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Quelle sécurité routière en France pour moins de répression ?

Quelques semaines après notre colloque à l’Assemblée nationale, intitulé : « 3 500 morts sur les routes depuis dix ans : et maintenant on fait quoi ? Bilan de la politique de sécurité routière menée par les gouvernements successifs et vraies pistes d’amélioration », la Ligue de Défense des Conducteurs vient de publier les Actes et les vidéos de cet événement.

Pourvu que les analyses et les propositions des experts que nous avions sollicités trouvent un écho du côté du ministère de l’Intérieur...

Comment susciter un électrochoc pour qu’enfin, la politique de sécurité routière en France prenne un autre chemin que celui de la répression pure et dure ? C’était la mission que s’était fixée la Ligue de Défense des Conducteurs, en organisant ce colloque à l’Assemble nationale le 20 mars dernier. Tout d’abord, en consacrant une première table ronde aux limites de la poursuite quasi obsessionnelle de la vitesse au travers des radars automatiques, dont la prolifération n’arrive pas à enrayer la mortalité sur la route. Puis, lors d’une deuxième table ronde, en offrant une tribune aux vrais acteurs de terrain de la sécurité routière, experts en prise en charge des victimes, en sécurité des véhicules et en qualité des infrastructures routières. Enfin, la troisième table ronde a consisté à lister des actions concrètes, dont la mise en place améliorerait très concrètement la sécurité routière…

Voici un florilège de propos tenus par les intervenants lors de ces trois tables rondes.

TABLE RONDE 1
La politique de sécurité routière peut-elle encore longtemps se focaliser sur la vitesse alors que la mortalité stagne ?
Avec Olivier Amrane, Bernard Darniche et Rémy Josseaume

C’est le président du Conseil départemental de l’Ardèche, l’un des sept départements dont la totalité des routes est repassée à 90 km/h, qui ouvre le ban. Le crédo d’Olivier Amrane : adapter sa politique de sécurité routière à la réalité de terrain et pointer du doigt le décalage entre le 80 km/h, imposé par Paris en 2018, et les contraintes de mobilité de ses concitoyens. Il déclare notamment, au sujet de son rejet de l’abaissement de la vitesse généralisé (dont il n’a pas observé d’effet probant sur ses routes avant qu’il ne rehausse la limitation) : « C’est nous qui avons une connaissance fine de nos routes, nous avons déjà identifié les zones dangereuses, elles sont sanctuarisées ».

Bernard Darniche, dont le palmarès en compétition automobile (champion d’Europe des rallyes) et la profonde connaissance de la sécurité routière parlent pour eux-mêmes, demeure très engagé dans la formation et la prévention. Expliquant pourquoi il vient de cofonder un Pôle de prévention des risques routiers, il promeut une « mobilité sereine et durable », mais n’a pas sa langue dans sa poche, rappelant entre autres que « L’endroit où on est autorisés à rouler le plus vite, les autoroutes, c’est là où il y a le moins d’accidents. De temps en temps, il faudrait que ça percute, ça, quand même », s’insurgeant contre le fait que « Les règles, aujourd’hui en France, bien malin celui qui dit « je les respecte et je les décrypte toutes ». C’est juste impossible »… Son souhait le plus cher, déplacer le débat : « Tant qu’on ne déconnectera pas la sécurité routière du monde politique, on sera dans un système qui ne marche pas ».

Pour conclure cette première table ronde, Rémy Josseaume, avocat au barreau de Paris et président de l’Automobile-club des avocats, constate « tous les jours qu’il vaut mieux être un délinquant de droit commun qu’un délinquant routier devant un tribunal ». Mais rappelle aussi une évidence : « Oui, la sécurité routière coûte, mais en matière de santé publique, c’est peut-être la seule, avec le tabac, qui rapporte de l’argent. Beaucoup d’argent »

TABLE RONDE 2

Qualité des secours portés aux victimes d’accidents, sécurité active et passive des véhicules, infrastructures : les grands oubliés de la sécurité routière
Avec Jean-Michel Constantin, Jean-Max Gillet et Jean-Yves Le Coz

Alors que l’État attribue quasi sans nuance la baisse du nombre de morts sur les routes, nous avons souhaité donner la parole à des professionnels trop rarement occupés à faire leur autopromotion, en matière de sécurité routière…  Durant ces dernières décennies, l’amélioration des interventions des secours sur les lieux d’accidents et à l’hôpital a ainsi sauvé des milliers de vies. Un constat que fait Jean-Michel Constantin dans son service de réanimation, qui accueille cependant de plus en plus de victimes des « mobilités douces » : « On dit « mobilités douces, » mais quand on regarde les crash-tests, l’état des victimes, cette mobilité n’est pas douce », observe-t-il alors qu’il se félicite des progrès effectués par les voitures, protégeant de mieux en mieux leurs occupants mais aussi les personnes alentour. Ce que confirme lors de son exposé Jean-Yves Le Coz, médecin, spécialiste en rééducation et réadaptation fonctionnelles, enseignant en biomécanique à l’École nationale supérieure d’Arts et Métiers, sans oublier le laboratoire d’accidentologie de PSA/Renault qu’il a dirigé :

« Entre les véhicules équipés de systèmes de sécurité active et passive et ceux qui n’en ont pas, on obtient moins 70 % de risques de blessures graves et mortelles ».

