L’État se montrant de plus en plus incapable de donner les moyens humains et matériels à la Police nationale, les maires se voient dans l’obligation de mettre sur pied une police municipale importante – et comme les administrés veulent voir du “bleu“ dans les rues… Sauf à Brest, où le maire François Cuillandre se félicite de ne pas en posséder une. Cette particularité pourra-t-elle se prolonger après les élections municipales de mars 2026 ?
Une constatation : Brest est la seule ville de plus de 100 000 habitants à ne pas posséder de police municipale. Les deux autres métropoles bretonnes (Nantes et Rennes) en sont pourvues. Il faut reconnaître que nous avons affaire à une idée fixe du maire François Cuillandre (PS), malgré la montée de la délinquance – par exemple à Pontanézen. Pourtant il semble conscient de la situation. En 2018, il écrit au ministre de l’Intérieur « pour l’alerter sur le fait que [Brest] a perdu 120 fonctionnaires sur 400 en dix ans, depuis la fin de la police de proximité en fait. Je demande qu’on renforce les effectifs, ce n’est pas acceptable. » (Le Télégramme, Brest, jeudi 4 octobre 2018).
Cela n’empêche pas Cuillandre de camper sur ses positions : il n’y aura pas de police municipale. Lors du précédent mandat, l’un de ses adjoints en charge de la tranquillité urbaine, Yann Guével, le dit clairement : « La gestion de la délinquance passe par un juste partage des responsabilités entre la Ville, la police et la justice » (Le Télégramme, Brest, mercredi 24 avril 2019). Ce que Cuillandre confirme : « J’ai fait le choix de ne pas créer de police municipale à Brest et je ne reviendrai pas sur ma décision. » (Le Télégramme, Pays de Brest, mardi 19 octobre 2021). Réélu maire pour un quatrième mandat, François Cuillandre avait rappelé en septembre 2020 que sa position concernant la création d’une police municipale n’avait pas bougé d’un iota. L’année suivante, Cuillandre persiste et signe : « Je suis fier que Brest soit la seule ville de plus de 100 000 habitants à ne pas avoir de police municipale » (Ouest-France, Bretagne, jeudi 17 mars 2022). Est-ce que la brigade de tranquillité urbaine chargée de surveiller la voie publique serait l’amorce d’une police municipale ? « Jamais », répond le maire (M le magazine du Monde, samedi 11 mars 2023).
Un cadeau de François Cuillandre : un chenil
Evidemment, pour la droite brestoise, la sécurité et la prévention de la délinquance constituent un cheval de bataille. Son leader Bernadette Malgorn a des idées sur la question : créer « une véritable police municipale armée (forte d’une centaine d’agents), un réseau de vidéoprotection et un centre de supervision urbaine. Brest qui en a largement les moyens ne le fait pas » (Le Télégramme, Brest, mercredi 19 mars 2025). Pourtant, on ne peut pas reprocher à Cuillandre de ne rien faire en la matière.
C’est ainsi qu’en janvier 2022, François Cuillandre explique l’utilité de la future brigade de tranquillité urbaine : « Elle serait utile en termes de prévention, de lien social. Mais quand je lis sous la plume d’élus que la Police municipale devrait pallier les carences de la Police nationale, on se trompe de débats. Les compétences ne sont pas du tout les mêmes. » (Le Télégramme, Brest, vendredi 28 janvier 2022). Les sept premières recrues apparaissent en octobre 2022 ; ces agents de surveillance de la voie publique seront présents dans l’espace public pour lutter contre le sentiment d’insécurité, dissuader les incivilités, les actes de harcèlement et de violence, mais aussi renforcer le lien de proximité avec les habitants et acteurs de la ville. » (Le Télégramme, mercredi 16 novembre 2022). Objectif : faire monter l’effectif à 25 agents en 2025. « Au total, c’est 1,20 M€ qui aura été investi dans cette brigade », insiste Yohann Nédélec, l’adjoint chargé de la tranquillité urbaine (Le Télégramme, Brest, mercredi 13 décembre 2023). Mais une nouvelle étape est franchie deux ans plus tard : « Depuis décembre, ils sont équipés de menottes qui leur permettront de maîtriser plus facilement les fauteurs de troubles, en attendant l’arrivée de la police », indique Yohann Nédélec (Le Télégramme, Brest, samedi 18 janvier 2025)
Conscient des insuffisances de la Police nationale, François Cuillandre fait un geste ; il aide la brigade cynophile du commissariat forte de cinq bergers malinois. La Ville de Brest finance donc à hauteur de 825 000 €TTC la construction d’un chenil et de locaux pour les neuf policiers affectés à cette unité. On ne pourra pas reprocher à Cuillandre de ne rien faire !
