Dans la nuit du 6 au 7 juillet 2018, Nantes a connu sa quatrième nuit d’émeutes commencées avec le décès accidentel d’un délinquant chevronné, abattu par un CRS alors qu’il refusait de s’arrêter à un contrôle routier. Le changement de version du CRS soumis à une très forte pression – qui plaide désormais l’accident – a été interprété par les émeutiers comme un permis de continuer. Et nous avons retrouvé l’extrême-gauche à la manœuvre, tandis que les policiers restaient l’arme au pied faute d’ordres pour intervenir. Aucune interpellation n’a été faite.
La nuit dernière déjà, plusieurs bâtiments avaient été incendiés, et de nombreuses voitures encore. Retrouvez aussi notre reportage de la nuit précédente.
23 heures. La TAN a annoncé plus tôt dans la soirée que les derniers départs sur toutes les lignes seront faits à 22 h 30, et ce jusque dimanche. Le Breil est calme, avec des gendarmes mobiles disposés le long de la rue Méliés, au Nord. Aux Dervallières, la place centrale sent le brûlé et est plongée dans le noir ; les CRS y campent, tout est calme. À Bellevue à 23 h 15, des gendarmes mobiles sont au milieu de la place Mendès France, quelques dizaines de jeunes nord-africains sont dehors, mais rien ne se passe.
Place des Lauriers, il y a des gendarmes mobiles et personne d’autre. Curieusement, les parkings près de la place Mendès France et des Lauriers sont vides ou presque – contrairement à la partie du quartier sur Saint-Herblain où ils sont remplis.
Nous montons au Nord. L’alarme du Lidl de la route de la Chapelle est en train de sonner. Au Chêne des Anglais, deux voitures sur un parking ne fument même plus. Juste à côté, à la Boissière, les CRS sont disposés aux entrées du quartier – et non au milieu comme ailleurs, mais en venant du Chêne, des tas de déchets combustibles (bois, carton) sont préparés aux coins des rues. Il est 23 h 45 cependant et tout est calme. Pas comme au Château de Rezé où des émeutes ethniques ont eu lieu plus tôt dans la soirée, et plusieurs voitures y ont encore brûlé.
Alarme. Ça brûle au Breil, on y retourne. Rue Méliés, des Nord-Africains et des Africains, âgés de 20 à 30 ans, sont en groupes devant les immeubles – d’où les gendarmes mobiles sont partis – et commencent à s’affairer autour des voitures garées. Plusieurs alarmes sonnent. D’autres poussent des véhicules en travers des voies.
Rue des Plantes, à l’ouest du quartier. Au droit du restaurant l’Orangeraie, une vingtaine de silhouettes, masque de plongée, cagoule, gants, surgissent depuis la gauche, depuis l’intérieur du quartier. Ils sont blancs, parlent sans accent, crient « circulez » aux voitures bloquées dans la rue. Il s’agit des militants d’extrême-gauche, dont nous reconnaissons certains pour les avoir suffisamment vus sur la ZAD, mais aussi dans les manifestations violentes de l’extrême-gauche à Nantes. Plus à l’écart, certains militants sont là et donnent des conseils aux émeutiers – ils sont actifs dans la mouvance de l’extrême-gauche violente nantaise depuis plusieurs années maintenant.
Autour d’eux, une trentaine de personnes rabattent leurs capuches sur leur visage. Des jeunes Nord-Africains, Africains, du quartier. Des voitures sont déplacées, brûlées. Ça brûle aussi à l’intérieur du quartier. Sur Twitter, un proche de la mouvance antifa affirme clairement que « les jeunes peuvent compter sur le soutien des copains antifas ». Certains sont déjà là depuis la veille.
Et revoici notre ami Taha!
-Tolbiac et son mort imaginaire Check!
-Manif indigéniste qui hurle « Tout le monde déteste la police » Check!
-Grèves SNCF Check!
Emeutes de #Nantes #Breil Check!
Dites les #Insoumis vous en avez encore bcp des candidats émeutiers professionnels??? pic.twitter.com/MO7XdlS3yk— Chantal morel (@dc_morel) 5 juillet 2018
Les jeunes peuvent compter sur le soutient « des copains antifas » qui VIENDRAIENT les aider (info au conditionnel) #Breil #Nantes
— NicolasM (@NicoDebout) 6 juillet 2018
Un jeune du #Breil qui dit participer aux émeutes souhaite « en finir avec les fachos qui ont tués #Aboubakar » et rajoute « Faut que les flics dégagent et rentrent chez eux, ce sont plus les bienvenues » #Nantes
— NicolasM (@NicoDebout) 6 juillet 2018
Cocktails Molotov et projectiles divers sont lancés par les émeutiers sur les gendarmes mobiles. Ceux-ci sont en poste cinquante mètres plus bas dans la rue des Plantes, et restent l’arme au pied, tout en voyant extrême-gauche et émeutiers tout saccager plus haut. Des incendies éclatent à plusieurs endroits du quartier, les pompiers tentent de se frayer un passage. Des commerces épargnés les premières nuits d’émeutes sont caillassés. Lorsque les forces de l’ordre y vont enfin, les émeutiers reculent en bon ordre, sans se faire interpeller. La police finit par tourner autour du quartier.
