L’amende infligée début décembre à la plateforme X par la Commission européenne, dans le cadre du Digital Services Act (DSA), a ravivé le débat sur la régulation du numérique en Europe. Officiellement, Bruxelles sanctionne un manquement aux obligations de transparence imposées aux grandes plateformes. Mais de nouveaux documents mettent en lumière un aspect moins connu du dossier : le rôle joué par les autorités américaines dans la conception même de ce cadre juridique aujourd’hui présenté comme strictement européen.
Une coopération transatlantique en amont du Digital Services Act
Contrairement à l’image d’une législation exclusivement élaborée à Bruxelles, le DSA s’inscrit dans un processus de concertation étroite entre l’Union européenne et les États-Unis, amorcé dès le début des années 2020. Des échanges réguliers ont eu lieu dans le cadre du Conseil du commerce et des technologies UE–États-Unis, une instance conjointe réunissant responsables politiques, régulateurs et administrations des deux côtés de l’Atlantique.
Au cœur de ces discussions figurait la question de la gouvernance des plateformes numériques, et plus précisément la lutte contre les contenus jugés « préjudiciables », la diffusion de fausses informations et l’accès aux données des utilisateurs par des acteurs tiers qualifiés de « chercheurs ».
L’accès aux données, point central du dispositif
L’un des piliers du DSA repose sur l’obligation faite aux plateformes de grande taille de donner accès à leurs données internes à des organismes de recherche agréés, afin d’évaluer les risques liés à la diffusion de certains contenus. C’est précisément sur ce point que X a été sanctionnée : la Commission européenne estime que la plateforme n’a pas respecté ces exigences, ce qui a conduit à une amende de 120 millions d’euros, assortie d’un ultimatum de mise en conformité.
Or, les documents révélés montrent que cette exigence d’accès aux données n’est pas une invention récente de Bruxelles. Elle figurait déjà parmi les priorités communes définies avec des représentants de l’administration américaine, notamment via des groupes de travail dédiés à la régulation des plateformes et à la gestion des contenus en ligne.
Des acteurs transnationaux au cœur de la régulation
Le système mis en place par le DSA repose largement sur un réseau d’organisations spécialisées dans l’analyse des contenus numériques, parfois désignées comme « observatoires » ou « centres de recherche contre la désinformation ». Ces structures, souvent issues du monde universitaire ou associatif, jouent un rôle clé dans l’identification de contenus problématiques et dans l’évaluation des pratiques des plateformes.
Une partie de ces organismes bénéficie de financements publics internationaux, notamment nord-américains, ce qui interroge sur l’indépendance réelle du dispositif et sur la circulation des normes entre États. Leur intégration au mécanisme européen confère à ces acteurs un pouvoir d’influence inédit sur la modération des contenus accessibles aux citoyens européens.
X, première plateforme étrangère sanctionnée
La plateforme détenue par Elon Musk est la première entreprise américaine à être lourdement sanctionnée dans le cadre du DSA. Dès l’entrée en vigueur du texte, elle avait été placée sous surveillance renforcée, dans un climat de tension croissante entre les institutions européennes et certaines entreprises technologiques étrangères.
Au-delà du cas X, cette affaire illustre un durcissement global de la régulation numérique, dans un contexte de rivalités géopolitiques, de débats sur la liberté d’expression et de méfiance accrue envers les grandes plateformes privées.
Si l’Union européenne revendique une autonomie stratégique en matière numérique, ces révélations rappellent que les grandes orientations du DSA sont le fruit d’une construction transatlantique, élaborée bien avant son adoption officielle. La continuité de ce cadre réglementaire, malgré les changements politiques à Washington, pose la question de la persistance d’une vision commune de la régulation de l’information en ligne.
Pour les plateformes concernées, comme pour les utilisateurs européens, l’enjeu dépasse la simple conformité juridique : il touche à la définition même de ce qui peut être dit, montré ou contesté dans l’espace numérique contemporain.
[cc] Article relu et corrigé (orthographe, syntaxe) par ChatGPT.