Les élections locales britanniques de mai 2025 ont marqué un tournant majeur dans la politique anglaise : le parti Reform UK, dirigé par Nigel Farage, a réalisé une percée spectaculaire, bousculant l’équilibre historique entre travaillistes et conservateurs.
Une victoire sans précédent pour Reform UK
Avec 677 sièges remportés sur environ 1 600 en jeu, Reform UK s’est imposé dans plusieurs bastions conservateurs et travaillistes. Le parti, héritier du Brexit Party, a pris le contrôle de huit autorités locales auparavant dirigées par les Tories, notamment dans le Kent et le Staffordshire. Il s’est également emparé de la mairie de Doncaster — pourtant défendue par les travaillistes — ainsi que de celle de Durham.
Autre symbole fort : la victoire lors d’une élection partielle à Runcorn, dans le nord-ouest de l’Angleterre, où Sarah Pochin devient la cinquième députée du parti. Avec cette dynamique, Nigel Farage affirme désormais que Reform UK est devenu la véritable force d’opposition face au gouvernement travailliste de Keir Starmer.
Un rejet croissant des partis traditionnels
Ce scrutin, qui concernait principalement des zones rurales et périurbaines, confirme la fracture politique croissante au Royaume-Uni. Les conservateurs, en net recul depuis leur pic de 2021 sous Boris Johnson, enregistrent une déroute historique : plus de 676 sièges perdus, aucune des 16 autorités défendues conservées. Même leur unique succès — la reprise de la mairie de Cambridgeshire et Peterborough — peine à masquer l’ampleur du désastre.
Les travaillistes, malgré leur victoire aux législatives de l’an dernier, subissent également un revers avec 186 sièges perdus. Leur position dominante est désormais menacée dans plusieurs régions par l’ascension fulgurante de Reform UK.
Quant aux Libéraux-démocrates, ils en profitent pour renforcer leur implantation locale, revendiquant le statut de « parti de l’Angleterre moyenne », tandis que les Verts, bien que renforcés, n’ont pas réussi à percer dans les mairies stratégiques.
Farage : « Nous pouvons gagner les prochaines élections générales »
Nigel Farage, fidèle à son style offensif, a déclaré : « Nous pouvons et nous allons gagner les prochaines élections générales ». Son discours, axé sur la maîtrise de l’immigration, la réduction des dépenses publiques et la lutte contre les politiques de diversité imposées localement, trouve un écho croissant dans une population britannique lasse de l’inaction des partis traditionnels.
Le programme de Reform UK promet notamment de mettre fin à l’hébergement de demandeurs d’asile dans les hôtels, de supprimer les politiques DEI (diversité, équité, inclusion) au sein des conseils municipaux et de recentrer les dépenses locales sur les services essentiels.
L’électorat de Reform UK, longtemps perçu comme un vote de protestation, semble désormais structuré et déterminé. À Runcorn, ancien bastion ouvrier, de nombreux électeurs affirment avoir tourné le dos aux conservateurs après des décennies de promesses non tenues, notamment sur la baisse de l’immigration et l’état des services publics.
Pour Tim Bale, politologue à la Queen Mary University of London, Reform UK réalise « la meilleure performance jamais enregistrée par un parti populiste de droite radicale au Royaume-Uni ».
Un défi de gouvernance à venir
Avec cette poussée électorale, Reform UK devra désormais démontrer sa capacité à gouverner localement. Nigel Farage a exclu toute alliance formelle avec les Tories, tout en laissant entendre qu’une coopération ponctuelle pourrait avoir lieu là où son parti n’a pas obtenu la majorité absolue.
Cependant, des tensions internes demeurent. Farage a déjà dû évincer un député élu en 2024 pour divergences. La question se pose désormais : pourra-t-il maintenir la cohésion d’un parti en pleine expansion, face aux responsabilités locales nouvelles et à l’attention médiatique croissante ?
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