La tension ne retombe pas en Irlande du Nord, après plusieurs nuits de violences urbaines liées à des troubles communautaires à Ballymena, dans le comté d’Antrim. Point d’orgue de cette flambée de haine : l’attaque et l’incendie du Larne Leisure Centre, dans la nuit du mercredi 12 juin 2025, après des rumeurs selon lesquelles il aurait servi à héberger temporairement des familles déplacées, victimes d’intimidations.
Des familles déplacées… et désignées à la vindicte
À l’origine, plusieurs familles, dont une femme enceinte et cinq enfants, avaient été évacuées en urgence de Ballymena, théâtre de violences et abritées à titre provisoire dans le centre de loisirs de Larne. Mais une publication sur les réseaux sociaux du ministre des Communautés Gordon Lyons (DUP) a mis le feu aux poudres, au sens propre comme au figuré.
Le ministre unioniste, également député de la circonscription locale, y expliquait n’avoir pas été informé du transfert de ces familles dans le centre, et affirmait que toutes avaient depuis été relogées ailleurs. S’il appelait à la « protestation pacifique » et condamnait la violence, ses propos ont été jugés irresponsables et incendiaires par de nombreux élus.
A third night of disorder in Northern Ireland sees protests spread across the country.
After hearing that the suspects in the sexual attacks, family’s, had been moved into a leisure centre in the town of Larne, locals have attacked and set fire to the building. pic.twitter.com/17lhneraqi
— Tommy Robinson 🇬🇧 (@TRobinsonNewEra) June 11, 2025
Un incendie criminel, des condamnations… et une tempête politique
Quelques heures après la publication du message de Gordon Lyons, le centre de loisirs a été attaqué par un groupe de jeunes masqués, qui ont brisé des vitres et allumé un incendie. Aucun blessé n’est à déplorer, les familles ayant déjà quitté les lieux, mais les dégâts matériels sont considérables. La police nord-irlandaise (PSNI) et les pompiers sont intervenus rapidement, maîtrisant l’incendie dans la nuit.
La classe politique locale s’est emparée de l’affaire. Le comité des Communautés de l’Assemblée de Stormont a voté une motion de défiance contre Gordon Lyons, à l’initiative du député Sinn Féin Maolíosa McHugh, qui a dénoncé une « déclaration irresponsable dans un climat déjà explosif ».
Le SDLP et plusieurs élus de l’Alliance Party ou des Verts ont appelé à la démission du ministre, certains annonçant leur intention de le saisir au commissaire aux standards de l’Assemblée pour manquement à ses devoirs.
Gordon Lyons se défend
Invité de la BBC, Gordon Lyons s’est défendu d’avoir attisé les tensions : « Mon message visait justement à démentir des rumeurs erronées selon lesquelles les familles étaient toujours présentes dans le centre, pour dissuader les protestataires de s’y rendre. »
Il a dénoncé une tentative de récupération politique, tout en condamnant fermement les violences : « Ce qui s’est passé à Larne est honteux. C’est une attaque contre toute la population qui utilise ce centre. »
Mais ses explications ne convainquent pas ses détracteurs. Deirdre Hargey, ancienne ministre des Communautés, a fustigé son comportement sur X : « Son devoir était de protéger les familles déplacées, pas de désigner leur lieu d’hébergement d’urgence sur les réseaux sociaux. »
Trois nuits de violence à Ballymena et Larne
La situation fait suite à plusieurs nuits de troubles à Ballymena, avec jets de projectiles, cocktails Molotov, usage de canons à eau, et au moins 33 policiers blessés selon la PSNI. Sept personnes ont été arrêtées, et des responsables évoquent un climat d’extrême tension communautaire, sans confirmation d’une coordination paramilitaire pour l’instant.
Le Premier ministre britannique Keir Starmer a qualifié les événements de « violences insensées », tandis que le Secrétaire d’État à l’Irlande du Nord, Hilary Benn, a appelé le ministre à « réfléchir à ses propos ». Ce dernier lui a sèchement rétorqué qu’il devrait « se renseigner avant de commenter publiquement ».
Ce nouvel épisode rappelle combien la question communautaire reste sensible en Irlande du Nord, malgré les accords de paix. Dans certaines zones loyalistes, les tensions raciales s’ajoutent aux clivages confessionnels historiques, alimentant un climat explosif.
Des nouvelles manifestations sont annoncées, dans plusieurs bastions unionistes/loyalistes, pour les prochains jours. L’été s’annonce chaud..et les autorités ne semblent pas disposées à entendre la colère populaire.
