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Gastronomie. Il Cùscusu alla trapanese au menu ce dimanche midi

Dans cette chronique hebdomadaire, je vous proposerai des recettes originales et historiques, réconciliant ainsi deux aspects de ma personne, celle d’historien et celle patron de bistrot. Elles seront faciles à réaliser mais surtout liée à l’histoire d’un territoire ou de grands hommes. La gastronomie traditionnelle raconte une terre, des traditions, elle s’inscrit donc dans l’idée d’un combat identitaire, soulignant les diversités qui nous sont chères d’une région à une autre, écologique, travaillant des produits locaux et de saison, et éthique, réduisant au maximum le gaspillage et s’opposant au modèle uniformisé du fast food.

 

Il Cùscusu alla trapanese : l’histoire

Dans les sondages, pour ce qu’ils valent, il arrive souvent dans le trio de tête des plats préférés des Français, le Couscous est intimement lié à l’histoire récente de la France pourtant, en Italie et particulièrement en Sicile, ce dernier peuple les tables depuis des centaines d’années. Aujourd’hui nous nous rendrons donc à Trapani et nous découvrirons un peu de son histoire au travers de son plat emblématique « Il Cùscusu alla trapanese ».

Trapani est une ville portuaire située à l’extrême ouest de la Sicile, à quelques milles nautiques des côtes tunisiennes. Selon la mythologie, son nom viendra du grec Depranon, qui signifie « la faux ». Cet outil serait tombée des mains du dieu Saturne formant ainsi cette langue de terre où se situe la ville. Ce promontoire fera de la ville un lieu idéal pour créer un port qui fera sa richesse. Tour à tour colonie phénicienne, grecque puis carthaginoise avant d’être romaine, qui latiniseront le nom de Depranon en Trapani, elle sera toujours au cœur des convoitises. A la chute de l’empire, les Vandales puis les Byzantins devinrent les nouveaux maitres. Pourtant ce n’est qu’au IXeme siècle sous la domination Arabe puis au XIème siècle sous la domination Normande que la ville atteindra une grande prospérité, étant devenu une étape importante sur la route vers la Terre Sainte. Pourtant aujourd’hui c’est bien cette influence arabe qui nous intéresse car ces derniers auraient apportés avec eux un ingrédient nouveau dans la cuisine locale, la semoule de blé, que l’on confond souvent avec les plats dont elle sert de base, le couscous, « Cuscus » en Italien ou « Cùscusu » en Sicilien.

Selon la légende, le couscous (que les puristes me pardonnent de cette simplification) aurait redonné vigueur au roi Salomon après une peine d’amour. Ce serait vers le V ou VIème qu’il se serait diffusé dans le Maghreb auprès des tribus berbères. Au XIème siècle, figurent les premières traces écrites dans des textes retrouvés dans la péninsule ibérique. La diffusion de cet ingrédient est principalement dû à la conservation à long terme du blé et à la facilité du transport. C’est donc vers le IXème siècle que les nouveaux maitres de Trapani apportent avec eux ce fameux couscous. Pourtant les premières traces écrites en Italie mentionnant l’usage de ce plat remonte à 1550. Giovanni Battista Ramusio parle notamment d’un plat d’oignon et de fèves accompagné de « cùscusu ». En 1777, l’anthropologue Giuseppe Pitrè, dans une étude sur les coutumes alimentaires en Sicile parle du menu d’un mariage à Trapani, « il fut offert au pretre un plat appelé cùscusu avec de la viande de porc, un plat hérité des sarrasins ». En 1785, le vocabolario siciliano etimologico nous indique que le « cùscusu » est une farine de blé transformée en petits grains qui, une fois cuits se mangent en plat ou en soupes. Il faudra attendre 1910 quand Armando Cougnet publiera L’arte cucinaria in Italia où figure la véritable recette du Couscous alla trapanese. On ne peut pas affirmer à 100% que le plat date de la domination arabe ou du commerce avec la Tunisie voisine. Une chose est sure en revanche est que ce plat est devenu le symbole gastronomique de la ville. Il est même reconnu par le ministère des politiques agricoles comme « plat traditionnel sicilien ».

