Meurtre de Thomas à Crépol. Quand la presse refuse de nommer la guerre (civile) qui s’annonce

Je suis passé ce matin au bar de l’Océan, plus proche de la maison de la presse du Guilvinec que le bar des Brisants où je traîne d’ordinaire mes carnets. J’y ai feuilleté, devant un café trop clair, les deux articles du Figaro consacrés au meurtre de Thomas, l’un publié le 17 novembre par Rozenn Morgat sur le mobile raciste qui plane encore sur l’enquête, l’autre le 19 novembre du même auteur sur la loi du silence qui étouffe le dossier. Deux textes écrits avec soin, mais qui tournent autour du gouffre sans jamais oser y descendre.

En les lisant, je songeais à l’avenue Corrientes, à deux pas de l’endroit où je réside lorsque je retourne à Buenos Aires. On y apprend jeune que la violence des hommes ne naît pas du hasard. Elle vient d’un arrière pays immémorial, d’une poussière anthropologique qui voyage avec eux comme un parfum ancien. À Barracas, dans ces rues où jadis les immigrés italiens côtoyaient les Syriens que nous appelions Turcos par abus de langage, chacun savait que l’on se comporte selon sa lignée, selon le monde d’où l’on vient. L’Europe occidentale a oublié cela. D’autres peuples, non.

Dans l’affaire de Crépol, l’enquête patine car personne ne parle. Les quatorze suspects se taisent de concert, ils préfèrent affronter la perpétuité plutôt que trahir leur groupe. Le Figaro y voit seulement une culture de l’omerta propre aux cités. C’est un diagnostic trop doux. La vérité est plus profonde, et l’on s’étonne qu’un journal conservateur se refuse encore à l’affronter. Nous sommes devant un réflexe tribal intact, celui d’une population étrangère qui applique sur notre sol les règles de sa propre cohésion interne.

Depuis presque deux millénaires, le christianisme a arraché l’Europe à ce monde là. Il a brisé les vengeances de sang, dissous les clans, préparé la naissance de l’individu, cet être nu placé seul devant Dieu puis seul devant l’État. Ce fut notre grandeur. C’est devenu notre vulnérabilité. Le Figaro décrit des adolescents perdus, des familles dépassées, des défaillances sociales. Il refuse de voir que ce qui se déroule à Crépol relève moins de la délinquance que de la guerre tribale, une guerre qui n’a pas été désapprise par ceux qui viennent d’Afrique ou du monde musulman.

Je relis les citations rapportées par Rozenn Morgat, ces dialogues téléphoniques où les suspects redoutent la marque infamante du chouk, mot importé avec d’autres coutumes. Le journal y voit un lexique de petits voyous. Je vois, moi, le langage d’un monde où l’honneur du groupe prime tout, même la vie. En Europe, cet honneur là n’existe plus. Spengler l’avait entrevu dans ses pages sur le déclin, ce délitement des forces primitives qui donnaient autrefois leur colonne vertébrale aux peuples. Nous avons voulu remplacer ces forces par le droit. Il reste le droit, mais plus la force.

Le meurtre de Thomas n’est pas un accident né d’une nuit d’ivresse. Il est la pointe émergée d’un conflit de civilisations qui se joue désormais dans nos campagnes comme dans nos villes. Une jeunesse enracinée dans un pays ancien se heurte à une jeunesse issue d’un autre monde, structurée par une violence qui n’est pas seulement sociale mais anthropologique. Ce que les articles du Figaro effleurent sans jamais le dire, c’est que la France affronte sur son sol des peuples jeunes, encore porteurs d’une énergie brutale qui ne reconnaît ni nos lois, ni nos faiblesses, ni notre contrat social devenu verbe creux.

Je regardais par la fenêtre la mer qui montait entre les rochers, cette mer bretonne que je ne cesse de comparer au Rio de la Plata. Le réel, comme l’eau, suit toujours sa pente. Il ne se laisse jamais domestiquer par les mots. Le Figaro, en demeurant aveugle à la dimension ethno raciale et religieuse de cette affaire, continue d’écrire comme si la France de 2025 était encore la France de 1985. Le pays change, lui, comme changent les marées, sans demander leur avis aux chroniqueurs.

Lorsque la violence d’un peuple rencontre l’innocence d’un autre, c’est toujours le second qui paie le prix. La mort de Thomas en est le symbole silencieux. La presse peut encore le décrire comme une bavure nocturne. Je crains, quant à moi, qu’elle ne soit l’un des premiers actes d’une pièce plus vaste que personne n’ose nommer.

Balbino Katz

Chroniqueur des vents et des marées

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Crédit photo : DR
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