Le 8 septembre 2024, huit députés chiliens issus de divers horizons politiques — de la gauche à la droite — ont signé une lettre dans le quotidien El Mercurio pour appeler à l’abolition de la gestation pour autrui (GPA). Leur initiative a été notamment motivée par le témoignage bouleversant d’Olivia Maurel, une jeune femme française de 32 ans, née d’une GPA, qui milite désormais activement pour l’interdiction mondiale de cette pratique à travers la Déclaration de Casablanca. Son récit personnel met en lumière les conséquences émotionnelles et psychologiques que la GPA peut avoir sur les enfants, les mères porteuses, et même les familles commanditaires.
Le témoignage d’Olivia Maurel : entre douleur et quête d’identité
Olivia Maurel, influenceuse et mère de trois enfants, a grandi en France dans une famille qui ne lui a jamais révélé qu’elle était née d’une mère porteuse. En apparence, elle a eu une enfance confortable sur le plan matériel, mais un sentiment d’inconfort profond l’a toujours accompagnée. Dès son plus jeune âge, elle a senti qu’elle était différente, sans pouvoir vraiment comprendre pourquoi. « J’ai toujours eu l’intuition que j’étais venue au monde par une autre mère », raconte-t-elle dans une interview à El Mercurio.
Cette confusion a mené à des crises d’identité pendant son enfance et son adolescence. Olivia explique qu’elle se sentait distante de sa mère adoptive, qu’elle considérait comme « étrangère ». Cette relation difficile, combinée à des problèmes de confiance envers les autres et un profond sentiment d’abandon, l’a poussée à des comportements destructeurs, y compris des tentatives de suicide. Diagnostiquée avec un trouble bipolaire, elle a également été victime d’agressions sexuelles à l’adolescence.
À 17 ans, Olivia a décidé de suivre son instinct et a commencé à enquêter sur ses origines. En effectuant des recherches sur Internet, elle a découvert que plusieurs agences de GPA opéraient dans l’État du Kentucky, où elle était née. À l’âge de 30 ans, elle a enfin obtenu la confirmation qu’elle recherchait : un test ADN a prouvé qu’elle était née par gestation pour autrui.
Aujourd’hui, Olivia milite pour l’abolition totale de cette pratique qu’elle juge profondément injuste et inhumaine. Elle raconte son histoire sur les réseaux sociaux, notamment sur TikTok, où ses vidéos touchent près de 900 000 personnes. Elle dénonce les conséquences de la GPA sur les enfants, les mères porteuses et la société dans son ensemble.
Qu’est-ce que la gestation pour autrui (GPA) ?
La GPA, également appelée maternité de substitution, est une pratique dans laquelle une femme porte un enfant pour le compte d’un autre couple ou d’une personne, souvent appelée les « parents d’intention ». Elle peut être réalisée de manière altruiste, où la mère porteuse ne reçoit qu’un dédommagement pour ses frais, ou de manière commerciale, où elle est rémunérée pour le service rendu.
Dans un cadre juridique, la GPA est encadrée de manière différente selon les pays. En France, elle est interdite depuis la loi de 1994 relative au respect du corps humain, qui stipule que le corps ne peut faire l’objet d’un contrat marchand. D’autres pays, comme certains États américains ou l’Inde, permettent la GPA dans un cadre commercial, tandis que d’autres comme le Canada ou le Royaume-Uni l’autorisent dans un cadre strictement altruiste .
Les dangers et dérives de la GPA
La GPA soulève de nombreuses questions éthiques et légales.
1. La marchandisation du corps des femmes
L’un des principaux dangers de la GPA est qu’elle transforme le corps des femmes en simple « instrument » de reproduction. Dans les pays où la GPA commerciale est légalisée, les mères porteuses sont souvent issues de milieux défavorisés et sont rémunérées pour porter un enfant pour des parents riches, créant ainsi une forme d’exploitation économique. Les féministes dénoncent cette marchandisation du corps féminin et craignent que, sous couvert d’altruisme, la GPA cache une exploitation financière des femmes les plus vulnérables .
2. Les impacts psychologiques sur les mères porteuses et les enfants
Les mères porteuses peuvent développer un attachement à l’enfant qu’elles portent, rendant difficile la séparation après la naissance. De plus, elles peuvent être soumises à une pression psychologique intense pendant la grossesse, sachant qu’elles n’ont pas le droit de garder l’enfant, même si elles le désirent.
Du côté des enfants, comme en témoigne Olivia Maurel, être né d’une GPA peut provoquer des crises d’identité et des sentiments d’abandon. Olivia explique qu’elle a longtemps souffert de ne pas savoir qui était sa mère biologique, ce qui a eu un impact profond sur son développement émotionnel et mental. De plus, elle estime que beaucoup d’enfants nés de GPA développent des troubles identitaires similaires, et souffrent de dépression, d’anxiété ou de problèmes de confiance en eux .
