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Le vote FN, un vote de classe ?

On n’attache pas assez d’importance aux données sociales et sociologiques lorsqu’on cherche à comprendre les résultats des élections tellement il est facile de demeurer dans le confortable clivage « droite-gauche ».  C’est ce que nous rappelle l’étude réalisée par Jérôme Fourquet, directeur du département Opinion et Stratégies d’entreprises de l’IFOP, pour la Fondation pour l’innovation politique (Fondapol) et portant sur les récentes élections européennes. Cette étude croise l’analyse géographique (à partir des résultats canton par canton) et l’analyse sociologique (à partir des études d’opinion de l’IFOP).

Le Figaro (15/10/2018) a publié le chapitre consacré au rapport de force entre l’UMP et le Front national. Evidemment, il est intéressant de reprendre les éléments qui concernent la Bretagne. La droite ne parvient à résister à la poussée frontiste que dans un nombre limité de territoires. Il s’agit en premier lieu de zones de tradition catholique comme le Léon et l’ouest de l’Ille-et-Vilaine (entre Fougères et Vitré). On retrouvera cette suprématie de l’UMP dans les enclaves aisées. Par exemple sur la façade atlantique, les quelques points d’appui de l’UMP sont constitués par des stations balnéaires ou zones touristiques favorisées : côte bigoudène, golfe du Morbihan, Guérande, La Baule et Pornic.

Mais, dès qu’on s’éloigne du littoral, que l’on quitte les enclaves aisées où retraités, professionnels du tourisme et professions libérales sont surreprésentées, le vote FN prend immédiatement l’ascendant sur l’UMP dans l’arrière-pays.

Dans ces conditions, le vote FN fait figure de « vote de classe », comme le vote communiste autrefois. Réalité qui défrisera certainement celles et ceux qui prônent l’« union des droites », doux rêve qui fait fi des pesanteurs sociales et sociologiques. Un bourgeois nantais possédant une résidence secondaire à Pornichet et un ouvrier de chez Gad (Josselin) n’appartiennent pas au même monde – la couleur de leur bulletin de vote s(en ressent donc. D’après Jérôme Fourquet,  le FN fait ses meilleurs scores dans les communes les plus pauvres où il écrase l’UMP.

C’est ce que soulignent les scores de l’UMP et du FN aux élections européennes, selon la catégorie socioprofessionnelle et en tenant compte des suffrages exprimés. 12% des ouvriers pour l’UMP et 41% pour le FN. 15% des employés pour l’UMP et 35% pour le FN. 17% des professions intermédiaires pour l’UMP et 25% pour le FN. 24% des commerçants, artisans et chefs d’entreprise pour l’UMP et 32% pour le FN. 20% des professions libérales et cadres supérieurs pour l’UMP et 14% pour le FN. 27% des retraités pour l’UMP et 18% pour le FN. Bien entendu ces pourcentages fournis par l’IFOP doivent être examinés en se souvenant que les classes populaires représentent 50% de la population, les classes moyennes 40% et la classe supérieure 10%.

PS – Dans les explications de Jérôme Fourquet, les recensements géographiques sont incomplets. En examinant de près la carte qui fait apparaitre en bleu les cantons dans lesquels l’ump a dominé le FN, on trouve les secteurs de Paimboeuf, Machecoul et le vignoble nantais, Saint-Malo et Dinard, Saint-Brieuc, Ploërmel.

B. Morvan

 Photo : DR
[cc] Breizh-info.com, 2014, dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine.

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3 réponses à “Le vote FN, un vote de classe ?”

  1. arondel dit :

    Cette étude recoupe très largement les travaux de Christophe Guilluy et ceux de Michèle Triballat. La France qui vote FN est celle des ”périphériques” (les ruraux et tous ceux qui ont quitté les banlieues des métropoles pour s’installer dans la périphérie proche ou lointaine afin de fuir les populations immigrées et de pouvoir se loger à bon compte). Ces ”périphériques” , selon Christophe Guilluy, représentent 60% de la population dont les classes ”populaires” et la part majoritaire des classes moyennes qui voit ses revenus baisser.
    Le vote FN semble bien être un vote de classe au sens de Machiavel qui voyait dans la lutte entre les ”grands” et les ”petits” (popolo grasso et popolo minuto) une lutte éternelle (à la différence de Marx, il pensait, à juste titre, que cette lutte durerait aussi longtemps que l’humanité) dans laquelle il voyait la source des innovations essentielles des sociétés. Au cours de son étude de la société romaine antique, il avait été frappé par le fait que la plus importante des institutions de la République romaine, le tribunat de la plèbe, avait été créée au terme d’un conflit extrêmement dur entre la plèbe et l’aristocratie sénatoriale (la plèbe avait décidé de faire la grève de la guerre alors que Rome était menacée).
    Marine Le Pen est en quelque sorte un moderne Tribun de la Plèbe (mais elle n’en a pas le caractère sacré !) et ne doit rien à la gauche ou au socialisme, contrairement à ce que disent les hérauts des partis bourgeois qui sont incapables de s’extraire de la fausse problématique droite-gauche.
    L’électorat FN est désormais très différent de celui de l’UMP et de ses alliés; l’hypothèse d’une ”union des droites” est désormais impossible parce que le FN est étranger à la ”droite” laquelle est libérale/mondialiste et défend les intérêts des couches sociales favorables à la mondialisation (et donc à l’Union Européenne).
    Nous sommes entrés dans une phase ”chaude” de lutte entre popolo grasso et popolo minuto.

  2. […] article Le vote FN, un vote de classe ? est apparu en premier sur […]

  3. populus dit :

    @arondel.
    Excellente analyse. Je retiens.

    Pour le caractère sacré, on peut déjà commencer.

    Pen est un nom celtique antérieur au latin. Et le fief Le Pen se trouve dans le territoire Vénètes. Ils ont été battus par Rome. Ca sera le retour des navigateurs vénitiens.

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