D’habitude, les élections municipales à Brest se déroulaient sans difficulté. Il y avait la liste conduite par François Cuillandre (PS) et les autres qui faisaient de la figuration. Mais, en 2026, Cuillandre prend sa retraite. Pour l’instant, deux adjoints se verraient bien s’installer dans son fauteuil.
Certes les prochaines élections municipales auront lieu en mars 2026, mais la pré-campagne a déjà démarré. Dans le cas de Brest, la question est simple et compliquée à la fois pour les socialistes : désigner un successeur à François Cuillandre (PS). En effet ce dernier n’a pas l’intention de briguer un cinquième mandat de maire. A la question « quel est son candidat idéal au PS ? », il ne répond pas clairement : « Il n’y a pas de candidat idéal. Ce qui fait la force de la gauche à Brest depuis 1989, c’est l’esprit d’équipe et d’union, au-delà de savoir qui mène la liste. Je n’aurai pas d’héritier. Je voterai en mon âme et conscience. » Différentes formules sont possibles : « Accessoirement, on peut être candidat sans être tête de liste. Il y a une réflexion qui va être engagée au sein du PS, et puis au sein de l’équipe municipale. » (Le Télégramme, Brest, mercredi 25 septembre 2024)
Pour l’instant, chez les socialistes, deux noms se dégagent. En premier lieu apparaît Yann Guével, adjoint aux finances et vice-président de Brest Métropole. Ses propos sont prudents et pédagogiques : « Est-ce que je serai candidat à la candidature ? Je ne sais pas. C’est une décision qui se réfléchit à plusieurs, et avec une équipe. François Cuillandre a toujours dit qu’il ne désignera pas d’héritier. Donc, il soutiendra celle ou celui qui aura été désigné par nos camarades. Au Parti socialiste, on a nos modalités internes. Le moment venu, il y aura un appel à candidature pour devenir le premier des socialistes. Et ensuite, il y aura une négociation avec les partis partenaires. » (Le Télégramme, Brest, jeudi 26 octobre 2023) Son image : sérieux et compétent.
Mais il faut compter avec un autre poids lourds du conseil municipal et du conseil métropolitain : Yohann Nédélec. On observe que, dans les deux assemblées, « François Cuillandre redonne volontiers la parole à son lieutenant pour riposter à la cheffe de l’oppostion Bernadette Malgorn, et on peut même voir le maire et son adjoint en terrasse le dimanche sur le marché » (Le Télégramme, Brest, vendredi 6 septembre 2024) Voilà des petits détails qui en disent davantage que de longs discours. Parfois le « petit détail » peut même prendre la forme d’un gros visuel – en l’occurrence une photo sur cinq colonnes qui nous montre les deux hommes sur le chantier du tramway avec des « regards complices » (sic). Il paraît que Yohann Nédélec ne manque pas « d’envie et d’ambition ». « A ses proches, il laisse entendre que, en 2026, il ira dans tous les cas. » (Le Télégramme, Brest, vendredi 6 septembre 2024) Et comme Nédélec a l’oreille de la direction actuelle du parti à Paris, certains considèrent qu’il est le mieux placé au PS… La centralisation existe dans tous les partis !
Que pensent de tout cela les alliés ? Pour les communistes, « l’idée est celle d’une union, la plus large possible sur une base programmatique.» « Au PC, on va désigner un chef de file pour mener ce travail programmatique et discuter avec tous les partenaires », explique Eric Guellec, président du groupe au conseil municipal. « Entre groupes de la majorité, on doit mettre tout sur la table, et réinterroger sur la l’opportunité d’une police municipale. Il ne doit pas y avoir de sujet tabou », poursuit-il (Le Télégramme, Brest, mercredi 9 octobre 2024)
Les écolos jouent la carte LFI
Pour les écologistes, la grande préoccupation demeure le premier tour ; selon eux, toutes les composantes de la gauche, y compris les Insoumis, doivent s’unir dès le départ. « J’ai conscience que les conditions pour réussir une grande liste unique, progressiste, aux municipales sont difficiles à réunir, mais ce serait la formule idéale pour permettre de rassembler le plus rapidement possible, et lancer une forte dynamique qui porte à nouveau la gauche aux responsabilités à Brest. Il faut bien mesurer que le moment politique n’est plus le même. On n’a jamais eu un Rassemblement national à 30 % dans le pays ! Si, demain, le RN dépasse 10 % à Brest, il entre au conseil municipal, et disposera d’une tribune pour six ans. Ce n’est pas anodin », commente Glen Dissaux, le président des écologistes brestois (Le Télégramme, Brest, jeudi 26 septembre 2014) A la vérité, les écolos comptent beaucoup sur l’appui des Insoumis pour négocier en position de force face au PS. A deux, ils seront plus forts pour s’opposer à l’hégémonie des socialistes. On peut ajouter que, liste unique à gauche dès le premier tour ou pas, si la liste présentée fait par le RN obtient 10 % des suffrages, elle obtiendra des élus. Au grand désespoir de Glen Dissaux !
Un autre son de cloche existe au sein de la majorité municipale : celui de Fortuné Pellicano (PRG-Le Centre gauche). « Je le dis clairement : si demain, on doit transposer le NFP au plan local lors des prochaines municipales, ce sera sans nous. Je rappelle que les Insoumis locaux n’ont pas appelé à voter pour la liste de François Cuillandre aux dernières municipales », souligne-t-il. Sa fermeté prend même la forme d’une menace : « On sera présent à cette élection. Et s’il s’agit de marquer une différence avec nos partenaires historiques de la gauche oublieuse des valeurs qui nous unissent, nous le ferons. En prenant nos responsabilités, comme on l’a fait aux dernières européennes. » (Le Télégramme, Brest, mardi 8 octobre 2024)
Rappelons les chiffres des élections municipales de juin 2020. Au premier tour, la liste de François Cuillandre (« Brest au cœur ! ») arrive en tête (8 146 voix, 26,54 %). Celle des écolos (« Brest écologie solidarités », Ronan Pichon) occupe la troisième place (4 831 voix, 15,74 %). En sixième position, on trouve la liste des Insoumis (« Brest à venir ! », Pierre-Yves Cadalen) qui se contente de 2 189 voix (7,13 %). Au second tour, François Cuillandre l’emporte facilement (12 628 voix, 49,70 %, 42 élus), devançant la liste de droite (« Brest, c’est vous ! », Bernadette Malgorn, 9 253 voix, 36,41 %, 10 élus) et la liste macroniste (« Marchons pour Brest ! », Marc Coatanéa, 3 530 voix, 13,89 %, 3 élus). « C’est un résultat confortable », analyse à chaud François Cuillandre qui aurait néanmoins préféré « dépasser la barre symbolique des 50 % » (Ouest-France, Finistère, lundi 29 juin 2020) Il aurait pu ajouter qu’il n’est pas parvenu à récupérer l’ensemble des voix de gauche du premier tour (15 166 suffrages) et que l’abstention atteint 68,04 %. Seule la victoire est jolie : François Cuillandre va donc commencer son quatrième mandat de maire.
Bernard Morvan
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