3. Le droit à connaître ses origines
La Convention internationale des droits de l’enfant stipule que tout enfant a le droit de connaître ses parents biologiques. Or, dans de nombreuses situations de GPA, l’enfant n’a pas accès à ces informations, ce qui constitue une violation de ce droit fondamental. Les enfants nés par GPA sont souvent coupés de leur histoire biologique, créant un vide émotionnel qui peut avoir des conséquences durables .
4. Le risque de dérives eugénistes
Un autre danger soulevé par la GPA est la tentation de « choisir » certaines caractéristiques génétiques chez l’enfant. Dans certaines cliniques, il est possible de sélectionner les donneurs d’ovules en fonction de critères comme la couleur des cheveux ou des yeux, ce qui soulève des inquiétudes quant à des dérives eugénistes. Cette pratique pourrait aboutir à la création d’enfants « sur mesure », sélectionnés pour répondre aux attentes esthétiques ou intellectuelles des parents d’intention .
Un appel à l’abolition internationale
C’est dans ce contexte que des figures comme Olivia Maurel, ainsi que des députés et militants à travers le monde, appellent à l’interdiction totale de la GPA. La lettre signée par les huit députés chiliens souligne l’importance de lutter contre cette pratique au niveau national, mais aussi international, en s’inspirant de la lutte historique contre l’esclavage. Les signataires espèrent que le Chili, déjà pionnier dans la protection des droits humains, jouera un rôle clé dans ce combat.
Pour Olivia Maurel, l’abolition de la GPA est une cause personnelle et universelle. Elle estime qu’aucun enfant ne devrait être « commandé » ou « acheté », et que le droit à connaître ses origines et à grandir dans un environnement aimant et stable est fondamental. Sa voix, et celle de nombreux autres militants, résonne aujourd’hui pour alerter sur les dangers et dérives d’une pratique qui, bien qu’elle puisse offrir de l’espoir à certains, peut aussi causer de la douleur à ceux qui en sont les produits.
La gestation pour autrui est une pratique controversée qui soulève des questions éthiques complexes. Si elle est perçue par certains comme un moyen de réaliser le rêve de devenir parent, elle peut entraîner des conséquences émotionnelles, psychologiques et éthiques graves pour les mères porteuses, les enfants et les familles concernées. Le témoignage d’Olivia Maurel met en lumière les dangers de cette pratique, tandis que l’appel des députés chiliens nous rappelle que le débat sur la GPA est loin d’être clos.
Lettre signée par 8 députés chiliens de 8 partis différents, publiée dans El Mercurio le 8 septembre 2024 (texte original en espagnol ci-dessous)
Monsieur le Directeur
Suite au témoignage d’Olivia Maurel dans les reportages de « El Mercurio » dimanche dernier, concernant son expérience de fille née par gestation pour autrui, il convient de réfléchir sur ce fait qu’Olivia et sa mère ont été traitées comme des choses, le caractère onéreux du contrat étant sans importance ici. En fin de compte, la GPA commerciale comme la GPA dite altruiste aboutissent au même résultat : l’instrumentalisation de la femme et de l’enfant pour satisfaire les désirs de tiers. Et certains d’entre eux dans un but lucratif, puisque la maternité de substitution altruiste est en effet devenue un déguisement pour ce marché asservissant. Il suffit de voir les cliniques qui opèrent derrière tout cela et qui profitent de cette tragédie, sans se soucier, encore une fois, de la mère ou de l’enfant.
C’est pourquoi la gestation pour autrui est contraire aux principes fondamentaux du droit international, également en vigueur au Chili, comme l’intérêt supérieur de l’enfant et le droit à la connaissance de ses origines.
Le Chili a été un pionnier dans l’abolition de l’esclavage, nous espérons qu’il ne restera pas à la traîne dans ce combat, tout aussi important, voire plus, et qu’il rattrapera le temps perdu non seulement avec une législation abolitionniste, mais aussi en menant ce combat au niveau national et international. Ceux d’entre nous qui signent cette lettre sont la preuve qu’il existe une opportunité ».
Crédit photo : DR (photo d’illustration)
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2 réponses à “L’appel de députés chiliens contre la Gestation Pour Autrui (GPA) : Le témoignage poignant d’Olivia Maurel et les dangers de cette pratique controversée”
Mère porteuse = vendeuse
Mère « d’intention » = acheteuse
Bébé = produit
Donc l’eugénisme suit naturellement la GPA.
L’adoption de la loi taubira de 2013 débouchera sur la légalisation de la GPA.
D’ailleurs, certains se vantent d’y avoir eu recours et rien ne se passe.
quand le désir d’enfant n’est pas satisfait, que l’adoption est quasiment impossible, comment faire quand un des deux du couple est stérile ?