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A propos de la dernière frappe US en Afghanistan, par Dominique Delawarde

Une semaine après sa frappe spectaculaire et illégale en Syrie, Trump continue sa démonstration de force en Afghanistan en utilisant pour la première fois la bombe «non nucléaire» la plus puissante de son arsenal surnommée MOAB (Mother of all Bombs). Par cette nouvelle initiative, il offre à chacun l’opportunité de se poser quelques questions sur les frappes US en général, sur celle- ci en particulier, et d’en tirer des conclusions.

Cadre général

L’analyse des sources officielles US énumérées dans l’article suivant et facilement consultables, ici  ou là, fait apparaître, qu’en stricte application du droit du plus fort, sans accord de l’ONU et le plus souvent sans accord de l’État concerné, les forces aériennes US auront bombardé 7 pays en 2016 et délivré un total de 26 172 bombes (au minimum) : 12 192 en Syrie, 12 095 en Irak, 1 337 en Afghanistan, 496 en Libye, 35 au Yemen, 14 en Somalie et 3 au Pakistan.

Ce total impressionnant est en augmentation de plus de 3 000 bombes (12%) par rapport à 2015. A noter que l’US Air Force a effectué 67% des frappes de la coalition occidentale en Irak, avec l’accord du gouvernement et 96% des frappes de la coalition en Syrie sans accord du gouvernement légal. Cet écart de pourcentage semble montrer une réticence d’une majorité des pays de la coalition à intervenir en Syrie, sans feu vert de l’ONU et sans l’accord du gouvernement légal.

La frappe en Afghanistan

Le Jeudi 13 avril à 19h32, heure locale, 17h02 heure française, l’US Air Force a largué d’un C130, le premier des 15 à 20 exemplaires en service, de sa «Méga bombe non nucléaire à effet de souffle» (GBU-43/B Massive Ordnance Air Blast Bomb: MOAB), sur un réseau de tunnels fortifiés qui servirait de base à Daesh. La frappe s’est faite avec accord du président afghan Ashraf Ghani.

Testée avant mise en service en 2003, cette bombe est la plus puissante bombe non nucléaire de l’arsenal militaire US. Pour cette raison elle est surnommée Mother of All Bombs (MOAB). D’un poids de 10,3 tonnes elle développe un pouvoir explosif équivalent 11 tonnes de TNT et coûte 16 millions de dollars l’unité (soit le prix de 16 à 25 missiles Tomahawks selon le modèle de ces derniers). Son rayon d’efficacité totale n’est que de 150 mètres.

Pour l’anecdote, selon le New York Time, le réseau de tunnels visé aurait été financé, dans les années 80, pour quelques dizaines de millions de dollars, par la CIA, pour soutenir les moudjahidines dans leur lutte contre l’ex URSS. (gaspillage évident d’argent public… le contribuable US paie la construction, puis la destruction…).

Pour l’anecdote encore, la fameuse MOAB est largement dépassée en puissance et en efficacité par l’ «Aviation Thermobaric Bomb of Increased Power». Cette bombe non nucléaire russe , testée en 2007 avant mise en service, a été, par dérision pour la MOAB, surnommée FOAB (Father of all Bombs). Elle est 30% plus légère que la MOAB (7,1 tonnes) mais développe une puissance explosive équivalente à 44 tonnes de TNT (4 fois supérieure à celle de la MOAB US). Son rayon d’efficacité totale est de 300 mètres (2 fois celui de la MOAB).

S’agissant de l’efficacité de la frappe, deux versions s’affrontent dont aucune ne peut être considérée comme plus valable que l’autre. Le communiqué «US-gouvernement Afghan» évoque aujourd’hui 96 combattants de DAESH tués. Le communiqué de DAESH indique que cette frappe n’a fait aucune victime. On est entré dans la guerre de l’information et des communiqués (relire à ce propos : la guerre de l’information).

En conclusion, harcelé quotidiennement par les médias et les néocons depuis son entrée en fonction, Trump semble se lancer dans une rhétorique guerrière pour trois raisons :

1 – Désarmer les néocons et donner du grain à moudre aux médias pour qu’ «ils le lâchent un peu». Cette technique a été utilisée avec succès par Bill Clinton le 16 décembre 1998 à la veille de l’examen de sa destitution par la chambre des représentants pour ses mensonges dans l’affaire Lewinski. Il a déclenché des frappes sur l’Irak (Opération Desert Fox). 415 missiles Tomahawks ont été tirés faisant de 600 à 2000 tués en 3 jours. L’attention des médias a été détournée de l’affaire Lewinski, …..qui a été donc été oubliée. Bien sûr, les Irakiens en ont payé le prix…

2 – Donner aux Américains lambda l’image d’un commandant en chef solide, déterminé, qui ne recule pas et tenter de rebâtir un minimum de cohésion et d’unité dans la population US : rien de tel qu’une bonne guerre pour refaire l’unité d’un pays.

