Dans un rapport sévère publié récemment la Chambre régionale des comptes pointe de multiples dysfonctionnements au sein de l’association CREHA Ouest, en charge du fichier de la demande locative sociale pour la Bretagne et les Pays de la Loire. De la gouvernance interne à la sécurité des données, en passant par les règles de financement et de mise en concurrence, peu d’aspects échappent à la critique.
Gouvernance floue et contrôle interne inexistant
Depuis 2022, l’association a modifié sa gouvernance pour associer davantage les collectivités et intercommunalités aux bailleurs. Mais en pratique, les réunions de l’assemblée générale et du conseil d’administration manquent de rigueur, et aucun contrôle interne formalisé n’est mis en œuvre. Des frais de déplacement ou d’usage de carte bancaire sont signalés comme mal encadrés. Une opacité préoccupante pour une structure qui gère près de 1,5 million d’euros par an.
La participation financière des EPCI et collectivités au fonctionnement de CREHA Ouest contrevient à l’article L. 441-2-6 du Code de la construction et de l’habitation : ceux-ci ont un droit d’accès au fichier, sans obligation de financement. Seules les entités souhaitant des fonctionnalités complémentaires devraient être facturées. Une confusion qui, selon la Chambre, pose un réel problème de légalité.
Marchés publics : des règles contournées
CREHA Ouest est assujettie au Code de la commande publique, mais ne respecte pas les règles de publicité et de mise en concurrence, notamment dans sa relation avec son principal prestataire informatique – un éditeur de logiciel qui capte à lui seul plus d’un million d’euros par an.
L’externalisation du système d’information n’a pas empêché des carences critiques : absence de cartographie du SI, pas de référent sécurité, gestion laxiste des accès utilisateurs (4 000 comptes actifs), droits d’accès non contrôlés, aucune suppression automatique ou formalisée des comptes, et un RGPD délégué à des prestataires sans pilotage interne. Autrement dit, la sécurité du fichier de la demande locative sociale est gravement compromise.
Un outil commun, mais des pratiques locales disparates
Le logiciel unique utilisé en Bretagne et Pays de la Loire respecte la réglementation, mais son usage inégal d’un territoire à l’autre empêche toute homogénéité dans l’accès au logement. En 2024, le délai moyen d’attribution est d’un an et demi, avec 28 % de demandeurs en « délai anormalement long », y compris parmi les publics prioritaires.
Par ailleurs, les primo-demandeurs non prioritaires, qui représentent 45 % des inscrits, n’accèdent qu’à 35 % des logements. L’inadéquation entre l’offre (30 % de petits logements) et la demande (47 % de petits logements souhaités) accentue les blocages.
Enfin, 30 % des offres sont refusées, souvent faute de préparation des dossiers, de suivi des demandes ou d’information claire des demandeurs. Un tiers des dossiers examinés en commission le sont en vain.
Un système à bout de souffle ?
Ce rapport confirme ce que de nombreux acteurs de terrain pressentaient : le système de gestion du logement social, s’il est unifié dans sa forme, reste profondément inégalitaire dans sa mise en œuvre. Et face à l’explosion des demandes, à la crise du logement et à la faible rotation du parc HLM, les ratés de CREHA Ouest risquent d’aggraver une situation déjà critique.
Illustration : DR
[cc] Article relu et corrigé (orthographe, syntaxe) par ChatGPT.
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