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Le régionalisme à l’épreuve du mondialisme [L’Agora]

Le fondateur du réseau social et messagerie Telegram, Pavel Dourov, déclarait le 1er février 2021 sur son canal que « L’opposition capitalisme/socialisme semble révolue. Je préfère penser en termes de centralisation versus décentralisation. Les êtres humains ont évolué pour performer au mieux dans des petits groupes de moins de 150 personnes. C’est pourquoi partout où il y a une centralisation excessive, il y a de l’inefficacité et du potentiel humain sous-utilisé. Les monopoles capitalistes et les dictatures socialistes sont également mauvais.

Dans un environnement naturel, chaque petite communauté est capable de produire un leader remarquable et un penseur indépendant. Dans le monde actuel de Monopoly à trillion de dollars et d’États obèses, le potentiel de centaines de millions de personnes est supprimé par les limitations imposées par nos structures sociétales artificielles.

C’est la raison pour laquelle des dizaines de milliers de personnes travaillant pour de grosses entreprises comme Facebook ont échoué à développer ce que notre petite équipe Telegram a pu mettre en œuvre. 

C’est aussi la raison pour laquelle des pays comme la Russie échouent à générer et à retenir des marques mondiales dans leurs juridictions. 

La véritable créativité est rare dans les organisations et les sociétés construites sur des hiérarchies excessives et un manque d’autonomie personnelle. »  

Cette dialectique entre décentralisation et centralisation, entre petites structures innovantes, flexibles et organisations lourdes, hiérarchiques et figées se décline aussi bien dans les organisations politiques et sociales que dans les organisations d’entreprises. La loi est toujours la même : la liberté, la créativité et la richesse se développent systématiquement du côté des petites organisations décentralisées. 

Aujourd’hui se joue une immense et intense bataille entre un processus mondialiste, hyper centralisateur et négateur des identités locales, nous conduisant vers un gouvernement mondial, et la réaction des peuples, qualifiée de populiste, refusant de se dissoudre dans un grand tout uniforme et finalement totalitaire. Ces réactions prennent différents visages dans le monde. Indépendantisme catalan, Brexit exprimant un net refus d’une construction européenne niant les nations et leurs spécificités, contre-réaction paradoxale des indépendantistes écossais, élection de Trump à la maison blanche, montée en force des pays de groupe de Visegrad qui démontre les puissants ressorts historiques et géographiques face au monstre technocratique européen, etc.

Ces mouvements puissants, parfois aussi plus discrets, mais non moins légitimes comme les mouvements indépendantistes savoisiens, posent la question ultime de l’identité des peuples et dans quels cadres politiques celle-ci doit être vécue, sans s’enfermer sur elle-même. Il est intéressant de noter qu’un des pays les plus identitaires et décentralisés, la Confédération helvétique, est aussi un des plus ouverts sur le monde et aux travailleurs étrangers sans pour autant faire partie de l’UE. Il est donc faux de croire que l’identité s’oppose à l’ouverture sur l’autre et sur le monde. C’est au contraire en reconnaissant et en promouvant sa propre altérité qu’on devient capable de reconnaître et de respecter celle des autres peuples.

Quelle échelle d’organisation politique est la meilleure ? Où doivent se prendre les décisions, au plus proches du terrain ou dans un centre prenant en compte les enjeux mondiaux qui sont bien réels ?  Quel droit faire aux minorités linguistiques et culturelles au sein d’une organisation politique centralisée ? Où se situe le juste équilibre entre une nation hyper centralisée comme la France et un pays hyper décentralisé comme la Suisse ? Ces questions sont absolument fondamentales et les réponses que nous y apporterons dans les années qui viennent engageront l’avenir de l’humanité pour très longtemps.

L’hyper centralisme politique semble triompher. C’est une victoire à la Pyrrhus, car plus que jamais les peuples européens sont sceptiques, voire hostiles à la construction européenne, les Américains de plus en plus opposés à jouer les gendarmes mal aimés du monde. La seule façon aujourd’hui pour le mondialisme centralisateur de s’imposer face à ce réveil des identités est malheureusement le développement d’un totalitarisme larvé que la crise sanitaire actuelle renforce et accélère.

