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Pour bien tourner la page du coronavirus, tout réinventer.

J’ai trouvé ce lundi de Pâques interminable. Pour seule distraction, la marche individuelle autorisée, munie de l’attestation réglementaire  et ce pour tourner autour de mon domicile dans  la limite du kilomètre requis.  Ce qui pour moi se ramène à quitter le lotissement, gagner le chemin des vignes et après avoir dépassé la « mare aux grenouilles »  faire le tour d’un arpent de campagne qui se remet juste de la taille brutale d’un agriculteur pressé. Les quelques bosquets commencent juste à retrouver leur dignité grâce à la poussée printanière. Du vert, beaucoup de vert et sous le soleil, cela devrait me mettre le cœur en joie. Mais ce lundi- là, une prédisposition à la morosité ne voulait pas lâcher prise.

J’étais seule dans cette campagne encore mutilée et j’aurais dû me réjouir de ne pas faire trop de rencontres, de ne pas avoir à mettre ma santé et celle des autres en danger. Sur le moment, je n’ai pas pris en compte cette donnée et c’est le cafard qui m’a fait ressentir vivement l’absence de rencontres. Je dois le reconnaître mes concitoyens et les échanges quotidiens et courants d’avant me manquent. J’ai besoin d’un sourire, de quelques banalités entre deux portes ou au hasard d’un sentier. Ce lundi-là, rien. Seuls le vent et le chant des oiseaux mais je n’avais pas l’ouïe assez  fine sur l’instant pour qu’ils me pénètrent et réussissent à éloigner mes sombres pensées.

Tout le long de ma marche, je n’arrivais pas à me dégager des inquiétudes, des interrogations qui nous taraudent tous. Instaurer une bonne discipline, de bonnes règles de vie pour résister, nous en savons tous l’importance, l’exigence. Mais, une fois le choc encaissé, le temps est long et s’écoule de façon bien répétitive. Je n’oublie pas la situation des jeunes parents et je sais bien que les cas sont multiples et variés et l’inquiétude toujours en embuscade.

L’attente, en marchant dans cette campagne de proximité qui n’offre pas la variété des marais ou autres « prés humides » que j’aime tant, me paraît interminable. Mais, je me dois d’être respectueuse, et les sentiers des marais sont à la fois trop éloignés de mon domicile et aussi un peu trop fréquentés. Alors, tout au long de ma marche, je fixe mes pensées sur cette allocution du président de la République, des annonces importantes sans doute, et impossible pour moi de me détacher de l’anxiété qu’elles suscitent.

Bien sûr, il est ridicule de s’appesantir sur  le besoin de retrouver toute la famille. Les contacts téléphoniques ne manquent pas, quelques vidéos aussi, alors pourquoi se plaindre. Simplement, peut-être, parce-ce  qu’il faut un terme aux privations, aux contraintes. Nos générations se sont construites, épanouies, leurrées aussi sur la notion bien « fragile » de liberté à tout prix. Et, brutalement, plus rien n’est possible. Alors que nous avions le monde à portée de main, on nous demande de nous cantonner, de nous limiter, et ce dans un temps encore illimité.

L’allocution à attendre et son cortège de « fuites » qui nous fragilisent avant d’être commentées puis quelquefois démenties. Chacun y va de sa source confirmée, validée. Je rentre de cette marche, encore quelques heures à tuer.

Quelques jours ont passé, et comme tout un chacun je m’adapte. Cependant, mon attention s’est fixé tout particulièrement sur ce passage du discours : « Il y a dans cette crise une chance » en appelant chacun à se réinventer, « Moi le premier » a-t-il martelé.

 Se réinventer, cela fait écho. Toute gamine, quand je courrais les coteaux, par tous les temps, souvent pour échapper à une morne réalité, je me racontais des histoires, je recomposais mon quotidien en inventant des situations, des scenarii et ainsi je me libérais de toutes mes tensions. Héroïne de mes propres récits, je devenais la meilleure, la plus forte, je pouvais exprimer tout ce que je ressentais, me libérer de toutes les contraintes. Je maîtrisais enfin mon monde.

Cette notion d’inventer, de réinventer mon quotidien, n’était pas perçue de façon positive par tous. Cette liberté était pure construction intellectuelle,  L’interprétation de ma marraine, de la sœur directrice de l’école de mon village, bien loin de l’indulgence et de l’empathie pour une gamine rêveuse, s’attardait beaucoup plus à dénoncer une attitude qui frisait l’insolence, la désobéissance à  l’ordre moral. Une fois, j’ai dû recopier la définition du verbe inventer et en développer tous les sens. Je les précise :

Inventer : Créer ou découvrir quelque chose de nouveau, innover… Imaginer de façon arbitraire, sans respecter la vérité, la réalité.

Et dans les années 60, entre l’église et la société bien-pensante du bourg , c’était le pire péché dont pouvait se rendre coupable une élève de l’école chrétienne.

Alors, sincèrement, aujourd’hui, à mon âge, et dans un tel contexte, je peux dire que j’ai pleinement conscience de l’importance  de se réinventer, de tout mettre à plat, et d’essayer au mieux de se sortir de cette galère en inventant un monde meilleur. Hélas, je le crains, pour y arriver nous verserons tous des larmes.

Anne MESDON      

Crédit photo : Wawaldino/Wikimedia (cc)
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