21.35 Coleraine Northern Ireland 🇬🇧 anti immigration protesters have blocked the towns train line with burning bins 🔥 pic.twitter.com/w1gX4teGPw
— Batman (@51Batman) June 11, 2025
Ci-dessous, une déclaration de parents inquiets qui circule sur les réseaux sociaux :
Après les événements récents qui se sont produits ailleurs en Irlande du Nord, il est clair que le climat est tendu parmi les communautés populaires et ouvrières. Les préoccupations qui ont été exprimées à la police, aux groupes communautaires, à la NIHE, aux conseils municipaux, aux propriétaires et aux élus de ces communautés sont restées lettre morte et ont malheureusement dégénéré en violences qui touchent de nombreuses personnes dans les communautés les plus touchées. Nous croyons en notre droit démocratique de manifester et réaffirmons avec force notre souhait de voir se dérouler une manifestation pacifique et vertueuse à Portadown. Nous avons déjà entendu des déclarations dangereuses et incendiaires, telles que celles de John O’Dowd, qui sèment la peur parmi les familles locales qui travaillent dur et respectent la loi, ainsi que parmi ceux qui sont entrés légalement en Irlande du Nord avec le désir de suivre et de respecter nos valeurs, de s’intégrer dans la communauté et d’apporter une contribution positive réelle à notre société.Insinuer que des violences auront lieu et dénigrer des électeurs déjà rejetés qui ont des préoccupations réelles et sincères ne fait que renforcer les divisions et légitimer les mauvais acteurs déterminés à commettre des actes de violence et à nuire. Nos communautés accueillent depuis longtemps des familles et des individus désireux de contribuer à l’amélioration de notre société.
La plupart d’entre nous se sont liés d’amitié avec des voisins, des collègues de travail et des amis de différentes nationalités, dont beaucoup viennent de pays européens comme la Pologne, le Portugal, la Lituanie, la Hongrie et la Lettonie, ou d’Asie comme la Chine et les Philippines, qui ont une grande éthique de travail et des valeurs similaires à celles de notre société depuis plus de 20 ans.Cependant, ces dernières années, nous avons assisté à un afflux massif de pseudo-demandeurs d’asile criminels, non contrôlés, sans aucune intention de contribuer ou de respecter les valeurs quotidiennes de notre société.
Ils commettent des actes criminels, violents et sexuels, avec une perception déformée de la manière dont les femmes et les enfants doivent être traités. Nous avons également vu l’installation d’un foyer dont le seul but est de placer la lie de la société au cœur de notre centre-ville, rempli de pédophiles, de violeurs, de meurtriers, de toxicomanes et d’autres petits délinquants déversés ici depuis les prisons et d’autres villes d’Irlande du Nord. Ce foyer est ironiquement situé à quelques mètres seulement d’une crèche. Nous voyons des mendiants dans les rues, des dealers et des toxicomanes, des agressions contre des passants, des vols à l’étalage et des seringues usagées dans notre ville. Nous avons également constaté une augmentation sans précédent du nombre de logements multiples (HMO), dont le seul but est de satisfaire la cupidité de quelques personnes qui font pression sur les commissions d’urbanisme, rejetant les préoccupations des résidents vivant à proximité de ces bâtiments, qui s’inquiètent des comportements antisociaux, de la toxicomanie, de la prostitution, de la traite des êtres humains et des vols.
Nous avons également des gangs qui menacent la sécurité et l’apparence de notre ville, certains décentralisés, d’autres plus structurés, dont beaucoup sont ici illégalement, travaillant au noir dans des endroits tels que des stations de lavage de voitures et des salons de manucure, ou partageant des polices d’assurance et des permis de conduire pour travailler illégalement pour des entreprises de livraison de repas, ce qui finance davantage les chefs de ces gangs qui se livrent également au vol, à la prostitution, au blanchiment d’argent, à la traite des êtres humains, à la production et au trafic de drogue, à la fraude aux prestations sociales et à l’intimidation de la communauté. Ils financent des appartements de luxe dans des pays lointains des Balkans, grâce à une police et un système judiciaire défaillants qui ne tentent plus de mettre fin à ces activités.
La communauté a un sentiment de désespoir face à ce qui l’attend et appelle les pouvoirs publics à prendre leurs responsabilités et à écouter les préoccupations réelles concernant l’abandon de nos valeurs, la sécurité de nos femmes et de nos enfants, ainsi que les perspectives et les opportunités pour les générations futures.
Crédit photo : DR
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