Les écolos réclament une police municipale
C’est dans cette ambiance que se préparent les élections municipales de mars 2026. « La priorité des priorités reste la même pour la majorité des administrés comme l’a confirmé un récent sondage Ifop commandé par… le Parti socialiste. Interrogées sur leurs attentes à l’égard de la municipalité, les 598 personnes sondées étaient 64,4 % à hisser la sécurité des biens et des personnes comme prioritaire. » (Le Télégramme, Brest, jeudi 15 mai 2025). On ne sait pas si François Cuillandre sera à nouveau candidat l’an prochain, mais on sent des divergences concernant la création d’une police municipale dans sa majorité. C’est le cas du leader écolo Glen Dissaux qui annonce clairement les choses : « On a cranté la réponse durant ce mandat, avec la création d’une brigade de tranquillité urbaine. Ma conviction, c’est qu’il faut passer à la vitesse supérieure. Je suis donc favorable à une police municipale, pour doter les agents d’un vrai statut, de moyens, et d’une formation approfondie dans la gestion des conflits ou encore l’accompagnement des victimes. » Mais elle ne sera pas armée : « Surtout pas (…) La police municipale brestoise peut avoir un bâton de défense mais elle n’a pas vocation à intervenir sur les points chauds. » (Le Télégramme, Brest, vendredi 16 mai 2025)
L’avis de Yohann Nédélec, l’adjoint chargé de la tranquillité urbaine, était évidemment très attendu. D’autant plus qu’il est président du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT), organisme qui vient de lancer la construction à Montpellier d’une école de formation des policiers municipaux. Ses explications manquent de clarté même s’il finit par déclarer : « Etre pour, comme je le suis, ne signifie pas être démagogue comme certains. » La position des écologistes sur le sujet lui convient : « Il ne fait pas mystère que je suis plutôt en phase avec eux. » Reste la question du budget nécessaire pour faire fonctionner une police municipale : « Si l’on part d’une hypothèse entre 30 et 40 agents, cela coûte entre 1,70 M€ et 2,24 M€ par an. Et si elle est armée, il faut compter un surcoût de 12 %. Personnellement, je ne pense pas qu’il faille recourir à l’armement à Brest, mais à des dispositifs de protection et de défense. » (Le Télégramme, Brest, mardi 20 mai 2025).
La question principale lors de la prochaine campagne pour les élections municipales
On comprend que les questions de sécurité et de police municipale constitueront la question principale lors de la prochaine campagne pour les élections municipales. Si François Cuillandre est à nouveau candidat, pourra-t-il continuer à crier « Jamais » ? Ou bien sera-t-il contraint de mettre de l’eau dans son vin et de tenir compte des positions de ses alliés et de ses adjoints ? Les demandes de l’opinion publique en la matière allant en augmentant, difficile de refuser l’évidence : il y aura une police municipale à Brest, comme il y en a une à Nantes et à Rennes ; toutes les municipalités socialistes finissent par y passer…
Bernard Morvan
Crédit photo : Damien Roué/Flickr (cc)
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Une réponse à “Brest : François Cuillandre (PS) ne voulait pas en entendre parler…”
Et c’est qui les co…rds qui mettent des P.V en ville, y compris aux véhicules immatriculés hors de l’Europe ???