Dans un sens, puis dans l’autre… #Breil #Nantes pic.twitter.com/ZHNBOTH9zs
— Marion Lopez (@MarionLpz) 6 juillet 2018
Des silhouettes noires sont apparues en haut de l’avenue des plantes. Gros renfort de forces de l’ordre. Des gyrophares partout mais pas tant d’affrontements. Ça joue au chat et à la souris. #Breil #Nantes pic.twitter.com/ZBKbTrbi4n
— Marion Lopez (@MarionLpz) 6 juillet 2018
Nous retournons dans l’est. Une forte odeur de brûlé flotte à la Bottière, mais tout est calme. En même temps, au Breil, tout s’est calmé d’un coup vers 0h35. Émeutiers et antifas se regroupent.
À Malakoff, les CRS campent tout autour de la place des Haubans, y compris sur le pont, et gardent les ruines de la maison de quartier. Il ne se passe rien. Quelques nord-africains les surveillent depuis les halls de leurs immeubles ou leurs fenêtres. Jusque là, les effectifs de police n’ont été engagés qu’au Breil. Mais cela commence à brûler aussi square des Rossignols (Bellevue), aux Dervallières – où un début d’incendie touche un bâtiment de Nantes Habitat – et à Plaisance peu avant une heure du matin.
A Plaisance, comme l’autre fois, des poubelles ont été incendiées avenue Robert Chasteland à l’arrêt de bus Cravate, ainsi qu’une voiture d’un côté et une camionnette de l’autre. Elles finissent de fumer vers 1h30. Sept à huit jeunes nord-africains surveillent depuis leur hall la rue, sans intervenir.
Direction le Breil, où ça brûle à nouveau depuis une heure du matin, au nord et au sud du quartier.
Le Breil ça repart pour un tour, gendarmes et policier en nombre , ambiance guerrier devant le ministère des affaires étrangères. #Nantes #Breil #Police #Crs #Breilmalville pic.twitter.com/VEM0o0XVG4
— kanye Est (@maladie_la) 6 juillet 2018
Au carrefour des rues de Malville et Méliés, des gendarmes mobiles sont revenus. Une intersection avant, rue de Malville, un nord-africain, puis deux, surveillent du coin de l’oeil les forces de l’ordre. Nous contournons encore. A l’angle de la rue des Plantes et du boulevard de Coubertin, trois voitures d’un coup brûlent. Les gendarmes mobiles ont déjà pris position devant. Plus au fond, un attroupement d’une quarantaine de personnes de tous âges. D’autres habitants du quartier garent en panique leur voiture plus loin des flammes.
Les pompiers arrivent à 1h30 et arrosent les flammes, on entend des détonations au loin. Les émeutes au Breil s’arrêtent vers deux heures – les antifas s’en vont, et les forces de l’ordre se contentent de « boucler » le quartier, sans réaliser d’interpellations. Le bilan officiel fait état de 36 voitures brûlées et d’un net soulagement puisque « aucun bâtiment n’a été ravagé ». Si on exclut le début d’incendie aux Dervallières et les commerces caillassés du Breil tout au moins. Plus tard dans la nuit, vers quatre heures du matin, un nouveau feu a lieu sur le parking du collège du Port-Boyer.
Pour l’heure, les seuls émeutiers interpellés – deux de 20 ans et un de 31, dans le quartier du Breil – n’ont eu que du sursis pour avoir jeté des projectiles sur les forces de l’ordre. Les dégâts sur les bâtiments publics et les infrastructures (aubettes de bus, tram etc.) atteignent plusieurs millions d’euros. La République – en la personne de François de Rugy, député et président de l’Assemblée – a fait demi-tour. La mairesse de Nantes Johanna Rolland, et le gouvernement de Macron font assidument comme s’il ne se passait rien. Et les nantais qui vivent dans les quartiers « populaires », « sensibles », « difficiles » et autres périphrases pour ne pas dire la vérité – dans des quartiers où la France n’est plus chez elle, où les bandes ethniques commandent, où l’ordre républicain s’efface – sont désespérément seuls face à la racaille.
#rugy #Nantes #Breil C’est le même qui va nous dire qu’il n’y a pas de quartier où la police ne va pas. Le président de l’assemblée nationale se fait recaler. Quel honte pour ce gouvernement et pour les politiques en général. Quand allons nous réagir? pic.twitter.com/OvhRf0QsZU
— diffréveil?✝?? (@fabri_gabri) 7 juillet 2018
Crédit photo : Breizh-info.com
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