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Notre-Dame-des-Landes : une justice parallèle à l’intérieur de la ZAD ?

Ce mardi 22 janvier trois personnes ont été interpellées sur la ZAD et des perquisitions faites au Moulin et au Rosier – ce dernier est d’ailleurs le squat le plus ancien de la ZAD ; deux autres l’ont été hors de la ZAD. Ces personnes, quatre hommes et une femme, sont en garde à vue pour règlement de comptes avec séquestration en bande organisée et risquent, si les faits sont avérés, jusqu’à dix ans de prison.

Ces interpellations font suite au tabassage d’un zadiste à la Gaieté le 20 mars dernier et à son abandon devant le CHS de Blain, sur fond de dissensions entre zadistes au sujet de la réouverture de la RD281 – il était le chef de file des douze irréductibles qui ont dégradé la route en cours de réparation, mais aussi d’une séquestration à la ZAD en octobre 2018.

Les personnes interpellées sont proches du CMDO, un groupuscule de zadistes qui a accaparé le pouvoir sur la ZAD, la communication (groupe presse, accueil de la ZAD), éjecté les opposants, parfois de manière violente, et pour finir s’est légalisé en déposant des projets en Préfecture.

En revanche ils n’ont pas réussi à reprendre la radio pirate (klaxon) aux mains des Irréductibles – elle a d’abord cessé d’émettre cet automne avec un communiqué cinglant, puis son matériel a été « kidnappé » par ses créateurs il y a quelques jours : « Klaxon s’est barré parce que Klaxon a subi des pressions. Klaxon était en passe de perdre sa neutralité. Klaxon a choisi l’extinction plutôt que la récupération », résume un zadiste.

Un « conflit de voisinage » à coups de barres de fer

Si l’association NDDL poursuivre ensemble et la Maison du Peuple de Saint-Nazaire ont annoncé soutenir les interpellés, qui faisaient partie de ceux qui avaient déposé des projets en préfecture, d’autres zadistes opposés aux « apellistes » règlent leurs comptes : « ce sont ces mêmes personnes qui ont permis à “l’état de droit” de pénétrer et de s’installer sur la ZAD, ce même “état de droit” qui vient les chercher […] Ce sont ces gens qui se sont laissés pousser des ailes autoritaires pour réduire au silence ou faire disparaitre ceux qui sont facilement décrit comme toxique, dangereux ou malade. L’état est venu leur montrer qu’ils n’avaient pas la palme de l’autoritarisme ».

NDDL Poursuivre Ensemble, très proche des personnes qui ont déposé un projet en préfecture, s’est fendue d’un communiqué pour « s’étonner de cette nouvelle montée en épingle d’un simple conflit de voisinage qui appartient au passé. Les personnes arrêtées sont impliquées depuis le début dans des projets reconnus et validés par les services de l’état ».

Si la victime du tabassage du 20 mars n’avait pas coopéré avec la « justice bourgeoise », celle-ci s’est saisie de son cas toute seule et il avait été interrogé lors de son passage à l’hôpital.

Pour les soutiens – relativement rares, mais qui font partie des « gros bonnets » de la ZAD ou de leurs soutiens, « les personnes arrêtées sur la zad ce matin ont été engagées de longue date dans le mouvement anti-aéroport, sont intégrées dans les diverses activités, liens de voisinages et de solidarité locale, et vivent ici depuis plusieurs années ». Pour le fonds de dotation lancé par les zadistes cependant, la nouvelle tombe au plus mal.

Deux séquestrations et tabassages reprochés aux interpellés en huit mois

Un autre communiqué de zadistes plus proches des « irréductibles » revient sur deux règlements de comptes récents sur la ZAD reprochés aux inculpés : « oui, des comptes se sont “réglés” sur la zone […] Pour les affaires les plus récentes : – [le 20] mars 2018, séquestration et tabassage en règle : au petit matin, muni de gaz, de masques et de matraques, un groupe (commando ?) débarque dans un lieu de vie [la Gaieté], kidnappe et tabasse une personne (membres inférieurs et supérieurs brisés) et le laisse pour mort aux abords d’un hôpital psychiatrique [à Blain]. Pas de plainte déposée mais le parquet s’en saisi. Une autre affaire de séquestration a eu lieu à l’automne 2018 [en octobre] : un individu, chassé à travers la ZAD par un groupe, tabassé dans les bois, mis dans un coffre puis déposé en périphérie de Rennes a fini à l’hôpital. Plainte déposée avec identification ».

Le communiqué enfonce le clou : « Dans ces deux cas, ces expéditions punitives trouvent souvent des justifications (ou, à demi-mots) : divergences politiques, stratégiques, conflits interpersonnels et tentatives d’éviction », et ce même si les victimes sont qualifiées publiquement de « dealers », « toxicos », « individus dangereux » ou de « violeurs ».

Un zadiste, qui s’est fait détruire son pare-brise de nuit car il a accueilli dans sa cabane l’individu qui allait finalement être tabassé le 20 mars dernier renchérit en commentaire : « Où est le mensonge de lister les justifications qu’on a pu entendre pour “expliquer” des opérations de police typiquement faschistes. Celles qu’on a pu voir sur la ZAD de la part des “habitant.e.s” qui voulait négocier tranquillou leur petit lopin de terre, et que les autres dégagent pour pas géner la négoce ?Foutre des gens dans des coffres, les tabasser, menacer pendant les AGs celleux qui rentraient pas dans la ligne du parti pas si imaginaire ? ».

D’autres séquestrations ont eu lieu sur la ZAD, les auteurs courent toujours

D’après certains zadistes, d’autres séquestrations et tabassages ont eu lieu sur la ZAD, depuis 2013. Notamment liées au trafic de drogue : « les violences inévitables inhérentes a cette activité ont déja produites au moins 5 victimes civiles, retrouvées larguées devant l’hôpital de Nantes polytraumatisées, la derniere il y a quelques semaines », expliquait ainsi un zadiste en novembre 2018.

D’ailleurs un zadiste remet le sujet sur le métier : « Il y a eu d’autres séquestrations, d’autres personnes abandonnées les membres rompus, devant le CHU ou des gendarmeries, et ceux là, rien? ». En octobre 2016, un zadiste âgé de 46 ans avait été tabassé et déposé nu à Saint-Étienne-de-Montluc, mais n’a pas souhaité donner de détails sur son agression tant à Saint-Étienne-de-Montluc qu’au CHU de Nantes où il a été transporté.

Il est possible que ces dernières interpellations sur la ZAD relancent les investigations suite à ces diverses agressions, appelées « coffrages » par les zadistes. Ils faisaient d’ailleurs partie de l’attirail de la justice parallèle du « cycle des 12 », comme en témoigne un ancien membre actif en 2015 : « Si Alice propose de foutre Bob-le-dealer dans le coffre d’une bagnole et de le lâcher un trou perdu de la Mayenne parce qu’il se faisait de la thune en vendant de la came, comment Clara peut dire qu’elle est pas d’accord si la réponse qu’elle prend dans les dents c’est “on a établi un consensus, ‘pas de deal pour du profit personnel sur la zone’, si t’es pas contente t’avais qu’a être là le jour où on l’a décidé” ? ».

Quant au présumé violeur du week-end du 10 février 2018 sur la ZAD, il court toujours…

Émilie Lambert

Crédit photos : DR
[cc] Breizh-info.com, 2019, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine

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