Dans leur essai percutant, Laurent Alexandre et Olivier Babeau alertent sur l’obsolescence de l’université face à la révolution de l’intelligence artificielle, appelant à un sursaut éducatif radical. Une critique virulente d’un système figé dans le passé.
« Ne faites plus d’études » : un titre provocateur, pour un constat implacable. Dans leur dernier livre publié chez Buchet-Chastel, Laurent Alexandre et Olivier Babeau dressent un réquisitoire sévère contre l’université française, jugée incapable de préparer la jeunesse aux défis colossaux que pose la révolution de l’intelligence artificielle. Leur message n’est pas un appel à l’oisiveté, mais un cri d’alarme : notre système éducatif fabrique déjà une génération obsolète.
« Ce monde n’est pas pour les grosses feignasses », préviennent-ils d’entrée. Le ton est donné : il faudra travailler plus, apprendre sans cesse, et surtout, apprendre autrement.
L’université : un dinosaure face au tsunami technologique
Pour Alexandre et Babeau, l’enseignement supérieur, en dehors des quelques grandes écoles d’élite ou universités mondiales de référence, fonctionne comme si l’IA n’existait pas. À l’heure où les algorithmes surpassent déjà les médecins en diagnostic ou les étudiants en dissertation, nos facultés « continuent à former à des métiers qui n’existeront plus dans dix ans ». Ils évoquent, non sans ironie, le sort des détenteurs de masters en sociologie, promis à l’uberisation ou à la bureaucratie locale.
La situation serait d’autant plus dramatique que l’IA ne remplace pas seulement les cols blancs : demain, les robots humanoïdes concurrenceront jardiniers, ouvriers du bâtiment et aides-soignants. Elon Musk l’affirme : les robots chirurgiens seront plus compétents que les humains dès 2030.
Vers un monde à deux vitesses ?
Le livre pose une question de fond : souhaitons-nous une société où seuls les enfants des élites formés dans les meilleures universités sauront interagir avec les intelligences artificielles, pendant que les autres végèteront, inutiles, dépendants d’un revenu universel ? C’est le cauchemar d’un monde peuplé de « dieux » technophiles et de « useless », selon la formule d’Harari. Pour les deux auteurs, ce projet de société, fantasmé dans la Silicon Valley, est « moralement, philosophiquement et politiquement inacceptable ».
« L’humanité investit 2 900 milliards dans les data centers pour entraîner des cerveaux artificiels, mais rien pour éduquer les cerveaux humains », déplorent-ils.

Travailler plus, apprendre mieux… mais différemment
Loin de prôner l’ignorance, Ne faites plus d’études encourage l’apprentissage tout au long de la vie, la curiosité permanente, et surtout, la culture générale. Car selon eux, seule une solide formation humaniste permet de comprendre le monde, de dialoguer avec l’IA, et de s’adapter aux mutations à venir. L’histoire, en particulier, est présentée comme un socle indispensable à la prospective.
En revanche, les cursus figés, lents, sans lien avec le réel, doivent disparaître. L’université doit cesser de démissionner : il est inadmissible que 88 % des étudiants britanniques utilisent ChatGPT pendant les examens, avec la complicité passive des surveillants. L’enjeu est immense : préparer une jeunesse capable d’être complémentaire de l’intelligence artificielle, et non écrasée par elle.
La politique en retard, le système éducatif à refonder
Laurent Alexandre et Olivier Babeau pointent un autre scandale : le silence assourdissant de la classe politique française. Obsédée par la retraite des boomers, elle ignore l’école, la formation, la jeunesse. « Presque aucun ministre ne sait utiliser ChatGPT », dénoncent-ils. Le contraste est saisissant avec les États-Unis ou la Chine, qui investissent massivement dans l’IA et forment déjà leurs élites à ces enjeux.
Pour les auteurs, il ne reste qu’une génération pour sauver les cerveaux humains. Si rien n’est fait, la France risque une « gilet-jaunisation cognitive » de masse : une population marginalisée, inapte à produire, dépendante de l’État pour survivre. Mais tout n’est pas perdu. Une prise de conscience est encore possible, si des responsables courageux osent repenser radicalement l’éducation.
Ne faites plus d’études n’est pas un pamphlet contre le savoir, mais un appel à l’adaptation. Le monde change à une vitesse vertigineuse. Nos institutions, elles, dorment encore. En publiant cet ouvrage, Laurent Alexandre et Olivier Babeau cherchent à provoquer un réveil salutaire. Leur verdict est rude, mais leur espoir demeure : l’intelligence humaine peut encore rivaliser – à condition d’ouvrir les yeux, vite.
Laurent Alexandre et Olivier Babeau, Ne faites plus d’études, Buchet-Chastel, 304 pages, 21,50 €.
[cc] Article relu et corrigé (orthographe, syntaxe) par ChatGPT.