Il y a des victoires qui ressemblent à des résurrections. Celle de David Gaudu à Ceres, lundi, a eu ce goût de lumière après des mois à patauger dans l’ombre. Le grimpeur breton, qu’on disait perdu dans les méandres des chutes et des déceptions, a retrouvé son instinct de funambule. Comme un vieux chat revenu d’un hiver trop long, il s’est glissé dans l’ombre de Pedersen et Vingegaard avant de jaillir, dans le dernier virage, par une porte que nul n’avait pensé entrouverte.
Ce n’était pas le sprint programmé d’un favori, mais la fulgurance d’un homme qui refuse de s’éteindre. Gaudu a débranché le cerveau, dit-il, pour laisser parler les jambes et ce qu’il lui reste de croyances. La scène avait des airs de théâtre antique : le champion du monde 2019, Mads Pedersen, avait tout construit, escorté par une armada Lidl-Trek. Vingegaard, drapé dans sa tunique rouge, attendait son moment. Mais le final, lui, appartenait au petit prince de Bretagne.
Une revanche sur les galères
Le sprint en bosse de Ceres (2,5 km à 3,2 %, durci à près de 6 % dans les derniers hectomètres) fut l’autel de sa rédemption. Troisième la veille à Limone Piemonte, Gaudu avait promis de revenir. Cette fois, il a fait l’intérieur au Danois Pedersen, comme on règle ses comptes à la régulière, sans témoin ni avocat, simplement au bruit des cœurs qui battent.
À l’arrivée, les bras levés, il n’y avait pas que la victoire d’étape : il y avait l’effacement des humiliations, la reconnaissance de son équipe, et l’écho de 2020, où il avait déjà cueilli deux bouquets sur la Vuelta. Trois ans de silence en WorldTour balayés en un instant.
Gaudu colle au Danois au classement général. La Vuelta, déjà, lui appartient un peu.
Étape 4 : de l’Italie à la France, une traversée pour costauds
Demain, la caravane franchira les Alpes pour un parfum de retour aux sources. Le peloton quittera Suse, en Piémont, pour rejoindre Voiron après 192 kilomètres d’un terrain secoué comme un drap qu’on secoue au matin. Le col du Lautaret, l’incontournable Montgenèvre : autant de rampes où les grimpeurs tenteront de voler quelques secondes aux favoris, autant de pièges pour ceux qui rêvent encore de verdeur sur leurs maillots.
Le profil accidenté laissera sa chance aux audacieux, mais l’ombre de Mads Pedersen plane toujours. Après avoir buté sur Gaudu à Ceres, le Danois aura une revanche à prendre. Quant aux Français, ils joueront à domicile, entre montagnes et vallées, poussés par un public qui saura reconnaître ses héros d’un jour. Le scénario ? Indécis, comme souvent sur ces étapes de moyenne montagne où tout se mélange : l’ambition des échappés, la patience des favoris, et le coup de poker d’un puncheur inspiré. La Vuelta s’installe en France avec l’odeur de la poudre et la promesse d’un nouveau feu d’artifice.
Crédit photo : Unipublic / Sprint Cycling Agency
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