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Le manoir de Kerazan, épine dans le pied de l’Académie française

Kerazan, en Loctudy, est l’un des héros malgré lui du rapport sévère que la Cour des comptes vient de consacrer à l’Académie française – ou plus exactement à l’Institut de France (qui comprend aussi l’Académie des inscriptions et belles-lettres, l’Académie des sciences, l’Académie des beaux-arts et l’Académie des sciences morales et politiques).

Déjà en 2015, la Cour avait critiqué la gestion laxiste de l’Institut de France. Dans son nouveau rapport, elle se penche sur sa politique immobilière. La situation est consternante. L’Institut est un gros propriétaire immobilier. Il a bénéficié au cours des siècles de nombreux legs.

L’un d’eux porte sur Kerazan. Construit au 16e siècle par les Kerfloux, ce manoir breton typique entouré d’un beau parc a appartenu au 18e sècle à une autre grande famille noble de Bretagne, les Kermorduc. Cela lui a valu d’être confisqué par les révolutionnaires en 1793. Il est racheté une cinquantaine d’années plus tard par un notaire, Me Arnoult, dont la fille épouse en 1855 Joseph Astor, fils d’un ancien maire de Quimper – et lui-même futur maire de Quimper de 1871 à 1895. Leur fils, Joseph-Georges Astor, meurt sans descendance en 1928, léguant le manoir à l’Institut de France.

1,3 million de travaux urgents

Les Astor ont largement transformé le domaine. Ils y ont installé leur vaste collection composée surtout de peintures bretonnes, notamment de Charles Cottet et Maurice Denis. Elle comprend aussi la plus importante collection d’oeuvres du faïencier Alfred Beau. En particulier une pièce unique : un violoncelle en faïence de la manufacture quimpéroise Porquier. L’Institut de France a fait du bâtiment et de ses cinq hectares de parc un musée ouvert au public.

Hélas, il ne l’entretient pas comme il devrait. « Le manoir de Kerazan, situé dans le Finistère, est aujourd’hui en déshérence », écrit même la Cour des comptes. Depuis son précédent rapport, « la situation du site s’est encore aggravée, avec des résultats de plus en plus déficitaires, une absence de gestion au niveau local, des difficultés de relation avec la direction régionale des affaires culturelles (DRAC), des insuffisances de la maîtrise d’ouvrage assurée par les services de l’Institut depuis Paris pour un site aussi éloigné et une absence d’intégration du Manoir dans son environnement culturel régional ». Fermez le ban. En fait, les travaux urgents représentent un budget de 1,3 million d’euros. Les recettes de billetterie ne permettent pas d’y faire face ; en fait, l’exploitation du musée est déficitaire d’environ 150 000 euros par an.

Une autre solution à trouver

« Le manoir et ses collections peuvent constituer un conservatoire historique et centre d’interprétation du pays bigouden tout à fait pertinent, pris dans un maillage de musées régionaux qui lui feraient écho », note cependant la Cour. Si l’Institut manque de motivation ou de moyens financiers, il doit s’interroger sur des « scénarios alternatifs » : confier le domaine à une institution culturelle publique ou à une collectivité territoriale, ou obtenir une révision judiciaire du legs en vue d’une exploitation commerciale par un partenaire privé, un hôtelier par exemple. La collection serait alors confiée aux musées des beaux-Arts de Quimper ou de Pont-Aven. « En tout état de cause », insiste la Cour, « le statu quo n’est plus possible : la situation présente ne peut perdurer sans risque pour l’intégrité du monument et des collections. »

Une association, Les Amis de Kerazan, s’attache à animer les lieux avec différentes manifestations. Elle y organise un vide-grenier ce dimanche 18 juillet et un salon de la gravure au mois de septembre. Elle prépare aussi une rétrospective de l’œuvre du peintre et sculpteur Guy Pavec, de Landudec, disparu au mois de mars. Mais elle ne peut évidemment remédier aux lacunes du propriétaire. Il est grand temps que l’Institut de France se décide à agir.

Manoir de Kerazan, 29750 Loctudy. 09 65 19 61 57. Ouvert jusqu’au 20 septembre, TLJ sauf samedi, de 11 à 18h00 (21h00 du 12 juillet au 21 août). Plein tarif : 7 €, divers tarifs réduits, gratuité pour les moins de 7ans.

Les Amis de Kerazan, [email protected], Centre culturel Kerandouret, Hent Poul Glevian, 29750 Loctudy.

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Une réponse à “Le manoir de Kerazan, épine dans le pied de l’Académie française”

  1. patphil dit :

    quand l’argent coule à flots …
    quand les responsables sont irresponsables et manquent de la moindre conscience professionnelle, le cochon de payant sera toujours obligé de financer la gabegie, il faudrait que ça cesse

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