Une récente enquête d’opinion révèle qu’une majorité d’électeurs d’Irlande du Nord souhaiterait voir la langue irlandaise (Gaeilge) bénéficier d’un statut officiel équivalent à celui du gallois au pays de Galles et du gaélique écossais en Écosse. Un résultat révélateur de la fracture culturelle et politique persistante entre nationalistes et unionistes.
Plus d’un Nord-Irlandais sur deux favorable à la reconnaissance pleine de l’irlandais
Selon un sondage réalisé par Lucid Talk pour le Belfast Telegraph, 55 % des sondés estiment que l’irlandais devrait obtenir un statut linguistique équivalent à celui du gallois et du gaélique. En revanche, 39 % s’y opposent, tandis que 6 % se disent indécis.
L’étude montre un soutien quasi unanime du côté nationaliste, avec 97 % des partisans du Sinn Féin ou du SDLP favorables à la mesure. À l’inverse, le rejet est massif dans le camp unioniste : 83 % s’y déclarent opposés, et seulement 11 % se disent prêts à reconnaître un tel statut à la langue irlandaise.
Parmi les unionistes, les nuances sont notables :
- 30 % des électeurs de l’UUP (Ulster Unionist Party) se disent favorables à la reconnaissance,
- contre 5 % seulement chez les partisans du DUP,
- et 1 % du côté du TUV, la formation la plus intransigeante.
Le sondage met également en lumière une fracture générationnelle :
- 64 % des 18-34 ans et 63 % des 35-44 ans soutiennent la reconnaissance de l’irlandais,
- un taux qui chute à 45 % chez les 45-54 ans,
- et à 43 % chez les 55-64 ans.
Fait notable, 55 % des plus de 65 ans se déclarent eux aussi favorables — signe que le soutien à la langue dépasse parfois les clivages d’âge.
La classe moyenne se montre plus ouverte (64 % pour, 31 % contre) que les classes populaires (49 % pour, 46 % contre), un écart qui reflète sans doute la différence d’accès à l’éducation bilingue et aux programmes culturels liés à la langue.
Un débat au cœur de la question identitaire nord-irlandaise
Depuis la création du Parlement gallois en 1999, le gallois bénéficie d’un statut officiel, avec une production législative bilingue et une présence systématique dans l’administration. En Écosse, la loi linguistique adoptée en 2024 a également reconnu le gaélique et le scots comme langues nationales, encouragées dans l’éducation et les médias.
En Irlande du Nord, en revanche, la loi de 2022 sur l’identité et la langue s’était limitée à une reconnaissance symbolique du gaélique (et de l’Ulster Scot), sans lui accorder un statut juridique comparable. C’est précisément ce “retard” que les partisans de la Gaeilge souhaitent combler, soutenus par le mouvement culturel Conradh na Gaeilge et plusieurs élus nationalistes.
Son président, Ciarán Mac Giolla Bhéin, s’est félicité récemment de l’adoption d’une stratégie linguistique à Belfast, première capitale nord-irlandaise à intégrer un plan de promotion de l’irlandais dans ses institutions locales.
Le symbole d’une Irlande du Nord en recomposition
Pour les partisans de l’union avec Dublin, la reconnaissance pleine de la langue irlandaise constituerait une avancée historique vers une Irlande plus unie culturellement. Mais pour les unionistes, il s’agit au contraire d’un cheval de Troie politique, destiné à renforcer l’identité républicaine et à marginaliser la culture britannique en Ulster.
Le sondage confirme ainsi le fossé identitaire persistant entre les deux communautés : l’irlandais demeure, pour beaucoup, plus qu’une langue — un drapeau. Dans un contexte où les tensions culturelles se superposent aux divisions politiques sur l’avenir de l’Union, le débat linguistique prend des allures de bataille symbolique pour l’âme de l’Ulster.
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