TABLE RONDE 3
Les axes à privilégier pour vraiment améliorer la sécurité routière
Avec Karine Bonnet, Ludovic Da Mota et Patrice Bessone

Ces tables rondes ayant aussi pour but d’être constructives, nous avons décidé de conclure nos débats avec des envies et espoirs concrets, portés par trois professionnels de la filière automobile. Ainsi, Karine Bonnet, tout en rappelant le rôle préventif du contrôle technique des véhicules, voudrait aussi privilégier deux pistes : « L’humain et la prévention c’est essentiel. Il faut faire preuve de pédagogie et informer », explique-t-elle. Surtout à l’heure du partage de la chaussée, en milieu urbain… Selon elle, la France pourrait adopter de nombreuses initiatives pour améliorer la sécurité routière observées dans le monde : « Tout passe vers la connaissance des uns et des autres, de notre part de responsabilité, du respect de l’autre ». De son côté, Ludovic Da Mota, organisateur d’événements contribuant à sensibiliser le public aux aspects sécuritaires de la moto et promouvoir une pratique responsable, notamment par le biais ludique de la cascade, est effaré par l’impact des vidéos montrant des comportements dangereux en deux-roues sur les plus jeunes… et le dénonce. « Vous pouvez être le meilleur pilote au monde, vous ne savez jamais ce qui arrive dans la rue », insiste-t-il, en appelant de ses vœux une attitude plus responsable des modérateurs sur les réseaux sociaux. Enfin, Patrice Bessone, patron d’auto-écoles et porte-parole du métier au sein de Mobilians (organisation patronale représentant la filière des services de l’automobile), déplore le retard pris par la France en matière de pédagogie pour apprendre à conduire : « Tout ce qu’on a expliqué sur le coercitif, ça ne marchera jamais ». Il propose notamment de « rendre le Compte personnel de formation portable et transmissible », des parents vers les enfants.

Notre colloque a déjà porté ses fruits : quelques jours seulement après l’événement, le député Pierre Cordier a déposé une proposition de résolution à l’Assemblée nationale (n° 2419), « tendant à la création d’une commission d’enquête sur la politique nationale de sécurité routière ». La Ligue de Défense des Conducteurs se félicite de cette initiative, en parfaite adéquation avec nos propres attentes. En effet, une telle enquête révélera non seulement les excès de la répression routière automatisée, mais également tous les manquements de l’État pour véritablement améliorer l’accidentologie routière ces vingt-cinq dernières années.

Cliquez ici pour lire les Actes du colloque

Cliquez ici pour les vidéos du colloque

Crédit photo : DR (photo d’illustration)

[cc] Breizh-info.com, 2024, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine

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5 réponses à “Quelle sécurité routière en France pour moins de répression ?”

  1. Bataille dit :

    De retour de Martinique… Les radars tourelles y poussent comme les fleurs tous les 10 mètres même dans des endroits improbables! Par contre, le comportement suicidaire ou accidentogène de certains locaux particulièrement sur les rond-points (qui eux aussi poussent comme les fleurs) mériterait un retrait de permis immédiat. La répression aveugle et sournoise des radars (hors de prix) montre ses limites alors que l’éducation à une conduite « sensée » ferait beaucoup de bien… J’aimerais avoir les statistiques des accidents du département et l’influence de la multiplication des radars sur ces statistiques ! Et j’aimerais aussi savoir si l’argent « gagné » par ces radars est consacré à la prévention routière, ce dont je doute fortement au regard de l’état du réseau routier local.

  2. Barthélemy dit :

    Bonjour,
    N’oubliez pas la norme française NF P 98-300 de juin 1994 concernant les ralentisseurs routiers.
    Merci de transmettre.
    Bien à vous.

  3. gautier dit :

    l’état est un pourri, la seule chose qui compte c’est l’argent, le reste tout comme le cancer ! il s’en fout !! Pourquoi sur l’autoroute on passe de 130 à 110 sur une ligne droite alors que la matérialisation est la même? De plus le radar de la voiture une fois sur 5 ne peut lire les panneaux car la route à droite est pleine de camions ? POURQUOI NE PAS METTRE DES PANNEAUX SUR LE TERRE PLEIN CENTRAL!! sur les routes à 90 la plupart ont des accotements déplorables ! sans compter les nids de poule qui nous font dévier de notre conduite ! ou sur une zone de dépassement assez courte 3km les gendarmes mettent un radar bien au milieu quand vous accélérez pour dépasser !! çà aussi c’est un crime d’état !!! j’ai deux million de km à mon actif en tant que directeur commercial, heureusement à la retraite sinon je serai aujourd’hui avec 100 points de moins ! oufff

  4. Jacob dit :

    L’automobiliste vache à lait qui permet à l’Etat de remplir les caisses. Il y en plein le C** de cette escroquerie sous couvert de sécurité routière. Le 019 juin foutons dehors et sans ménagement tous ces gangsters qui nous dirigent, vident nos porte-monnaie et s’empiffrent.

  5. P.L.C. dit :

    Et que direz-vous si comme moi, avec notre famille, nous avons subi un accident de la route, sur la 13 entre Lisieux et Caen, LE DEPUTE ET MAIRE DE LISIEUX? donc homme politique s’il en est ? Dépasse un camion dans un virage, heurte de plein fouet la voiture de mon frère, dans lequel, il sera très grièvement bléssé (seulement quatorze fractures au bassin) son épouse y perdra la vie, notre Maman instalée à l’arrière sera tuée sur le coup, un des deux enfants aura une jambe cassée et LUI le Maire de Lisieux ne sera que très modestement comdamné , il mourra à 95 ans plusieurs années après sans autre chose qu’un blâme des autorités..politiques….Monsieur était pressé, il se rendait à une réunion politique à Caen ou je ne sais où !

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