Nantes serait-elle en train de devenir Marseille-sur-Loire ? Après des coups de feu au pistolet à plomb sur un tramway, en plein centre-ville ce dimanche, des Nantais s’interrogent. D’autant qu’en haut lieu, l’on sent un raidissement, voire une volonté de reprendre la main sur la situation à Nantes – en témoigne l’attitude du préfet qui refuse mordicus d’évacuer un gymnase squatté à Saint-Herblain, de peur de relancer la pompe à aspirer les migrants vers Nantes.
Des coups de feu ont eu lieu dimanche à 23h35 à Médiathèque, immédiatement à l’ouest du centre-ville. Deux bandes rivales se sont croisées dans le tramway, l’un des groupes est descendu et a fait feu sur une vitre, visant quatre personnes dans le tram, avec un pistolet à plomb. La vitre a tenu, et le tireur a pris la fuite.
La CGT réagit
La CGT Semitan a réagi par le biais d’un communiqué qui dénonce l’irresponsabilité des dirigeants face à l’insécurité qui empire : « Aujourd’hui, nous passons un cap dans la violence. De plus en plus d’armes à feu de plus ou moins gros calibre sont utilisées pour des règlements de compte ou autres choses et nous ne voulons pas être les victimes collatérales des manques d’ambitions de l’État en matière de sécurité publique. La liste de bus ou tram attaqués commence à s’allonger dangereusement. Nous disons stop. Personne ne prend ses responsabilités. Une faible quantité de personnes sème le chaos sur le réseau. Et rien ou presque n’est mis en place pour l’éradiquer ».
Ce n’est pas la première fois que ce quartier, immédiatement à l’ouest du centre-ville, et au sud du beau quartier de Graslin, connaît des coups de feu. En juillet 2018 des coups de feu avaient été tirés près d’un bar situé rue d’Ancin. Rapidement retrouvés grâce à la vigilance des riverains, les tireurs présumés venaient de Rezé.
Le 1er janvier 2019, des tirs avaient retenti le matin à l’angle des rues Sainte-Catherine et du Couëdic, devant l’hôtel Mercure. A ce jour le tireur n’a pas été retrouvé, mais selon nos informations il proviendrait du quartier « sensible » de la Boissière (Nantes Nord) et a depuis été emprisonné pour d’autres faits, qu’il purgerait dans une unité spécialisée pour délinquants atteints de troubles psychiatriques, hors Bretagne.
Des délinquants qui ne se cachent plus avec leurs armes lourdes
L’affaire du tramway visé par des tirs a réveillé les souvenirs de certains de nos lecteurs. L’un d’eux, qui habite au nord de Nantes, se souvient du passage de « cinq délinquants avec gilets pare-balles et kalachnikov, qui sont venus le plus naturellement du monde acheter des cigarettes et divers trucs, avant de repartir. C’était pendant le Ramadan, il y a quelques semaines, à Nantes-Nord, et ce n’était clairement pas des flics, on les connaît à force de les voir ».
Un autre lecteur du même secteur nous relate une autre anecdote du Ramadan 2019 : « il y avait deux jeunes qui achetaient quelque chose pour le Ramadan dans la rue – une sorte de vente informelle [à la sauvette, donc] et ils se sont embrouillés. L’un d’eux a sorti son flingue et l’a pointé sur le front de l’autre, qui a sorti sa Kalach et lui a mis dans le ventre. Chacun d’eux criait ‘’tire, tire’’ mais personne n’a tiré, tandis que les gens s’écartaient ou fuyaient. Plus tard l’un des deux jeunes a dit en public ‘’si je n’avais pas eu peur des darons [parents] je lui aurait niqué sa race. Ça devient vraiment n’importe quoi ».
Ce policier nantais confirme que les incidents avec des trafiquants armés sont légion ces dernières semaines, « même si c’est difficile à vérifier à posteriori – évidemment ça arrive quand nous ne sommes pas là, et qu’il y a aussi l’effet loupe de la rumeur ». Cependant, en haut lieu, il serait question de « mettre fin à la dérive marseillaise à Nantes et de tenter de rétablir l’ordre ».
Marseillaise, vraiment ? « Les points communs ne manquent pas », confirme ce gradé policier : « un grand marché pour la drogue, et donc beaucoup de délinquance liée – car-jackings, homejackings, rodéos, infractions à la législation sur les stupéfiants bien sûr, squats, vols de voiture…, des règlements de compte avec des armes à feu – avec heureusement moins de morts qu’à Marseille, des groupes communautaires étrangers, voire des mafias en action dans la ville (Caucase, roumains, albanais, Afrique de l’Est, Nigéria, Maghreb…), et surtout un fatalisme de la part des autorités politiques, judiciaires et même policières qui ne fait qu’empirer les choses ».
Le laxisme judiciaire
Un policier de la base confirme : « Vu le laxisme judiciaire à Nantes et le peu de considération dont nous faisons l’objet – à commencer par notre chère mairesse – ça n’incite pas à bosser. Quand on voit six mois de boulot d’enquête abattus par un juge à qui il manque un formulaire, ou que les cambrioleurs qu’on arrête à six heures du matin sont libres à midi, les bras en tombent à beaucoup ».
Un autre ajoute : « pareil pour les ILE [infractions à la législation des étrangers] On nous demande d’en faire, ça vaut des tonnes de paperasses, et même quand on fait tout bien, les juges les relâchent, bref on perd du temps et des effectifs alors qu’on manque déjà de l’un et des autres. Et ça vaut aussi pour d’autres types d’infractions pour lesquels il n’y a plus de réponse judiciaire ».
L.M.
Photo d’illustration : DR
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