Macron et le contrôle de l’information : une société de surveillance et de contrôle à bas bruit..validée par les médias du système ?

Depuis plusieurs années, Emmanuel Macron multiplie les initiatives pour encadrer l’espace numérique au nom de la lutte contre la « désinformation » et des « ingérences étrangères ». Officiellement, il s’agit de protéger la démocratie. Mais le dispositif construit depuis 2018, couche après couche, ressemble de plus en plus à un système de surveillance et de contrôle diffus, largement validé par les grands médias et les institutions publiques, et perçu par une partie du paysage médiatique comme un risque direct pour le pluralisme.

Ces derniers jours, les déclarations du chef de l’État ont ravivé ces inquiétudes. À Arras, Emmanuel Macron a plaidé pour la création rapide d’un label professionnel permettant d’identifier les sites « dignes de confiance ». Une démarche présentée comme une garantie pour le public, mais qui pose une question simple : qui décidera de ce qui est fiable ?

Un empilement de lois qui élargit le pouvoir de l’État sur la parole en ligne

Le tournant date de 2018, avec la loi dite « fake news », qui permet de retirer en urgence des contenus jugés trompeurs en période électorale. En 2020, la loi Avia, finalement censurée, tentait d’imposer aux plateformes des délais de retrait particulièrement stricts, au risque d’encourager la sur-censure.

Depuis, le cadre s’est considérablement durci. La loi SREN, adoptée en 2024, offre à l’Arcom un pouvoir administratif direct sur les sites et les plateformes : blocages rapides, sanctions financières, retrait de contenus jugés problématiques. Le tout sans passer systématiquement par une décision judiciaire.
À Bruxelles, le Digital Services Act (DSA) complète le dispositif en imposant une surveillance accrue des algorithmes et en instaurant de nouvelles obligations de modération.

Pour les défenseurs des libertés numériques, cet arsenal risque de transformer les plateformes en acteurs zélés de la censure préventive, préférant retirer trop plutôt que pas assez pour éviter sanctions et enquêtes.

Viginum, observatoires, commissions : un appareil administratif en pleine montée en puissance

Dans l’ombre du débat public, plusieurs structures ont été créées pour surveiller l’espace informationnel.

Viginum, rattaché directement au Premier ministre, traque les opérations d’influence étrangères. Dans les faits, cette agence peut demander déréférencement ou retrait de contenu sans intervention préalable d’un juge.

La commission Bronner, puis les États généraux de l’information, ont contribué à installer l’idée que certaines voix seraient plus légitimes que d’autres. Au cœur du dispositif, une notion-clé : le label. Inspiré de la Journalism Trust Initiative de Reporters sans frontières, il reviendrait à certifier les médias considérés comme « conformes » aux standards professionnels — un mécanisme qui avantage naturellement les grands groupes installés.

Le 19 novembre à Arras, le président a franchi une étape supplémentaire.

Devant un public invité à débattre de « démocratie et réseaux sociaux », Emmanuel Macron a expliqué vouloir « tout faire » pour que la labellisation soit mise en place. Il refuse que l’État décide explicitement de la vérité, mais il appelle à une « certification » par des professionnels reconnus, traduction, par des médias du système, qui luttent au quotidien déjà contre la presse alternative aux côtés des associations « chiens de garde », dont la spécialité est de trainer tout dissident devant un tribunal.

Un raisonnement qui laisse en marge les médias alternatifs, régionaux ou indépendants — souvent accusés de complotisme ou de radicalité dès lors qu’ils ne s’inscrivent pas dans la ligne dominante. Le chef de l’État a également promis d’accélérer la montée en puissance de Viginum et de renforcer les systèmes de détection automatique d’« ingérences informationnelles ».

L’idée de couper ou restreindre les réseaux sociaux en cas de crise avait déjà été évoquée après les émeutes de 2023. En 2024, le blocage administratif de TikTok en Nouvelle-Calédonie a montré que l’exécutif pouvait agir très vite, parfois en marge du cadre juridique. Le Conseil d’État a d’ailleurs rappelé que ces mesures ne pouvaient être justifiées hors circonstances exceptionnelles.

Ces épisodes ont marqué les esprits : ils illustrent la tentation d’un pouvoir capable, à tout moment, de réduire le champ d’expression ou d’isoler certains espaces numériques jugés problématiques.

Un débat qui traverse tout l’échiquier politique

La critique est transversale.

La France insoumise parle de « dérive orwellienne ». Le Rassemblement national dénonce une « police de la pensée ». Des associations comme La Quadrature du Net évoquent une « censure généralisée ». Et même certains spécialistes proches du centre rappellent qu’un label peut rapidement se transformer en instrument de marginalisation.

Les médias indépendants, de droite comme de gauche, voient dans ces dispositifs la menace d’un tri algorithmique qui relèguerait les voix critiques au second plan.

À l’heure où le pouvoir prépare les municipales de 2026 et où la présidentielle de 2027 se profile, la question n’est plus seulement technique. Elle est politique : qui contrôle la circulation de l’information contrôle la formation de l’opinion.

La philosophie affichée — protéger la démocratie — peut se retourner en son contraire si le débat public se réduit aux seules voix validées par des « experts », des organismes labellisés ou des plateformes soucieuses d’éviter les sanctions.

L’enjeu dépasse le simple cadre numérique : il interroge la possibilité même d’un pluralisme réel dans un pays où l’État, les grandes institutions médiatiques et les plateformes tendent à converger vers un système de filtrage généralisé.

YV

Illustration : DR
[cc] Article relu et corrigé (orthographe, syntaxe) par ChatGPT.

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