L’antispécisme contre les droits de l’homme

Depuis la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, l’interprétation des droits de l’homme a évolué et révèle un bouleversement profond de la conception de la dignité humaine. Aux droits de 1948, selon la nature humaine, ont succédé des prétendus droits niant cette nature, comme l’avortement. Ensuite, une nouvelle génération de droits prétend transformer la nature humaine, par exemple les pratiques eugéniques. Aujourd’hui, c’est une autre attaque contre les droits de l’homme qui émerge : celle de l’antispécisme.

Cette idéologie va plus loin qu’une négation ou transformation de la dignité humaine. Elle s’oppose aux droits de l’homme, en ce qu’ils sont fondés sur une dignité propre de l’homme. Le philosophe antispéciste Peter Singer résume ainsi : « Nous ne pouvons pas […] dire que tous les êtres humains ont des droits au seul motif de leur appartenance à l’espèce des Homo sapiens – une telle position est […] une position spéciste, c’est-à-dire qu’il s’agit d’une forme de favoritisme à notre égard qui est aussi injustifiable que le racisme ».

Pour mieux comprendre cette idéologie, nous vous proposons d’écouter l’interview sur RCF du journaliste Paul Sugy, auteur d’un récent ouvrage sur ce sujet :

L’antispécisme réduit l’homme à sa dimension biologique, partagée avec les animaux. Il ne voit en l’homme que son « animalité » et ignore ce qu’il a de proprement humain, c’est-à-dire sa nature spirituelle. Il n’existerait pas de dignité proprement humaine ; ce qui compte serait de maximiser le « bonheur » sur le plan strictement biologique, notamment en supprimant la souffrance. De graves enjeux moraux découlent de cette vision : par exemple, l’euthanasie d’une personne handicapée se justifierait autant moralement que celle d’un animal malade.

Derrière la revendication de « droits des animaux », c’est ainsi parfois un véritable bouleversement anthropologique qui se cache. Mettre en garde contre ce danger ne revient pas à justifier la cruauté ou la maltraitance envers les animaux. Il est important de protéger ceux-ci contre de tels traitements, en complétant la règlementation lorsque cela est nécessaire, par exemple sur l’élevage. Les animaux sont alors protégés en tant qu’objet de droits, et sans qu’il y ait besoin de les personnifier en tant que

L’antispécisme a déjà des traductions juridiques, en droit positif. À titre d’illustration, un tribunal argentin a par exemple déclaré en 2015 qu’un orang-outan était « une personne non humaine ». Le raisonnement du tribunal était fondé sur une négation de la différence de nature entre l’homme et les autres animaux, ainsi que de la supériorité du premier sur les seconds. Autre exemple, européen cette fois : dans une opinion séparée à un arrêt de 2012 (n°9300/07, GC, Herrmann c. Allemagne), le juge de la CEDH Pinto de Albuquerque a défendu un « spécisme nuancé », réutilisant ainsi la dialectique antispéciste.

Ces apparitions dans la jurisprudence des théories antispécistes restent heureusement isolées. Pour aller plus loin, nous vous proposons l’étude suivante, qui fait un état des lieux des traductions juridiques de l’antispécisme en Occident : Animaux et droit en Occident.
Comme l’explique Paul Sugy, « Si nous nous désintéressons (…) de la question de l’homme, nous tiendrons un moment avant que l’édifice ne s’écroule, mais ce sera par habitude ou par conservatisme, et nous aurons la forme d’un système humaniste sans en avoir la substance : alors l’arbre, faute d’être irrigué par la sève, finira tôt ou tard par se dessécher et, à ce moment, l’antispécisme aura vraiment triomphé ». Pour résister à la déconstruction de la nature humaine, le bon sens doit être complété par une réflexion anthropologique approfondie. Il est important de relégitimer l’homme, ses droits sur les animaux, ainsi que sa responsabilité envers eux.

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