Nantes : le modèle de gestion du stationnement public en question selon la Chambre régionale des comptes

La Chambre régionale des comptes (CRC) des Pays de la Loire a rendu un rapport accablant sur la gestion du groupe public-privé Nantes Gestion Équipements (NGE), acteur central du stationnement et de la gestion d’équipements à l’échelle de la métropole nantaise. Portant sur les exercices 2018 à 2023, ce contrôle met en lumière une gouvernance confuse, des finances fragiles, un service dégradé pour les usagers, et des choix politiques qui interrogent.

Une structure complexe et dépendante des subventions

Le groupe NGE, structuré autour d’une société d’économie mixte (SEM) et d’une société publique locale (SPL), fonctionne au sein d’un groupement d’intérêt économique (GIE). Il gère plus de 11 000 places de stationnement, ainsi que des équipements de loisirs (piscines, patinoires, ports de plaisance) et même des centrales photovoltaïques.

Or, selon la CRC, ce « groupe » repose sur une stratégie incertaine et une dépendance excessive aux subventions publiques. Les produits d’exploitation peinent à couvrir les charges, et la SEM NGE affiche un déficit cumulé de plus de 800 000 euros sur la période, plombé notamment par la crise Covid et une dette élevée. La SPL s’en sort un peu mieux, avec un léger excédent, mais reste fragile.

Stationnement : fréquentation en baisse et services dégradés

Le cœur d’activité du groupe, le stationnement, est en perte de vitesse. La fréquentation des parkings publics, notamment en centre-ville, s’effondre, sans que les hausses tarifaires ou la communication ne compensent cette désaffection. Les parkings Talensac et Decré-Bouffay, vieillissants, offrent une qualité de service médiocre. Le taux de performance global n’a jamais atteint les 93 % contractuels, et aucune pénalité n’a été appliquée.

Le projet d’extension du parking Cathédrale a été abandonné, coûtant tout de même 351 000 euros d’indemnisation à la Métropole, pour un projet évalué initialement à 7,4 millions.

Gouvernance floue, pilotage politique discutable

La gouvernance du groupe est jugée insuffisamment clarifiée, avec des confusions de rôles entre la SEM, la SPL et le GIE. Des avances en compte courant peu encadrées, un inventaire physique inexistant des équipements publics, et une comptabilité analytique jugée inégale ont été relevés. La SEM NGE, par ailleurs victime d’une escroquerie au faux RIB de plus de 330 000 €, n’a jamais récupéré la somme.

Parmi les irrégularités relevées figure également la sous-traitance informelle du marché des horodateurs, qui aurait permis à la SEM NGE de continuer son exploitation en dehors des règles de mise en concurrence – ce que la ville de Nantes réfute partiellement.

LAPI, PMR, et surveillance automatisée : des zones d’ombre

La mise en œuvre du contrôle automatisé par lecture de plaques (LAPI) depuis 2024 introduit de nouvelles incertitudes juridiques et des questions sur la protection de la vie privée. Le rapport évoque un risque de capture d’image des occupants des véhicules, non conforme aux recommandations de la CNIL. Des avenants ont été annoncés pour corriger le tir, mais les ambiguïtés contractuelles demeurent.

Concernant les cartes de stationnement pour personnes à mobilité réduite (PMR), la CRC demande à NGE d’être plus rigoureux pour éviter les fraudes, notamment avec le LAPI, qui pourrait nécessiter le déploiement d’agents supplémentaires.

Une réponse prudente des parties prenantes

Dans leurs réponses, les responsables de NGE et de Nantes Métropole accusent la crise sanitaire, reconnaissent certains dysfonctionnements, mais assurent avoir mis en œuvre des réformes, notamment sur les achats, la qualité de service, et la clarification des statuts. Des progrès sont notables, comme le retour à un taux de performance de 93 % en 2024 pour certains parkings.

Ce rapport soulève une question plus large : quelle place pour la gestion publique du stationnement et des équipements urbains ? À Nantes, la volonté de limiter l’usage de la voiture se traduit par une désaffection croissante des parkings, mais le système de gestion en place semble peiner à s’adapter, tout en coûtant cher au contribuable.

Dans un contexte d’insécurité croissante, de tensions sociales et budgétaires, ces révélations risquent d’alimenter les critiques sur la gestion technocratique de la métropole nantaise. La CRC, de son côté, appelle à des clarifications, une meilleure rigueur comptable, et une refonte de la stratégie globale.

Crédit photo : DR
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