3 – Envoyer quelques messages subliminaux à ses adversaires potentiels. (Syrie, Iran, Corée du Nord, Russie, Chine…) : « Les USA sont forts, très forts. Ils peuvent agir de manière unilatérale, brutale et imprévisible, sans feu vert de l’ONU. Leur commandant en chef n’hésitera pas…».

Ces frappes relèvent donc moins de la recherche d’une efficacité militaire que du «cinéma» et de «la communication». La simple mathématique montre que les 26 172 bombes larguées en 2016 par l’US Air force représentent, sans faire autant de bruit, l’équivalent de 3 MOAB par jour.

Dominique Delawarde

Crédit photo : Wikipedia (cc)
[cc] Breizh-info.com, 2017, dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine

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2 réponses à “A propos de la dernière frappe US en Afghanistan, par Dominique Delawarde”

  1. Abrux dit :

    On avait eu la même chose de la part des russes et les missiles qui partaient de la mer noire. Les médias occidentaux s’empressaient de pointer des pertes technologiques.

    Dans les 2 cas, j’ai eu l’impression d’un vendeur d’armes qui montre sa technologie aux acheteurs potentiels.

    Les USA démontrent aussi leur capacité de tuer un dictateur n’importe où sur la planète, notamment en Corée du Nord. Une nuit, il suffit de connaitre le lieu d’un dictateur.

  2. Nomizoé dit :

    Trump a été élu en expliquant qu’il fallait freiner l’immigration, construire un mur à la frontière avec le Mexique, défendre avant tout les intérêts des Américains, arrêter l’interventionnisme militaire à l’étranger, essayer de s’entendre avec la Russie, protéger les emplois américains, arrêter de déménager les usines hors du pays…

    Le programme de Trump était surtout populaire chez ceux qui souffrent de l’immigration. Les nationalistes se réjouissaient de la présence de Steve Bannon comme conseiller de Trump. Bannon est l’ancien directeur de Breitbart, un site très anti-immigration.

    Mais quand Trump a décidé de bombarder un aéroport syrien, le 7 avril dernier, ce n’était que le premier de toute une série de revirements qui vont tous dans le sens voulu par les mondialistes néoconservateurs, au détriment des nationalistes.

    https://www.google.fr/search?q=revirements+de+trump

    Les revirements concernent l’interventionnisme militaire à l’étranger, l’OTAN, le maintien des sanctions économiques contre la Russie, la politique de l’immigration, le protectionnisme économique dans les relations commerciales avec la Chine, le maintien à son poste de l’actuelle présidente de la banque centrale (FED), le renoncement provisoire à remplacer le système de santé obamacare… Soudain, même les tweets de Trump ne sonnent plus comme avant.

    Certains parlent d’une sorte de coup d’état néoconservateur à l’intérieur de la Maison Blanche. Steve Bannon risque de perdre son poste. Il se retrouve marginalisé au profit de Gary Cohn, un conseiller économique.

    La plupart des électeurs de Trump ne réalisent sans doute pas ce qu’il s’est passé, car ils sont informés par la télé et les journaux. Mais sur internet, les nationalistes se sentent trahis.

    Le revirement n’est pourtant pas complet. On espère encore que le mur se fera. Les néocons n’ont pas encore réussi à faire virer le ministre de la justice Jeff Sessions, qui voudrait remettre les lois anti-immigration en application. Trump a réussi à nommer un juge conservateur à la Cour Suprême. Et il a indiqué qu’il n’envisageait pas d’intervention militaire massive en Syrie.

    Depuis l’attaque contre l’aéroport syrien, Trump monte dans les sondages. Ça prouve sans doute que sa nouvelle politique plaît aux média. Mais on ne sait pas comment expliquer ses revirements.

    Est-ce qu’il a craqué sous la pression ? Est-ce que les néoconservateurs ont trouvé un moyen de chantage ? Certains disent que c’est dû à l’influence de son gendre, le milliardaire juif orthodoxe Jared Kushner. Tout le monde essaye de deviner ce qui se passe dans la tête de Trump. On attend de voir ce qu’il va faire dans les mois qui viennent.

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