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Saint-Nazaire : un centre éducatif fermé (CEF) ouvrira fin 2022 à Heinleix

Porté par l’association SOS Jeunesse sous l’égide de la PJJ (protection judiciaire de la jeunesse), un centre éducatif fermé pour 12 adolescents est en cours de construction sur un terrain de 9000 m² près du stade de rugby de Heinleix, à Saint-Nazaire. Il ouvrira fin 2022.

Le bâtiment accueillera 12 adolescents de 13 à 18 ans, généralement pour des périodes qui ne dépassent pas six mois, dans une structure clôturée dont ils ne pourront sortir qu’avec un accompagnateur. Il y a déjà 52 structures de ce type en France – la construction de 20 nouveaux CEF a été décidée en 2018 lors d’un programme financé par le ministère de la Justice – 30 ont été construits de 2002 à 2006, 12 de 2007 à 2011, 9 de 2012 à 2016.

Une « alternative à la détention » qui a tout de l’antichambre d’une prison

Présentés comme une « alternative à la détention » et une « solution de réinsertion », ils ne sont en réalité ni l’un ni l’autre, selon une étude publiée par l’Observatoire International des Prisons en 2019 : « Depuis leur création, le nombre de jeunes placés en CEF n’a cessé de croître à mesure que les centres ouvraient, jusqu’à atteindre 487 enfants placés au 31 décembre 2018 […] et sans que ces placements de plus en plus nombreux n’entraînent une diminution du nombre de mineurs détenus ».

« Portail blindé, grilles, sas, barreaux aux fenêtres, vidéosurveillance… Certains centres ont tout d’une prison, jusqu’à l’aménagement de l’espace intérieur, pensé pour « accroître la visibilité des jeunes et de leurs comportements », décrit le sociologue Nicolas Sallée. Dans d’autres CEF, qui ont échappé à cette « tendance à la carcéralisation », l’architecture a peu à voir avec les standards pénitentiaires. « C’est notamment le cas des anciens foyers de placement transformés en CEF », précise le sociologue. Dans ces établissements, la fuite est matériellement possible.

En réalité, « ce qui caractérise les CEF, c’est la notion de fermeture juridique », explique-t-il. Le placement dans ces établissements se fait obligatoirement dans le cadre d’une mesure probatoire, qu’il s’agisse d’un contrôle judiciaire, d’un sursis avec mise à l’épreuve ou d’un
aménagement de peine. Des mesures susceptibles d’être révoquées par le juge en cas de manquement du jeune à ses obligations, qui finira alors en prison
 ».

Éducateurs inexpérimentés et jeunes confinés : les CEF, une « cocotte-minute »

Par ailleurs les CEF sont aussi des structures sous pression où la violence est omniprésente, relevait encore l’étude : « Dans leur rapport de 2015, les corps d’inspection rapportaient que 82 incidents violents avaient été comptabilisés par l’administration centrale dans les CEF en 2014 : parmi eux, « huit faits signalés impliquaient des professionnels dans des faits de violences sur des mineurs, dont la moitié dans le même CEF, principalement des contentions injustifiées ou brutales », précisaient les inspections.

« Les CEF, c’est un huis-clos où la violence est très présente, confirme Laurent. Entre les jeunes déjà. Dans l’un des CEF où j’ai travaillé, il y avait par exemple un rite de passage : le dernier arrivé au CEF devait se battre contre celui qui était considéré comme le plus faible du groupe, et établissait ainsi son rang. Les éducateurs peuvent être pris de court par cette violence, et réagir en miroir, avec de la violence. » Il faut dire qu’avec 80 % de contractuels(14), le personnel est, dans la plupart des CEF, souvent inexpérimenté. […]Des jeunes qui sont, en outre, non seulement soumis à des règlements souvent très stricts, mais aussi confinés vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jour sur sept »

Un contexte de violence généralisée qui se retrouve dans les faits divers – ainsi du tabassage de deux éducateurs d’un CEF de la Loire en mars 2021, un feu de matelas à Liévin fin 2020 – des faits divers que l’on retrouve aussi en milieu carcéral.

Mais aussi dans les violences sexuelles : en novembre 2020 un CEF situé aux Chutes-Lavie à Marseille est fermé six mois après le viol d’une mineure accueillie par d’autres pensionnaires, et cinq éducateurs sont mis à pied. En 2012, la même sanction vise le CEF de Port-Louis (Guadeloupe) après le viol d’un mineur par d’autres pensionnaires du centre et divers délits ; les autorités relèvent alors une équipe éducative « démissionnaire ».

En 2010 déjà : des jeunes « à la frontière du judiciaire, du social et du psychiatrique »

Le public accueilli n’est en effet pas constitué d’enfants de chœur, comme le relate déjà le rapport d’information n°759 sur le bilan des CEF en 2010 : « Ainsi que l’explique la direction du CEF de Liévin, « les jeunes accueillis au CEF présentent des caractéristiques communes, tant dans le champ culturel et social que dans le champ de la psychopathologie. Ils sont souvent à la frontière du judiciaire, du social et du psychiatrique. Parmi les carences ou les problèmes familiaux, on peut retrouver, entre autres, la misère sociale (chômage), la détresse psychologique, la difficulté à instaurer des limites et des repères de la violence, de la maltraitance. En quête d’estime de soi, pris dans des conflits et situations complexes, ils s’installent dans un cercle vicieux de l’échec permanent. En échec scolaire, avec le sentiment de ne pas avoir de place dans la société, le « statut » de délinquant leur permet d’être « reconnu », d’appartenir à un groupe ».

