Événement fondateur de l’imaginaire européen, les croisades ont marqué près de deux siècles d’histoire, de l’appel du pape Urbain II à Clermont en 1095 jusqu’à la chute d’Acre en 1291. Souvent réduites aujourd’hui à des clichés manichéens, elles méritent d’être revisitées à la lumière des travaux historiques récents et des débats qu’elles continuent de susciter.
De Jérusalem à l’Europe : une expansion plurielle
À l’origine, les croisades furent conçues comme des expéditions armées vers la Terre sainte, destinées à reprendre Jérusalem et le tombeau du Christ aux musulmans. Mais très vite, le concept s’est élargi : croisades en Espagne contre les musulmans, en pays baltes contre les populations païennes, en Languedoc contre les cathares.
Elles mobilisèrent non seulement des princes et des chevaliers, mais aussi des foules de pèlerins, parfois composées de femmes et d’enfants. À travers ces « pèlerinages armés », se mêlaient ferveur religieuse, ambitions politiques et brutalités guerrières.
L’Occident médiéval s’est passionné pour ces expéditions. La première croisade, qui aboutit à la prise de Jérusalem en 1099, suscita une ferveur considérable. Mais très tôt, des voix critiques s’élevèrent : comment concilier l’enseignement des Évangiles avec la conquête armée ?
Un moine cistercien, Adam de Perseigne, écrivait dès le XIIIe siècle : « Le Christ n’a pas versé son sang pour acquérir Jérusalem, mais les âmes qu’il faut sauver ! » Ce doute, déjà présent au Moyen Âge, montre que les croisades furent loin d’être unanimement acceptées.
L’apport des historiens : démystifier les croisades
Dans leur ouvrage collectif Les Croisades. Histoires et idées reçues (Perrin, 2025), Martin Aurell et Sylvain Gouguenheim s’efforcent de déconstruire les clichés. Loin d’une lutte éternelle entre l’Occident chrétien et l’Islam, les croisades apparaissent comme des épisodes complexes, inscrits dans des contextes politiques et sociaux mouvants.
Le livre, comme l’a rappelé Sylvain Gouguenheim dans l’émission Passé-Présent sur TVL, insiste sur la multiplicité des regards : celui des croisés, celui des musulmans, celui des femmes qui accompagnèrent ces expéditions, ou encore celui des chrétiens qui contestèrent la légitimité de la guerre sainte.
Un mot galvaudé
Le terme même de « croisade » n’apparaît qu’après la prise de Jérusalem par Saladin en 1187. Aujourd’hui, il est fréquemment détourné à des fins idéologiques, servant tantôt à glorifier un combat, tantôt à stigmatiser une cause. Après le 11 septembre 2001, George W. Bush avait parlé de « croisade » contre le terrorisme, relançant l’idée d’un choc permanent des civilisations. Or, rappellent Aurell et Gouguenheim, les croisades doivent être replacées dans leur contexte médiéval, sans anachronisme.
Les croisades furent un temps d’héroïsme et de foi, mais aussi de violences et d’ambitions contradictoires. Elles façonnèrent durablement l’Europe, en nourrissant un imaginaire de chevalerie, de pèlerinage, et d’identité chrétienne partagée. Mais elles laissent aussi une mémoire conflictuelle, encore exploitée politiquement aujourd’hui.
L’intérêt renouvelé pour cette période, qu’illustre le documentaire de TVL comme l’ouvrage de Perrin, montre qu’il ne s’agit pas seulement d’un sujet d’érudition : les croisades interrogent toujours notre rapport à l’histoire, à l’identité et à la transmission.
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