À Saint-Malo, la goutte a débordé le 13 septembre. Devant la gare, un chauffeur de taxi, douze ans de métier, a été plaqué à la gorge et menacé de mort. Un collègue a reçu un coup à la pommette. La Brigade anticriminalité a mis fin aux violences, deux conducteurs de VTC ont été placés en garde à vue 48 heures. L’un d’eux sera jugé pour violences le 17 mars 2026. Quelques jours plus tard, on les revoyait déjà proposer des courses dans la ville. Pour les artisans malouins, c’est l’illustration d’un phénomène qui pourrit leur quotidien depuis des mois : des VTC venus de Rennes, de la région parisienne, parfois de bien plus loin, débarquent lors des pics de fréquentation et s’installent comme si tout leur était dû. Tout le monde le dit en privé, peu osent l’écrire : ces chauffeurs-là incarnent une nouvelle population qui arrive en Bretagne en terrain conquis, ignorant les règles locales et la profession réglementée qui fait vivre des familles.
Un engrenage de provocations et de coups
La soirée du 13 septembre avait pourtant commencé « dans les clous ». Avertie d’une Tesla affichée disponible sur plateforme sur un parking commercial, la police a contrôlé le conducteur et rappelé l’interdiction de maraude électronique pour les VTC. Fin de l’épisode. Quarante-cinq minutes plus tard, un autre VTC vient se garer sur l’emplacement taxis de la gare. « Il m’a sauté à la gorge, il a menacé ma famille », raconte la victime. Le premier conducteur réapparaît et frappe un taxi. Sans l’intervention rapide des policiers, disent les chauffeurs, « on serait allés au drame ». ITT, douleurs cervicales, choc psychologique : plusieurs artisans ont cessé de travailler le soir même et ont demandé un soutien psychologique.
Sur le fond, le grief est connu : les VTC sans ancrage local se positionnent sur les zones les plus rentables — événements, arrivées de trains, soirées sportives — en s’affichant disponibles sur les applis, ce que la loi leur interdit. L’été, les verbalisations se sont multipliées (une vingtaine selon la police). « Le 14 juillet, ils étaient plus de trente », soupire un taxi. Et non, le VTC n’est pas toujours moins cher : lors d’une soirée très fréquentée, un porte Saint-Vincent – gare s’est affiché à 60 € sur application, quand la même course en taxi plafonne autour de 10 €. Le mécanisme de tarification dynamique fait le reste : plus la demande explose, plus les prix s’envolent.
L’écart de règles nourrit l’exaspération. Licence à 165 000 €, crédit sur sept ans, maison en garantie pour les taxis, pas pour les VTC. L’été, période qui doit financer l’hiver, a été un coup de froid : –25 à –30 % de chiffre d’affaires selon plusieurs chauffeurs. Le sentiment d’injustice devient rage quand ils constatent que, pour un taxi, la sanction administrative tombe vite (suspension, retrait), tandis qu’un VTC pris en faute peut repartir travailler dès sa sortie de garde à vue.
Terrain conquis : l’irruption d’acteurs « opportunistes »
Avec les VTC locaux, les relations restent correctes. La tension vient de chauffeurs nomades (traduction : de chauffeurs pour beaucoup qui viennent des cités rennaises ou de banlieue parisienne), qui profitent des pics touristiques (Route du Rock, festivals, grands week-ends) et d’habitudes importées par une clientèle qui « ne jure que par l’app ».
Sous la pression, la Ville a pris un arrêté le 19 septembre 2025 : dans un large périmètre (Intra-Muros, Sillon, quais, esplanades, portes et artères autour de la gare), un VTC ne peut charger qu’avec réservation préalable. Les taxis demandent davantage : caméra à la gare, présence policière renforcée aux heures sensibles, meilleure signalétique des stations. Ils préviennent : sans action ferme, Quai des Bulles, le Festival du film britannique et, plus tard, la Route du Rhum tourneront au casse-tête sécuritaire.
Ce que dit la loi, ce que voit le terrain
Le cadre est clair : le VTC ne maraude pas, il exécute une commande. Le taxi, titulaire d’une autorisation de stationnement, peut charger à la volée dans sa zone. À Saint-Malo, ce partage tourne court dès que des VTC opportunistes se posent sur les stations ou balayent les rappels à la règle. Les forces de l’ordre verbalisent, mais la réitération des pratiques — et la violence franchie le 13 septembre — change la nature du problème. Un précédent a été franchi.
Les taxis ont stoppé le service le soir des faits, bloqué la mairie cet été, puis saisi le député. Ils assurent ne pas vouloir la guerre des métiers , mais la fin du Far West. L’immense majorité des clients n’adhère ni aux intimidations ni aux menaces. Beaucoup confient, à voix basse, ce que les artisans disent à visage découvert : une partie des chauffeurs incriminés n’a aucune intention de s’intégrer aux règles locales et se comporte en Bretagne comme en territoire conquis. C’est ce non-dit que la Cité corsaire affronte désormais, politiquement correct oblige.
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