Une affaire relance le débat sur les « buffer zones » au Royaume-Uni : Isabel Vaughan-Spruce, militante pro-vie connue pour ses engagements auprès de femmes en situation de grossesse difficile, fait à nouveau face à des poursuites pénales. Cette Britannique, déjà arrêtée à deux reprises dans le passé pour avoir prié en silence à proximité d’un centre d’avortement à Birmingham — avant d’être innocentée et même indemnisée par la police — est désormais convoquée devant la justice le 29 janvier prochain.
Il s’agit du premier cas de poursuites engagé au titre de la loi nationale créant des zones dites de « sécurité » autour des établissements pratiquant l’avortement, entrée en vigueur fin octobre 2024. Cette loi interdit toute tentative d’« influencer » un accès à l’avortement dans un périmètre de 150 mètres autour d’une clinique. Aucun texte ne mentionne explicitement la prière silencieuse, mais dans ce dossier, elle est considérée comme relevant de cette notion d’« influence ».
Déjà indemnisée pour deux arrestations injustifiées
La militante avait obtenu en 2024 une indemnité de 13 000 £ après deux arrestations jugées abusives. À l’époque, les accusations se fondaient sur des mesures locales, et non sur la nouvelle loi. Ces procédures s’étaient soldées par un abandon des charges ou par une relaxe, les tribunaux considérant que sa simple présence silencieuse ne suffisait pas à caractériser une infraction.
Pour Isabel Vaughan-Spruce, cette nouvelle mise en cause reste incompréhensible. Elle affirme avoir prié calmement dans une zone publique où elle est autorisée à se tenir, comme elle le fait depuis une vingtaine d’années. Elle estime que la liberté de pensée et de conscience est en jeu et conteste l’élargissement de l’incrimination à de simples convictions personnelles.
Une affaire emblématique du débat sur la liberté d’expression
Pour ses soutiens, cette poursuite témoigne d’un glissement inquiétant : la possibilité qu’une conviction tenue en silence devienne matière à sanction pénale. Les défenseurs des zones de sécurité invoquent la protection des femmes et la lutte contre le harcèlement. Les opposants y voient une atteinte disproportionnée aux libertés publiques, qui menace d’englober des attitudes non violentes ni intrusives.
Le caractère inédit de cette mise en accusation — la première sous la législation nationale — est suivi de près, car il pourrait créer un précédent. Si elle est condamnée, la militante risque une amende illimitée.
Le cas met en lumière l’extension progressive des « buffer zones » au Royaume-Uni, perçues par certains comme un outil nécessaire, par d’autres comme les contours d’un nouveau cadre de censure. En arrière-plan, une question simple mais centrale : jusqu’où un État peut-il réguler l’expression de convictions dans l’espace public ?
La réponse de la justice britannique, attendue début 2026, pourrait peser lourd dans ce débat.
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