Choisir le vin pour le foie gras convoque immanquablement les options traditionnelles proposées par la cohorte des grands liquoreux. Qu’ils soient originaires du bordelais (Sauternes, Loupiac, Saint-Croix-du-Mont, du Sud-ouest avec le Monbazillac, de Loire avec les coteaux du layon ou d’Alsace SGN (sélection grain noble et vendanges tardives), tous sans exception, intègrent une forte sucrosité qui met à rude épreuve les papilles lors des agapes du réveillon.
Leur forte teneur en sucre est d’ailleurs l’une des raisons de la grande désaffection qui frappe ces vins mis au ban des repas par les nouvelles générations. Moelleux et liquoreux n’ont guère les suffrages, tout juste reviennent -ils en force à l’occasion des fêtes, portés encore par une tradition d’accord qui les place comme compagnons obligés du foie gras.
A telle enseigne que la longue relégation du sauternes a contraint le vignoble à se réorienter vers la production de vins blancs secs. Pareille conversion est à double tranchant, si elle vise replacer les vins en phase avec la demande des marchés, cette stratégie conduit à l’aliénation d’un savoir-faire unique. Produire un grand liquoreux est une autre affaire, qui passe en outre par une conduite bien spécifique du vignoble, quelque peu éloignée des principes qui régissent les vendanges de raisins destinés aux blancs secs.
Devenu un incompris, un vin hors de son temps dans une époque qui bannit le sucre, le grand sauternes demeure pourtant un vin d’esthète, encore apprécié des initiés, lorsqu’il est servi sur des accords idoines.
Mais puisqu’il faut savoir vivre avec son temps et sans vouloir enfoncer le dernier clou dans le cercueil du sauternais, nous vous proposons quelques vins compatibles avec le foie gras sur des associations préservées du recours au sucre qui fait si facilement le « pont » avec cet invité obligé du réveillon.
Proscrire les rouges
Vouloir associer le foie gras à un vin rouge débouche souvent sur un alliage contre-nature car ces deux-là, sont résolument antinomiques l’un pour l’autre.
Contrairement à une terrine ou un pâté en croute, la texture lisse et douce du foie gras n’offre aucun relief pour le vin rouge qui tend à s’affadir inexorablement à son contact. Le risque est de voir le vin s’empâter dans les méandres de la douceur du foie gras…
L’option du vin rouge peut toutefois s’envisager sur un foie gras poêlé, plus à même de rehausser sa texture et dont une bonne saisie à la cuisson lui apporte du croustillant. Une coloration et un déglaçage avec un alcool, permettront d’obtenir la fameuse réaction de Maillard, donnant ce goût légèrement caramélisé, appelant de grands gamays ou de jolis pinots noirs délicats et bouquetés.
Le parti des grands blancs secs
Schloss Johannisberg, Rheingau, riesling trocken (sec), 14.5€
Le riesling n’a pas son pareil pour réveiller le moelleux parfois excessif du foie gras, par son éclat et sa brillance aromatique, il perce la douceur du foie et active ses saveurs. Les bons rieslings se livrent toujours sur des lignes effilées et verticales, qui ne couvrent pas les plats mais les perfore de son acidité perçante. Le riesling du Schloss Johannisberg, propriété historique du Rheingau est révéré par les grands amateurs de ce cépage, si son acidité est marquée, elle reste néanmoins moins métallique et incisive que celle des rieslings mosellans ou alsaciens. Grand vin à moins de 20€ !!
Côte de la Charité, Bourg d’Oiseau, vin maudit 100 % pinot gris. 15€
Les côtes de la Charité sont sur la voie de la renaissance, ce petit vignoble coincé entre la Loire et le massif du Morvan est à la croisée des influences ligériennes et bourguignonnes. Ce terroir a durement périclité après la crise du phylloxera, au point de quasiment disparaître en dessous des 50 hectares.
Depuis une vingtaine d’années quelques installations redonnent une faible lumière à ce vignoble d’un insigne intérêt pour des vins frappés du sceau de la Bourgogne (chardonnay et pinot noir sur un substrat calcaire tout en intégrant des cépages Loire.
Frédéric Benzerga du domaine du Bourg d’Oiseau, incarne la nouvelle garde de ce vignoble confidentiel, il cisèle des blancs remarquables de pureté et de franchise d’expression.
Son vin maudit est en monocépage pinot gris (appelé le pinot beurot en référence à la bure des moines de l’abbaye de la Charité) qui exhale un nez parfumé et riche, laissant supposer que le vin pourrait être sucré. Aucun sucre résiduel dans ce vin à la texture moelleuse et confortable laissant une finale nette et salivante. L’accueil du foie gras est tout indiqué sur ce vin qui donne à voir les mêmes sensations qu’un vin moelleux grâce à sa maturité très poussée, tout en restant parfaitement sec.
Bourgogne-Tonnerre, domaine des 4 saisons, 2023 12.5€
Dans l’orbite du chablis, le petit vignoble satellite de Tonnerre s’impose comme un vivier pour de jolis blancs bourguignons aux prix très doux. Les propriétaires de Chablis y trouvent à ce titre un nouveau terroir d’expansion permettant d’étoffer leur gamme sur des segments de prix plus accessibles. Le domaine des 4 saisons excelle sur son Tonnerre 2023, paré d’une richesse digne de la côte de Beaune, le chardonnay se fait étincelant. Son fruit expansif avivé par une acidité mûre se lie à une résonnance aromatique finement « noisettée », il se calera à merveille sur un foie gras mi-cuit, sans le renfort du sucre une fois encore.
Bon réveillon !
Raphno
Crédit photo : DR (photo d’illustration)
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