Vous me direz, nous le connaissons bien le couscous, certains le font déjà à la maison. Si je me permet ainsi de vous indiquer cette recette aujourd’hui, c’est que le couscous de Trapani a une particularité très intéressante, c’est un couscous de poisson ! Ici pas question de merguez, de poulet ou d’agneau mais de poissons de roches, de crustacés et de coquillages. En effet, ce plat était celui des modestes pêcheurs qui faisaient bouillir de petits poisson de roches et qui les mélangeaient ensuite à la semoule… un plat de pauvre comme l’était la célèbre bouillabaisse. La semoule devrait être travaillée à la main, si vous en avez le courage… sinon utilisez une semoule précuite, c’est ce que nous allons faire.

Il Cùscusu alla trapanese ; la recette

Ingrédients pour 4 personnes : 600 gr de poisson (rouget, grondin, dorade, mérou…) 100gr de langoustines (ou gambas… ou les deux), 120 gr de palourde, quelques moules, 250 gr de semoule de couscous, 100 gr d’oignon, persil, 100gr d’amandes, 30 gr d’ail, 30gr de concentré de tomates, un verre de vin blanc, 100 ml huile d’olive et sel.

Faire ouvrir les coquillages, pour ce faire, placez-les dans une casserole à feu moyen avec le vin. Au fur et à mesure que les coquillage s’ouvrent, retirez-les afin qu’il ne cuise pas trop. Une fois toutes vos palourdes et moules ouvertes, réservez les et filtrez le jus de cuisson.

Levez les filets ou demandez à votre poissonnier de le faire, de vous poissons et conservez tous les déchets. Décortiquez vos crevettes et langoustines. Dans un mixeur, mélangez les amandes, le persil, l’ail et l’oignon puis versez le mélange réduit en purée dans une casserole. Faire rissoler pendant 5 minutes environ, ajoutez le concentré de tomate et laisser cuire 3 autres minutes, placez vos restes de poisson et de crustacés (têtes, arrêtes et carapaces), couvrir d’eau froide et laissez cuire 30 minutes après l’ébullition. Une fois cuit, filtrez en utilisant un chinois et en écrasant bien les chairs afin de récupérer toutes les saveurs… Unissez ce bouillon au jus de vos coquillages, votre bouillon est près, il servira à mouiller votre semoule.

Que votre semoule soit faite par vous ou précuit, la technique de cuisson demeure la même (à part que la semoule maison cuira d’abord 2 heures dans la couscoussière). De nouveau, faites un mélange d’huile, d’amandes, de persil, d’ail et d’oignon que l’on incorpore à la semoule. Ensuite utilisez le bouillon de poisson pour la cuire selon les instructions (en général, le même volume de bouillon que de semoule). Mettre à réduire le reste du bouillon à feu doux, il vous servira pour accompagner le plat, vous concentrerez ainsi les saveur, mettre quelques pistils de safran à infuser.

Dans une poêle, versez un peu d’huile d’olive. Salez vos poissons et crustacés. A feu vif, cuisez vos queues de crevettes et de langoustines, deux minutes de chaque coté devrait suffire, réservez. Puis dans la même poêle, procédez à la cuisson de vos filets de poisson en ayant pris soin d’ôter des arrêtes au préalable. Pour ce qui est des rougets je vous conseille de laisser la peau qui donne de la couleur et goût. Attention à ne pas trop cuire vos poissons.

Dans un plat de service, placez votre semoule et vos poissons, crustacés et coquillages, servez avec le bouillon à part (vérifiez l’assaisonnement) qui viendra arroser abondamment votre plat. Pour les amateurs, le piment se marie très bien avec cette recette, vous pouvez vous en servir pour relever votre bouillon.

Bon appétit !

Pierre d’Her

Photo : DR
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