winter Soldier rappelleront une palette insoupçonnée.
En 1980, Redford passe derrière la caméra avec Ordinary People (Des gens comme les autres) et rafle l’Oscar du meilleur réalisateur ainsi que celui du meilleur film. Il poursuivra avec A River Runs Through It, Quiz Show, The Horse Whisperer, The Legend of Bagger Vance… Un cinéma ample, classique dans la forme, scrutant l’Amérique par ses failles : la famille, la vérité, l’innocence perdue, la nature comme refuge et questionnement.
Sundance, le pari gagnant de l’indépendance
Son œuvre la plus durable n’est peut-être ni un rôle ni un film, mais un écosystème : Sundance. Station rachetée, Institut fondé (1981), Festival créé et imposé. Redford voulait un havre « hors de New York et Los Angeles », un endroit difficile d’accès, un peu « à part » – bref, un incubateur pour cinéastes indépendants. Des œuvres devenues phares y ont trouvé un tremplin, de Little Miss Sunshine à Get Out, de Manchester by the Sea à Precious. Par ce geste, il aura irrigué la création mondiale, offert une rampe à des auteurs qui, sans lui, seraient parfois restés à l’ombre.
Redford n’a jamais séparé art et civisme. Environnementaliste de longue date, soutien des peuples autochtones, défenseur des libertés, il utilise sa notoriété pour porter des combats, avec une constance rare à Hollywood. Distinctions à l’appui : Oscar d’honneur (2002), Kennedy Center Honors (2005), Presidential Medal of Freedom (2016), César d’honneur (2019), sans oublier le BAFTA, le SAG Life Achievement et le Cecil B. DeMille. Autant de jalons qui valident une influence au-delà des plateaux.
La nouvelle de sa mort a déclenché un concert de voix. Jane Fonda évoque un homme « beau en tout », Ron Howard salue un « gamechanger culturel », Leonardo DiCaprio parle d’un « héros » autant pour ses films que pour son écologie. Jamie Lee Curtis résume : « Vie, art, transmission, plaidoyer, héritage ». Même des responsables politiques, de bords différents, saluent « une icône américaine ». On ne rend pas si souvent hommage à la fois à la star, au cinéaste et au bâtisseur.
Une vie traversée de drames et de fidélités
Marié en premières noces à Lola Van Wagenen (quatre enfants, dont Scott, disparu à deux mois, et James, mort en 2020), Redford partageait depuis 2009 la vie de Sibylle Szaggars. Deux filles lui survivent, Shauna et Amy. Derrière le mythe, une biographie parfois cabossée, mais tenue, discrète, fidèle aux siens et à ses lieux.
Parce qu’il incarnait une virilité apaisée, sans cynisme ni pose. Parce que son sourire semblait ouvrir l’Amérique tout en la questionnant. Parce que ses films parlent d’honneur, de loyauté, de vraie liberté – celle qui se conquiert. Parce qu’avec Sundance, il a offert à des générations d’artistes le droit d’essayer autrement. Et parce que l’homme ne s’est jamais contenté d’être une affiche : il a transmis.
Filmographie repère (sélection non exhaustive)
- Acteur : Butch Cassidy and the Sundance Kid (1969), Jeremiah Johnson (1972) L’Arnaque (1973), Les hommes du président (1976), Brubaker (1980), Out of Africa (1985), et au milieu coule une rivière (1992), L’homme qui murmurait à l’oreille des chevaux (1998), Spy Game (2001) All Is Lost (2013), The Old Man & the Gun (2018).
- Réalisateur : Ordinary People (1980), A River Runs Through It (1992), Quiz Show (1994), The Horse Whisperer(1998).
On garde de Redford ce regard clair qui ne fanfaronne pas, ce jeu précis qui ne surligne rien, ce goût du risque qui n’écrase personne. À la fin de The Old Man & the Gun, il s’échappe presque en nous disant adieu. Cette fois, il s’en va pour de bon – mais il nous laisse des films, un festival, une idée simple et exigeante du cinéma : servir une histoire et transmettre un monde. C’est beaucoup. C’est rare. C’est lui.
Crédit photo : DR (photo d’illustration)
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