Mais prenons un peu d’altitude et relisons le récit de Babel qui dès l’origine montre que cette dialectique centralisation/décentralisation, unité du genre humain/pluralité identitaire est à l’œuvre au cœur de l’homme. Les hommes, dit le texte, voulurent se faire un Nom en bâtissant une tour qui pénètre les cieux, un Nom unique qui rivaliserait avec le Nom unique, imprononçable et mystérieux de Dieu, une ville qui rivalise avec la Jérusalem céleste qui à la toute fin de la Bible, dans le livre de l’Apocalypse, elle, descend vers les hommes. La tour de Babel est construite avec des briques de terre, la Jérusalem céleste avec une multitude infinie de pierres précieuses, d’or et de perles, la diversité incroyable de toute l’histoire humaine la constitue. Pourtant, l’ange qui la mesure utilise une mesure humaine alors que les bâtisseurs de Babel étaient dans la démesure.

Dieu empêchera cette première réalisation totalitaire et prométhéenne des hommes en les séparant par la diversité des langues. Or la langue, le dialecte, la variété linguistique est sans doute un des éléments les plus importants dans la définition de l’identité d’un peuple et d’une personne humaine. 

Cette variété et cette diversité sont voulues par Dieu. Et c’est bien cette loi qui permet à Dourov d’affirmer l’avantage indéniable des petites communautés humaines à la culture forte face aux grands empires politiques ou économiques.

C’est une loi naturelle, imprescriptible et c’est pour cela que les structures humaines bien définies, locales, identifiées, car identitaires sont l’avenir de l’humanité. C’est pour cela que l’idée de refonder en Europe des communautés politiques cohérentes du point de vue géographique et politique est une tâche urgente et essentielle, un combat à mener pour la prospérité et la survie des peuples européens. L’Europe ce n’est pas ce monstre technocratique froid et de plus en plus totalitaire qu’est aujourd’hui l’Union européenne, l’Europe c’est ce continent qui va de la Ligue Hanséatique à la Sérénissime République de Venise, de la Bretagne sauvage à la Saxe. Au milieu de cette si belle Europe se trouve un des plus anciens États européens : notre Savoie bien aimée qui, plus qu’aucune autre, a le droit et le devoir de poser sur la scène européenne la question de son identité et de sa liberté.

Reybaz

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3 réponses à “Le régionalisme à l’épreuve du mondialisme [L’Agora]”

  1. Tout à fait d’accord le centralisme abouti à la dictature du fait de la concentration des pouvoirs sur un petit nombre d’individus quelque soit le régime : monarchique, républicain, libéral, socialiste, clérical etc … l’HOMME ne peut communiquer, échanger, vivre qu’avec le nombre restreint de personnes de proximité qu’il peut rencontreras son entourage social; au-delà de ces limites il est obligé d’agir par représentation en déléguant son autorité naturelle à d’autres qui souvent ne respecteront pas le mandat de représentation reçu et trahiront de ce fait l’électeur ce que nous voyons à grande échelle avec nos élus républicains de droite comme de gauche
    Donc reprenons notre pouvoir est notre liberté : N’ayez pas peur , Jean Paul II

  2. Tout à fait d’accord. Excellent article, plein d’intelligence !

  3. Decrop dit :

    Quand le langage “tourne en boucle”, il perd sa vocation d’enrichir notre lecture du monde de ses multiples point de vue.
    Ainsi, il nous élève.
    Tous les “Ismes” sont une manipulation du langage, une réduction dichotomique l’asservissant à la quête du pouvoir.
    Ils n’ouvrent qu’à la déchéance de l’Homme.
    J’ai développé cela dans un article : https://www.causeur.fr/europe-babel-union-europeenne-bible-148032
    Fx Decrop

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