Ces jeunes présentent des caractéristiques communes : besoin de satisfaire immédiatement un désir, passages à l’acte violents, culpabilité limitée, oscillation entre sentiment de toute-puissance et d’infériorité, dépendance (à la cigarette, à l’alcool, aux stupéfiants), lacunes scolaires, immaturité, etc. »

Illustration par le public accueilli : «  la direction du CEF de Saint Venant a indiqué que la plupart des mineurs accueillis avaient été placés après avoir commis des violences ou des vols aggravés, ou encore des infractions à la législation sur les stupéfiants. Aucun n’était primodélinquant, sauf en matière criminelle ; 80% des mineurs accueillis au CEF de Brignoles en 2010 avaient déjà été condamnés plus de deux fois et 85% d’entre eux incarcérés au moins deux fois. 23 des 27 jeunes accueillis en 2010 avaient précédemment été placés dans une structure relevant de la PJJ ; sur les 40 mineurs placés au CEF de Savigny-sur-Orge en 2010, plus du tiers avait déjà connu une période de détention. 70% avaient déjà connu un ou plusieurs placements antérieurs ».

Les centres éducatifs fermés, des passoires ?

La presse locale permet de constater que les centres fermés ne le sont pas autant que cela, et que des délinquants qui s’y endurcissent parviennent à s’évader, voire commettent ensuite de nouvelles infractions pendant leurs évasions.

Ainsi en novembre 2020 un jeune de 16 ans – suspecté de meurtre – s’est évadé d’un CEF dans l’est de la France, en octobre 2020 deux mineurs évadés d’un CEF près de Cambrai volent deux voitures pendant leur cavale, en 2019 un mineur délinquant évadé d’un centre éducatif fermé se retranche dans un quartier « sensible » de Forbach et y commet des vols avec violence, etc.

On relève aussi des évasions en 2013 au CEF de Lavaur dans le Tarn et de Pionsat en Puy-de-Dôme, en 2014 au CEF d’Uzerche en Aveyron, en 2016 au CEF de Cambrai  (encore) après que le jeune en fugue ait menacé un éducateur avec son couteau, en 2018 dans un CEF du Gard – le mineur venait d’y être placé pour avoir participé avec quatre autres à piéger et tabasser des homosexuels à Nîmes, à Moissannes (Haute-Vienne) en 2019 – le jeune était déjà connu pour fugues, vols et violences, en 2019 encore de deux jeunes de Lunel (Hérault) d’un CEF à Bordeaux, et ainsi de suite.

Du reste certains n’ont pas besoin de s’évader pour commettre des crimes ou des délits : en 2010 un mineur d’origine extra-européenne placé depuis 2009 au CEF du Vigeant (Vienne) suite à un viol avec actes de torture et barbarie en Ardèche en 2008 bénéficiait d’une si grande liberté lors des formations et stages qu’il effectuait qu’il a violé deux personnes, à la gare de Poitiers et sur une base de loisirs de la Vienne où il était en stage. L’Etat a été condamné pour défaillance, le jeune délinquant étant sous sa responsabilité lors de ses délits.

En 2011 le rapport d’information n°759 sur le bilan des CEF donnait déjà des éléments troublants sur les fugues : « certaines fugues ont lieu « ab initio », sur le trajet menant le jeune vers le centre dans lequel le juge vient d’ordonner son placement. Dans ce cas, il peut arriver que les équipes éducatives ne voient jamais le mineur. […] Sur les 28 mineurs placés au CEF de Liévin en 2010, cinq ont fugué à la sortie de l’audience ou le premier jour de leur accueil au centre. Sur les 40 mineurs placés au CEF de Savigny-sur-Orge cette même année, neuf ont fugué dès le tribunal ou dans les trois jours suivant leur arrivée ».

D’autres ne sont même pas déclarées comme telles : «  le mineur s’absente pendant quelques heures, parfois un jour ou deux, avant de rentrer spontanément au centre. Ainsi, le jour où vos co-rapporteurs ont visité le CEF de Savigny-sur-Orge, le mardi 21 juin, plusieurs mineurs étaient « sortis » afin de participer à la fête de la musique – ce qui n’a toutefois pas manqué de susciter la perplexité de vos rapporteurs quant à l’efficacité des mesures de surveillance dont ils étaient censés faire l’objet… »

Les rapporteurs avaient tenté de dresser des statistiques, en s’appuyant sur les incarcérations suite aux fugues : « D’après les informations communiquées par la DPJJ, obtenues à partir des réponses fournies par 59% des CEF, 18% des mineurs accueillis en 2010 ont été incarcérés par révocation du contrôle judiciaire ou du sursis avec mise à l’épreuve. Dans 45% des cas, la fugue a justifié la révocation. Au total, donc, environ 8% des mineurs placés en CEF en 2010 auraient été incarcérés à la suite d’une fugue ».  Près de 1 sur 12 donc.

Bref, l’avenir de Saint-Nazaire, qui connaît depuis plusieurs années des problèmes grandissant de délinquance, de fusillades en lien avec le trafic de drogue et d’occupation des espaces publics par des dealers, bien souvent d’origine extra-européenne, fait rêver.

Louis Moulin

Crédit photo : DR
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Une réponse à “Saint-Nazaire : un centre éducatif fermé (CEF) ouvrira fin 2022 à Heinleix”

  1. Gillic dit :

    Il est vraiment navrant de voir tout l’ argent de nos impôts gaspillé pour ces abrutis !! Pourquoi ne pas les envoyer faire un stage de 5 ans aux Iles Kerguelen !! Là bas il y a de la place pour ces soit disant asociaux !!!! Ils en reviendraient comme des moutons castrés pour le plus grand bien de la société !!!

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