La Chambre régionale des comptes (CRC) de Bretagne a rendu en juillet 2025 un rapport détaillé sur le Syndicat départemental d’énergie d’Ille-et-Vilaine (SDE 35). Si l’institution reconnaît la bonne santé financière du syndicat et sa contribution à la transition énergétique, elle pointe aussi des failles juridiques et des déséquilibres persistants dans certaines activités, notamment la production d’énergies renouvelables et la mobilité bas carbone.
Un acteur départemental solide et ambitieux
Créé en 1964, le SDE 35 est devenu l’autorité organisatrice unique de la distribution d’électricité dans le département. Il regroupe 332 communes (dont 43 via Rennes Métropole) et 12 intercommunalités sur 18. Avec 135 millions d’euros de budget annuel et 70 agents, il gère notamment la surveillance du réseau concédé à Enedis et l’éclairage public pour 218 communes.
Depuis une dizaine d’années, le syndicat a choisi de se diversifier : bornes de recharge électriques, distribution de gaz, rénovation énergétique, réseaux de chaleur, et ingénierie pour les plans climat territoriaux. Une mutation qui traduit sa volonté d’être un acteur moteur de la transition énergétique bretonne.
Mais, comme le rappelle la CRC, 80 % des dépenses restent concentrées sur les missions historiques : le réseau électrique et l’éclairage public. L’énergie renouvelable, pourtant présentée comme prioritaire, ne pèse encore que 1,9 % du budget.
Des ambitions vertes, mais un cadre juridique fragile
L’un des points les plus sensibles du rapport concerne la production d’énergies renouvelables, engagée sans base statutaire solide.
Le SDE 35 a en effet créé en 2018 la SEM Énerg’iV, dont il est actionnaire majoritaire, pour investir dans des installations solaires, éoliennes et de biogaz.
Or, selon la CRC, ces activités dépassent le champ de compétence des syndicats départementaux d’énergie tel que défini par le Code général des collectivités territoriales.
Autrement dit, le syndicat agit au-delà de son périmètre légal, et pourrait être fragilisé juridiquement en cas de contentieux.
La Chambre recommande donc de régulariser cette compétence dans les statuts afin de sécuriser les interventions et celles de sa filiale.
Autre dossier majeur : le réseau public de bornes de recharge “Béa”.
Lancé en 2014 pour amorcer la mobilité électrique, il compte aujourd’hui 128 bornes réparties sur tout le département. En 2022, un schéma directeur (SDIRVE) ambitieux prévoyait 2 200 nouvelles bornes d’ici 2030, mais le développement privé a profondément changé la donne.
La CRC constate que le SDE 35 a adapté sa stratégie, se plaçant désormais en coordinateur plutôt qu’en opérateur, tout en veillant à un maillage territorial équilibré.
Mais le service reste structurellement déficitaire : seules 21 bornes (soit 17 %) atteignent le seuil de rentabilité fixé à 874 charges par an.
Le coût moyen d’une charge atteint 12,10 €, dont près de la moitié financée par le SDE. En clair : les usagers paient 6,40 €, le reste est couvert par les deniers publics.
La Chambre alerte sur ce déséquilibre chronique, et exige la mise en place d’un budget annexe M4 dédié au réseau Béa, ainsi qu’un retour à l’équilibre ou, à défaut, une délibération motivée chaque année justifiant la subvention du déficit.
Des finances globalement saines
Sur le plan financier, le rapport se montre toutefois élogieux.
Le SDE 35 affiche des excédents de fonctionnement de 10 à 15 millions d’euros par an, sans recours à l’emprunt.
Sa trésorerie de 16,5 millions d’euros fin 2023 lui assure huit mois de marge d’investissement. Les subventions du FACE (Fonds d’amortissement des charges d’électrification) et l’autofinancement garantissent la stabilité du modèle.
Mais cette solidité ne doit pas masquer les zones grises : les participations dans la SEM Énerg’iV doivent être évaluées chaque année pour prévenir tout risque de dépréciation, rappelle la CRC.
Recommandations principales de la Chambre régionale des comptes
- Régulariser la compétence “production d’énergies renouvelables” dans les statuts du syndicat.
- Créer un budget annexe M4 dédié au réseau de recharge Béa.
- Assurer l’équilibre financier du service de mobilité électrique ou justifier formellement toute aide croisée.
- Évaluer chaque année la valeur réelle des participations dans la SEM Énerg’iV et provisionner les risques éventuels.
Le rapport de la CRC souligne une réalité contrastée : le SDE 35 reste un pilier de la transition énergétique bretonne, doté d’une santé financière solide, mais engagé dans une diversification parfois juridiquement fragile.
Pour continuer à jouer son rôle moteur dans la Bretagne de demain, le syndicat devra clarifier ses compétences, rationaliser ses dépenses et renforcer la transparence de sa gouvernance.
L’enjeu est clair : faire de la transition énergétique un modèle durable et légalement sécurisé, au service des communes et des habitants d’Ille-et-Vilaine.
Illustration : DR
[cc] Article relu et corrigé (orthographe, syntaxe) par ChatGPT.
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